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BIG

Menage dérive ce mot de bivariare, qu’on a dit bisvarare, d’où il dérive aussi bigarreau, & bigearre : Pasquier le dérive de virgatus, & diversis coloribus partitus.

BIGARRÉ, ÉE. part. Qui est couvert, qui est diversifié de couleurs tranchantes & mal assorties. Variegatus, varius, discolor, versicolor. Il avoit un habit bigarré. Ils reluisoient, non pas d’or ni de parures bigarrées, mais d’acier bien poli. Vaug. Une compagnie bigarrée est une troupe de gens ramassés par hasard, qui n’ont ni le même génie, ni les mêmes inclinations. Un discours bigarré de phrases recherchées, & de paroles étudiées, donne dans la vûe des personnes peu intelligentes ; mais il paroît ridicule aux gens de bon goût. Port-royal.

BIGARROTIER. Voyez Bigarreautier & Cerisier.

BIGARRURE. s. f. Mauvais assortiment de couleurs & d’ornemens sur un habit, sur des meubles, &c. Insulsa, inepta varietas. ☞ La bigarrure suppose un assemblage mal assorti, que le caprice forme pour se réjouir, ou que le maivais goût adopte, dit M. l’Abbé Girard. La bigarrure des couleurs & des ornemens fait des habits ridicules, ou de théâtre. Voyez Variétés, Diversités.

Bigarrure, se dit aussi des Ouvrages d’esprit, composés de plusieurs choses qui n’ont aucune liaison ni relation ensemble. Mala congeries, farrago. Les bigarrures de Tabourot, qui y prend le nom de sieurs des Accords : c’est un livre d’une façon extraordinaire, fait de plusieurs pièces ramassées. Pasquier, L. VIII de ses Lettres, f. 245, loue aussi des bigarrures de Tabourot, comme pleines de gentillesse & de naïveté d’esprit, & bigarrées & diversifiées d’une infinité de beaux traits : au reste, cet ouvrage est un mauvais livre, rempli de sottise. La bigarrure de ce chapitre vous plaira. Balzac. N’est-ce pas profaner le sérieux, que de le mêler avec du comique ? Quelle bigarrure ! Amusemens sérieux & comiques.

Bigarrure, en termes de Fauconnerie, se dit des taches rousses & noires, ou diversités de couleurs qui rendent le pennage d’un oiseau bigarré. Versicolor.

BIGAT. s. m. Bigatus nummus. C’est le nom d’une ancienne monnoie des Romains, qui étoit d’argent, & sur laquelle étoit d’un côté un char tiré par deux chevaux, en latin biga. C’est de-là qu’elle avoit pris son nom. Pline, L. XXXIII, c. 3. C’étoit le denier dont la marque fut, au temps de la République, un char conduit par une victoire, & tiré par deux chevaux ou par quatre, d’où ils furent appelés ou bigats ou quadrigats, quadrigæti. Quelquefois sur le ’bigat, au lieu de deux chevaux, le char est tiré par deux cerfs, comme sur les médailles de la famille Axsia : dans la famille Crepereia deux hippopotames portent un Neptune sur leurs queues. Plusieurs des médailles que nous appelons consulaires, sont des bigats.

BIGE. s. f. ☞ Charriot à deux chevaux de front, tiré par deux chevaux, attelé de deux chevaux, tiré par deux chevaux unis sous un même joug, sont disent les Vocabulistes, Biga. Quoique ces sortes de mots ne soient pas dans l’usage, & qu’il n’y ait que quelques Savans qui s’en servent en certaines rencontres, cependant ils sont très-utiles, & épargnent des périphrases. Les Biges a les quadriges étoient les charriots qui couroient dans la lice. Dans des temps plus anciens, les biges étoient aussi d’un usage fort commun à la guerre & dans les combats. Dans Homère, dans Hésiode, dans Virgile, tous les Héros combattent en bige, c’est-à-dire, dans un char traîné par deux chevaux. Il y a des biges sur plusieurs médailles, sur-tout sur celles qu’on nomme consulaires, sur celles de Syracuse, &c.

Ce mot est formé du latin biga, qui se dit comme pour bijuga, & signifie un char qui a deux chevaux, ou autres animaix attelés à son joug, ou qui a un joug de deux animaux, de bis & jugum, ou qui a un double joug, & probablement ce mot a passé, par métaphore, des voitures tirées par des bœufs à celles qui étoient attelées de chevaux : ou bien les chevaux même dans des commencemens étoient enharnachés d’une espèce de joug, qui leur portoit sur le garot, ou sur le cou.

BIGEARRE. Voyez Bizarre.

Se BIGEARRER. v. recip. Le Roi d’Espagne n’osant recommencer la guerre, pendant que la France étoit florissante, unie, bien d’accord, & de même volonté, il a taché de semer la division & la discorde parmi nous, & sitôt qu’il a vu nos Princes se mécontenter, ou se bigearrer, il s’est secrétement jeté à la traverse, pour encourager l’un des partis, nourrit & fomenter nos divisions, & les rendre immortelles, pour nous amuser à nous quereller, entrebattre & entretuer l’un & l’autre, afin d’être cependant laissé en paix, & tandis que nous nous affoiblirions, croître & s’augmenter de notre perte & diminution... Sat. Mén. t. I, p. 112, 113.

Cotgrave, le seul qui ait fait mention de bigearrer, dit que c’est la même chose que bigarrer, & en ce cas se bigearrer signifieroit se partager, se diviser ; ce qui ne quadre pas mal avec le passage ci-dessus. Mais sans improuver ce sens-là, je crois que se bigearrer signifie être bigearre, ou bizarre, capricieux, fantasque, se cabrer, prendre la chèvre. Quoiqu’il en soit, il n’est pas d’usage.

BIGEMINATUM FOLIUM. Terme de Botanique, se dit quand un pétiole, divisé en deux, soutient, par son extrémité, quatre folioles.

☞ BIGEN. Ville du Japon, dans la presqu’île de Niphon, capitale du petit état de même nom, qui est dans la province ou pays de Jetxingo.

BIGERRIEN, ENNE. s. m. & f. Bigerro, Bigerrus. Ancien nom des habitans du pays de Bigorre, dont M. de Marca s’est servi quelquefois : Bigordan est celui qu’on donne aujourd’hui aux habitans de la même contrée.

BIGÉRIQUE, ou BIGERRIQUE. adj. m. & f. Bigerrinus. Les robes & les manteaux rudes & velus, fabriqués d’une laine grossière, portoient anciennement le nom de bigerriques, du nom du pays de Bigorre où on les travailloit, comme l’on peut voir dans Sévère Sulpice, & dans Fortunat, qui témoignent que S. Martin acheta pour son usage une cape bigerrique ; car c’est ainsi que je veux la nommer, estimant que ces habillemens bigerriques pouvoient être semblabes aux capes qui se fabriquent maintenant en Béarn, d’une laine grossière, pour défendre les pauvres gens contre le froid & les pluies. De Marca. Paulin les appelle en latin pellitæ bigerræ ; Sulpice Sévère, Bigerrica vestis brevis atque hispida, bigerrica palla ; d’autre bigerra.

BIGLE. adj. & s. m. & f. ☞ Qui a un œil ou les deux yeux tournés en dedans ; louche. Strbo, distortis oculis. Il est bigle, c’est un méchant bigle.

Ce mot vient de obliquulus, diminutif de obliquus. Mén. D’autres le font venir de binus oculus, c’est-à-dire, œil double, & qui regarde en deux endroits. Cos.

Bigle, est aussi une espèce de chien de chasse qui vient d’Angleterre, qui sert pour les lièvres & les lapins.

BIGLER. v. n. Regarder en bigle, en louche. Distortis oculis inuteri, aspicere. Cet enfant s’accoutume à bigler.

BIGNARD. Nom de deux Abbayes de Bénédictines proche de Bruxelles ; Bignard la grande, & Bignard la petite. On ne reçoit que des filles nobles parmi les Bénédictines de Bignard la grande. Cette Abbaye fut fondée vers l’an 1133 par Sainte Wiwine, qui en fut première Abbesse.

BIGNE. s. f. Tumeur, bosse au front, qui vient par quelque coup reçu, ou par quelque chute. Tuber, tuberculum. Il est suranné.

BIGNET. Voyez BEIGNET.

☞ BIGNONE. s. f. Genre de plante, qui tire son nom de celui de M. l’Abbé Bignon. Sa fleur est monopétale, irrégulière, ressemblante aux fleurs labiées, le pistil attaché comme un clou à la partie postérieure de la fleur. Il devient dans la suite un fruit ou une filique partagée en deux loges, & remplie de semences aplaties, & garnie de deux ailes membraneuses. Encyc.

☞ BIGOIS. s. f. Nymphe qui avoit écrit dans la Toscane un livre touchant l’art d’interpréter les éclairs. On gardoit ce livre à Rome dans le Temple d’Apollon, avec quelques autres de cette espèce.