Page:Dickens - Olivier Twist.djvu/216

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

CHAPITRE XXX.
Ce que pensent d’Olivier ses nouveaux visiteurs.

Après avoir réitéré à ces dames l’assurance qu’elles seraient agréablement surprises à la vue du criminel, le docteur prit le bras de la jeune demoiselle, offrit la main à Mme Maylie, et les conduisit, avec beaucoup de cérémonie, au haut de l’escalier.

« Maintenant, dit-il à voix basse en tournant doucement la clef dans la serrure, vous allez me dire ce que vous en pensez. Quoique sa barbe ne soit pas fraîchement rasée, il n’en a pas l’air plus féroce. Attendez… laissez-moi voir si vous pouvez entrer. »

Le docteur entra le premier, jeta un coup d’œil dans la chambre et fit signe aux dames d’avancer : puis il ferma la porte derrière elles, et écarta doucement les rideaux du lit. Sur ce lit, au lieu du scélérat à mine repoussante qu’elles s’attendaient à voir, était étendu un pauvre enfant, épuisé de fatigue et de souffrance, et plongé dans un profond sommeil. Il avait un bras en écharpe, replié sur la poitrine, et il appuyait sur l’autre sa tête à demi cachée par une longue chevelure qui flottait sur l’oreiller.

L’honnête docteur, tenant le rideau soulevé, resta une minute environ à regarder en silence le pauvre blessé. Tandis qu’il l’examinait, la jeune fille se glissa doucement près de lui, s’assit à côté du lit et écarta les cheveux qui couvraient la figure d’Olivier ; en se penchant sur lui, elle laissa tomber des larmes sur son front.

L’enfant tressaillit et sourit dans son sommeil, comme si ces marques de pitié et de compassion l’eussent fait rêver d’amour et d’affection qu’il n’avait jamais connus ; de même que les sons d’une musique harmonieuse, le murmure de l’eau dans le silence des bois, le parfum d’une fleur, ou même l’emploi d’un mot qui nous est familier, rappellent parfois à notre imagination le vague souvenir de scènes sans réalité dans notre vie ; souvenir qui se dissipe comme un souffle, et qui semble se rattacher à une existence plus heureuse et passée depuis long-