Page:Dickens - L’Abîme, 1918.djvu/64

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pour y découvrir quelque trace de la présence de la jeune fille.

— Est-ce qu’elle vous a accompagné à Londres ? — demanda-t-il.

— Elle est à Londres.

— Quand et où pourrai-je avoir l’honneur de me rappeler à son souvenir ?

Obenreizer chassa son nuage et prit de nouveau son visiteur par les coudes.

— Montons ! — lui dit-il.

Un peu effarouché par la soudaineté d’une entrevue qu’il avait fortement souhaitée de toute son âme, George Vendale suivit Obenreizer dans l’escalier.

Dans une pièce de l’étage supérieur, une jeune fille était assise auprès de l’une des trois fenêtres ; il y avait aussi une autre dame plus âgée, le visage tourné vers le poêle, bien qu’il ne fût pas allumé, car c’était la belle saison. La respectable matrone nettoyait des gants. La jeune fille brodait. Elle avait un luxe inouï de superbes cheveux blonds, gracieusement nattés, le front blanc et rond comme les Suissesses. Son visage était aussi bien plus rond qu’un visage Anglais ordinaire. Sa peau était d’une étonnante pureté et l’éclat de ses beaux yeux bleus rappelait le ciel éblouissant des pays de montagnes. Bien qu’elle fût vêtue à la mode Anglaise, elle portait encore un certain corsage, des bas à coins rouges, et des souliers à boucles d’argent qui venaient de Suisse en droiture. Quant à la vieille dame, les pieds écartés, appuyés sur la tringle du poêle, elle nettoyait, frottait ses gants avec une ardeur extraordinaire, et certainement elle n’avait