Page:Dickens - L’Abîme, 1918.djvu/156

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vieux lambeau de voile, ayant perdu ses habits. Point d’habits. Et pourtant si, il en avait un, car la main, la main furtive et rapide, en sondait toutes les poches. La même voix intérieure avertissait Vendale de s’arracher à sa torpeur. Impossible en ce moment. Son rêve le changea de lieu encore une fois. Il se vit dans la vieille cave du Carrefour des Éclopés. Le lit, ce même lit qui meublait la chambre de l’auberge de Bâle, avait été transporté dans cette cave où Wilding lui apparut. Wilding, ce pauvre ami, n’était point mort, et Vendale ne s’en trouvait pas surpris. Wilding le secouait par le bras et lui disait : « Regardez cet homme ! Ne voyez-vous pas qu’il s’est levé et qu’il s’approche du lit pour retourner l’oreiller ? Pourquoi retourne-t-il cet oreiller, si ce n’est pour y chercher les papiers que vous portez dans votre poche ? Éveillez-vous. » Et pourtant Vendale dormait toujours et se perdait dans de nouveaux rêves.

Attentif et calme, le coude toujours appuyé sur la table, son compagnon lui dit :

— Éveillez-vous, Vendale. On nous appelle. Il est quatre heures.

Vendale, en ouvrant les yeux, aperçut le visage nuageux d’Obenreizer penché sur le sien.

— Vous avez eu un sommeil bien lourd, — dit le Suisse, — c’est la fatigue du voyage et le froid.

— Je suis tout à fait éveillé maintenant, — s’écria Vendale en sautant sur ses pieds ; mais il sentit que ses jambes fléchissaient. — Et vous, n’avez-vous pas du tout dormi ?

— Je me suis assoupi peut-être ; cependant il me