Page:Dickens - Vie et aventures de Martin Chuzzlewit, 1866, tome1.djvu/62

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— Vous n’êtes toujours pas le mari de sa nièce, interrompit l’étranger. Je puis vous en répondre ; car il était là avant vous.

— Qu’est-ce que cela signifie ? dit M. Pecksniff avec un mélange de surprise et d’indignation. Qu’est-ce que vous me contez là, monsieur ?

— Attendez un peu, cria l’autre. Peut-être êtes-vous un cousin ; le cousin qui habite ce pays ?

— Je suis le cousin qui habite ce pays, répliqua l’homme de bien.

— Vous vous nommez Pecksniff ? dit le gentleman.

— Oui.

— Je suis fier de faire connaissance avec vous, et je vous demande pardon, dit le gentleman en touchant le bord de son chapeau, et en plongeant ensuite sa main par derrière dans les profondeurs de sa cravate pour y trouver un col de chemise, qu’il ne put, malgré tous ses efforts, ramener à la surface. Vous voyez en moi, monsieur, une personne qui porte également intérêt au gentleman d’en haut. Attendez un peu. »

En même temps il toucha l’extrémité de son nez proéminent, comme pour aviser M. Pecksniff qu’il avait un secret à lui communiquer tout de suite ; puis, ôtant son chapeau, il se mit à chercher dans la coiffe, parmi une quantité de papiers chiffonnés et de bouts de cigares, et il en retira l’enveloppe d’une vieille lettre, toute souillée de crasse et parfumée d’odeur de tabac.

« Lisez-moi cela, s’écria-t-il en présentant l’enveloppe à M. Pecksniff.

— Ceci est adressé à Chevy Slyme, esquire, dit ce gentleman.

— Vous connaissez, je pense Chevy Slyme, esquire ? » répliqua l’étranger.

M. Pecksniff haussa les épaules comme s’il eût voulu dire : « Certainement je le connais, malheureusement.

— Très-bien, reprit le gentleman. Eh bien ! voilà tout ; c’est là l’affaire qui m’amène ici. »

Et en même temps, ayant fait un nouvel effort pour trouver son col de chemise, il ne tira qu’un cordon.

« Mon ami, il m’est très-pénible, dit M. Pecksniff, secouant la tête et souriant avec componction, il m’est très-pénible d’être forcé de vous déclarer que vous n’êtes nullement la personne que vous prétendez être. Je connais M. Slyme, mon