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apporté quelque chose qui vous réjouira la vue. Matois, mon ami, ouvrez le paquet et donnez à Guillaume ces bagatelles pour lesquelles nous avons dépensé tout notre argent ce matin. »

Le Matois obéit aussitôt ; il ouvrit le paquet qui était assez gros, et enveloppé d’une vieille nappe ; puis il passa un à un les objets qu’il contenait à Charles Bates, qui les posait sur la table, en vantant à mesure leur rareté et leur excellence.

« En voilà un pâté de lapin, Guillaume ! s’écria-t-il en découvrant un énorme pâté ; des bêtes si délicates avec des membres si tendres, que les os mêmes fondent dans la bouche et qu’il n’y a que faire de les ôter ; une demi-livre de thé vert, si bon et si fort que, rien que de le jeter dans l’eau bouillante, il y a de quoi faire sauter le couvercle de la théière ; une livre et demie de cassonade qui n’a pas coûté de peine aux moricauds des îles pour le faire si bon que ça, non, c’est le chat ; deux petits pains de ménage si appétissants ; un fromage de Glocester premier choix, et, pour couronner le tout, quelque chose de si succulent, que vous n’avez jamais rien goûté de pareil. »

En même temps, à la fin de son panégyrique, Bates tirait d’une de ses larges poches une grande bouteille de vin soigneusement bouchée, tandis que M. Dawkins remplissait un verre de la liqueur qu’il avait apportée, et que le convalescent Sikes le vidait d’un trait sans la moindre hésitation.

« Ah ! dit le juif en se frottant les mains avec satisfaction ; ça va bien aller à présent, Guillaume, ça va bien aller.

— Ça va bien aller ! s’écria M. Sikes ; j’aurais eu le temps d’aller, en attendant, vingt fois dans l’autre monde, avant que vous fissiez rien pour me venir en aide. Qu’est-ce que cela signifie, vieux fourbe que vous êtes, de laisser un homme dans cet état pendant trois semaines et plus ?

— L’entendez-vous ? dit le juif à ses élèves en haussant les épaules ; et nous qui lui apportons toutes ces belles choses !

— Ce n’est pas de cela que je me plains, reprit M. Sikes un peu radouci en jetant les yeux sur la table ; mais quelle excuse pouvez-vous invoquer pour m’avoir laissé ainsi malade et manquant de tout, et n’avoir pas fait plus attention à moi qu’à ce chien que voilà ? Éloigne-le, Charlot.

— Je n’ai jamais vu un chien aussi malin que celui-là, dit maître Bates en exécutant l’ordre de Sikes ; il vous flaire les vivres comme une vieille femme au marché. Il aurait fait for-