Page:Dictionnaire de Trévoux, 1771, II.djvu/1011

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
1003
COU

toires qui coutent d’ordinaire tant de sang & tant de larmes. Fléch. Rien ne coute plus que ce qui paroît n’avoir rien couté : je veux dire cet air simple & naturel, mais noble & poli, en quoi notre langue est si différente des autres. Bouh. Le nécessaire d’une langue ne coute guères, mais les délicatesses sont difficiles. Ch. de Mer. L’esprit n’est point piqué agréablement, quand il lui coute trop de peine à démêler l’obscurité d’une pensée. Bouh.

Après les noirs forfaits que votre amour vous coute,
Votre ame doit frémir de la paix qu’elle goûte. Qui.

De tant de duretés que j’étale à regret,
Chaque mot à mon cœur coute un soupir secret. Corn.

Et quand par mes efforts je pourrais l’attendrir,
Mes jours ne valent point qu’il m’en coûte un soupir. Campistron.

Couter signifie aussi faire une chose à regret, avec répugnance. Ægrè ferre aliquid. On peut aussi se servir du verbe constare & stare. Jamais résolution n’a tant couté à prendre. Voit. Quand il faut qu’un honnête homme fasse des soumissions, flatte les Grands, tout lui coute. Quand il faut servir ses amis, rien ne lui coute. On dit aussi d’un prodigue, que l’argent ne lui coute rien. On dit en amour :

Tout est doux, rien ne coute,
Pour un cœur qui sçait aimer.

On le dit aussi des autres choses dont on est mauvais ménager. Ce Capitaine expose trop ses soldats, la vie des hommes ne lui coute guère. La peine de ses valets ne lui coute rien. On dit proverbialement qu’une chose coute plus cher qu’au marché ; pour dire, qu’elle coute trop cher. On dit, dans le même sens, qu’elle coute poil & bourre.

COUTERIE. s. f. terme d’histoire ecclésiastique. Office de Coutre, Officier inférieur dans une Eglise. Office de Sacristain, de celui qui gardoit les ornemens d’une Eglise. On l’appeloit aussi Custodie. Custodia. La Custodie ou Couterie de l’Eglise du village de Lampernesse n’étoit qu’un Office de Clerc suivant le Curé. Dissert. sur l’Abbé de S. Bertin, p. 216. Cet office consistoit à garder les clés de l’Eglise & du trésor, à prendre soin du luminaire, & à entretenir les lampes, à ouvrir les portes, à sonner les cloches. Ib. pag. 217.

COUTEUX, EUSE. Qui coûte beaucoup : fait à grands frais : qui engage de la dépense. Une machine très-couteuse. La manière la moins couteuse de mettre en terre le jeune plant, est d’y employer la charrue. Spect. de la Nat. Le goût des tableaux est couteux.

☞ Ce mot marque toujours une valeur considérable, quand il est employé seul.

COUTIER. s. m. Ouvrier qui fait des outils. Culcitarum opifex. Les Maîtres Tapissiers prennent dans leurs lettres & statuts la qualité de Contrepointiers neutrés & Coutiers.

COUTIÈRES. s. f. terme de Marine. Ce sont de grosses cordes qui soûtiennent les mâts d’une galère, & lui servent de haubans. Funes nautici.

COUTIL. Quelques-uns disent COUTIS. s. m. toile faite de fil, fort déliée, & fort pressée, qui sert à faire des tentes, à renfermer de la plume pour faire des lits, des traversins & des oreillers, parce qu’elle est extrêmement forte & serrée. Tela fili densioris. Les coutils doivent être faits de bon fil de chanvre & sans étoupe. Ils sont marqués à huit, neuf & dix raies, qui ont leurs longueurs & largeurs ordonnées par les statuts des Tapissiers, selon les villes où on les fabrique. Ceux de Bruxelles sont les plus estimés.

Quelques-uns dérivent ce mot de culcitra. Vigenère sur César dit que coutil se dit en latin Cadurcum, à cause qu’il s’en faisoit anciennement de fort bon à Cahors & dans le pays de Quercy.

On appelle coutils de brins ou grains grossiers, les gros coutils, dont on se sert pour garnir les chaises & autres meubles.

COUTILLE. s. f. arme offensive dont se servoient quelques soldats François au XVe siècle & vers le temps de Charles VII. Cultellus. C’étoit une espèce d’épée dont il est fait mention dans nos anciens Historiens sous le nom de cultellus. Elles étoient plus longues que les épées ordinaires, & tranchantes depuis la garde jusqu’à la pointe, fort menue & à trois faces ou pans. P. Daniel. T. II, pag. 1274, 1275. Voyez Lobineau, Hist. de Bret. T. I, p. 565. Il y en a qui écrivent coustilles.

COUTILLIER. s. m. c’est-à-dire fort vrai-semblablement, un soldat qui se servoit d’une coutille. P. Daniel. T. II, pag. 1274. Custos, Satelles, Latero, Miles armatus cultello, Cultellarius. Chaque lance ou homme d’armes des compagnies d’ordonnance qu’établit Charles VII, devoit être payé pour six personnes, lui-même compris dans ce nombre, dont trois seroient Archers à cheval, un Coutillier & un Page ou Valet. Id. C’est apparemment la même chose que les Cotilleurs qui se trouvent parmi les Officiers de la maison du Duc de Bretagne. Lobin. T. II, p. 1371. Les règles de la Milice du Duc de Bourgogne Charles, rapportée par Gollut, Mém. des Bourg. L. X, c. 96, portent que les Hommes-d’armes auront long estoc, roide & légier, couteau taillant, pendant au senestre, du côté de la selle ; seront montés de trois chevaux, dont l’un sera suffisant pour courre & rompre lance, qu’il ait chaufrein & plumas, & aussi bardes, s’il en peut recouvrer : les deux autres chevaux ne soient mendres du prix, l’un de 30 écus & l’autre de 10 écus pour porter leur Page & Coutiller ; lequel Coutiller soit habillé de brigandine ou de corset, fendu au côté à la façon d’Allemagne ; gorgerin, sallade, flamards, faltes ou brayers d’Archier ; de avant-bras à petites gardes & gantelets, javeline à arrêts légière, & la plus roide qu’il pourra trouver pour la couchier au besoin, & soit fournie de bonne épée & dague longue, tranchante à deux côtés. Le même Gollut dit, c. 98, les Chefs d’esquadre & leurs Lieutenans havoient chacun un Coutiller d’arme payé par le Duc, faisant en tout le nombre de douze Coutillers ; la charge desquels étoit d’aller avec le Fourrier de la garde pour prendre les logis. Deux d’iceux, pour esquadre, de dresser le logis pour leur esquadre, & le tiers retoutnoit au-devant pour guider & conduire l’esquadre en son logis.

Il y a apparence que le nom de coutillier a été formé du nom de coutille, comme on a formé les noms de Piquier, Grenadier, Fusilier, Canonier, Carabinier, &c. des noms de Pique, Grenade, Fusil, Canon, Carabine, &c.

COUTON. s. m. C’est le nom d’un arbre qui croît au Canada, & qui est assez semblable à notre noyer. Cet arbre est remarquable par le suc qu’il donne, en y faisant des incisions. Ce suc est très-agréable au goût, & on le prendroit pour du vin d’Orléans. Arbor vinifera juglandi similis.

COUTONNINE. Voyez Cotounine. C’est ainsi qu’il faut écrire.

COUTRAS, Corterate, petite ville de France dans le Périgord, remarquable par la victoire qu’Henri Roi de Navarre, depuis Henri IV, Roi de France, &c. y remporta en 1587. Elle est sur la Dordogne à 116 lieues de Paris.

COUTRAU. La poire de coutrau, espèce de mauvaise poire, appelée autrement de S. Gilles. Elle se mange au mois d’Août. La Quintinie.

COUTRE. s. m. grosse plaque de fer tranchant attachée à un des côtés de la charrue pour fendre & verser la terre. Aratri culter, dens, dentale. Il diffère du soc, qui est une autre grosse pièce de fer pointu qui commence l’ouverture de la terre. Les Poëtes buco-