Page:Dickens - L’Abîme, 1918.djvu/216

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— Je ne veux en aucune façon priver Madame Dor de sa part d’embrassades, — fit Bintrey en tirant sa montre, — et je ne trouve pas mauvais de vous voir réunis tous trois dans un coin comme les Trois Grâces. Je fais simplement la remarque que l’heure est venue et que nous pourrions nous mettre en marche. Quel est votre sentiment à ce sujet, Monsieur Laddle ?

— Limpide, Monsieur, — répliqua Joey avec une grimace tout aimable. — C’est étonnant, Monsieur, comme je me sens limpide dans tout mon être, depuis que j’ai vécu quelques semaines sur la terre. Jamais je n’y avais passé si longtemps et cela m’a fait beaucoup de bien. Par exemple, je conviens que si, au Carrefour des Éclopés, je me trouve quelquefois un peu trop au-dessous de la terre, au sommet du Simplon, je me trouvais un peu trop au-dessus. J’ai rencontré le milieu ici, Monsieur… Là, si j’ai jamais pris la vie gaiement depuis que je suis au monde, c’est bien aujourd’hui. Et je compte le montrer en portant certain toast à table. Voilà mon toast : « Que Dieu les bénisse tous les deux ! »

— J’appuierai le toast, — fit Bintrey. — Et maintenant, Monsieur Voigt, à nous deux, comme de vieux amis. Bras dessus, bras dessous, marchons ensemble.

La foule attendait aux portes, on prit gaiement le chemin de l’église, et cet heureux mariage fut accompli.

La cérémonie n’était point encore terminée quand on vint du dehors quérir le notaire.