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menté la coutume de Paris : Buridan celle de Reims : d’Argentré celle de Bretagne : L’Abbé & Ragueau celle de Berri : Chassanée celle de Bourgogne, &c. On appelle aussi un pays de coutume, par opposition au pays de Droit écrit, celui qui est régi par une coutume particulière. C’est un point de coutume, un article, une question de coutume. M. Catherinot, Avocat du Roi à Bourges, a fait une dissertation pour montrer que les coutumes ne sont pas de droit étroit.

On dit aussi, suivant les us & coutumes du pays, les us & coutumes de la mer. Voyez Us.

Les Gaulois, au rapport de César, L. I, de Bell. Gall. avoient leurs coutumes particulières qu’ils ont toujours conservées ; & il fut impossible aux Romains de les gouverner par d’autres loix. Il n’y eut que les Provinces voisines de l’Italie qui furent forcées de recevoir les loix Romaines.

On ne convient pas trop en quel temps s’est introduite cette diversité de coutumes, qui règne dans les diverses Provinces de France. Il y a bien de l’apparence que les Romains, après la Conquête des Gaules imposèrent aux vaincus la nécessité de s’assujétir aux loix Romaines. Mais dans la décadence de l’Empire, & lorsque les peuples venus du Nord, ou sortis d’Allemagne, inondèrent la Gaule, ils apportèrent une grande confusion à cet égard. Quelques-uns prétendent qu’on se régla encore long temps par le Droit Romain, parce que ces nations barbares ignoroient même jusqu’à l’usage des lettres & de l’écriture ; ensorte qu’ils n’avoient aucunes loix fixes, & qu’ils ne se gouvernoient que par certains usages, qui se conservoient parmi eux par tradition. Les François furent les premiers qui rédigèrent des loix par écrit, après qu’ils eurent passé le Rhin : on n’attribue pourtant la publication de la loi Salique qu’à Clovis, & avant lui les Visigoths, sous leur Roi Evarick, qui tenoit sa Cour à Toulouse, avoient déjà publié quelques loix. Cette loi Salique fut fort augmentée par les successeurs de Clovis ; & Charlemagne y ajouta plusieurs articles, & la fit rédiger dans un meilleur ordre. Ainsi les François observoient la loi Salique, & les Capitulaires de Charlemagne, de Louis le Débonnaire & de Charles le Chauve. Pour les Romains, qui étoient demeurés dans les Gaules, & les anciens Gaulois, ils conservèrent l’usage des loix Romaines. On tient même que sous les Rois de la première Race le Droit Romain étoit la loi générale, & que l’on n’y dérogeoit à l’égard des François, que dans le cas où leurs nouvelles loix contenoient quelque chose de contraire. Les Ecclésiastiques sur-tout observoient le Droit Romain, & la langue latine étoit celle des Tribunaux où l’on rendoit la Justice. Pour les Bourguinons, & les Visigoths, qui occupoient la partie méridionale de la France, ils s’en tenoient toujours au Droit Romain. Sous la IIe Race, les François firent prévaloir les loix civiles & Ecclésiastiques de leurs Rois, & le Droit Romain commençoit à être aboli : ce fut alors que le droit coutumier prit naissance ; mais la foiblesse des derniers Rois Castoringiens produisit une nouvelle confusion ; car les grands Seigneurs ayant usurpé la Souveraineté, chacun d’eux s’arrogea aussi le pouvoir de faire des loix. Ils firent des constitutions dans l’étendue de leur territoire, & c’est de là sans doute qu’est venue la diversité des coutumes, qui est si grande dans le Royaume. Avant Louis VII, il n’y avoit en France ni Juges ni loix. Le Seigneur d’un lieu en étoit la loi & le Juge. Le Roi & les grands s’étant trouvés vers ce temps-là incommodés de la dépense qu’ils avoient faite aux Croisades, aux Cours plénières, & aux Tournois, proposèrent aux villes & aux bourgs qui étoient de leur dépendance de se racheter pour de l’argent. Cette proposition fut à la fin acceptée de tout le monde. Le peuple alors devenu libre, demanda des loix, chaque Seigneur en donna de plus ou moins favorables, selon le parti qu’on lui faisoit. De là vint cette multitude de coutumes que l’on voit encore aujourd’hui dans les villes, bourgades & villages. Le Gendre.

La première rédaction de toutes les coutumes de France par autorité publique fut faite sous Charles VI, au rapport de M. Rouillard. La seconde rédaction fut faite en conséquence de l’Ordonnance de Charles VII, donnée au mois d’Avril 1453, au Montil-les-Tours. Et en l’année 1577, les États assemblés à Blois demandèrent la réformation des coutumes. Cela fut exécuté en 1585. Pour la coutume de Normandie. Voyez l’Hist. des Rois Jean, Charles V, VI, VII, par M. l’Abbé de Choisi. Voyez aussi M. Bruneau, dans son Traité des Criées, ou il donne une table chronologique des coutumes, & marque en quelle année chaque coutume a été rédigée.

Coutumes fouchères, sont celles qui veulent que pour succéder à un propre, on soit descendu en ligne directe de l’acquéreur, c’est-à-dire, de celui qui a acquis le premier l’héritage, & l’a mis dans la famille, lequel d’acquêt qu’il étoit en sa personne, est devenu propre à ceux de la famille, auxquels il est échu par les moyens qui sont les propres.

Coutumes locales, sont celles qui sont particulièrement observées dans un certain lieu, & qui ne le sont pas dans vous les endroits où s’étend la coutume générale du lieu.

Coutume, en Angleterre, signifie ce que nous appelons en France Douane.

Coutume se dit aussi d’un droit qu’on paye ordinairement comme une espèce de péage aux passages des villes, & le plus souvent à l’entrée des bailliages & Vicomtés, pour l’entretien des ponts & passages dont on ne connoît point l’origine ni l’établissement. Jus moribus constitutum, in more positum. On met un morceau de bois tourné & attaché au bout d’une perche, pour signal aux Voituriers qu’il faut payer ce droit ; & on l’appelle billot ou billet, sur quoi on a fait ces vers :

Ce billot suspendu qui à l’air se consume,
Avertit le Marchand d’acquitter sa coutume.

On appelle en quelques lieux petite coutume, le payement d’un denier pour bœuf ; & la grande coutume, celui de quatre deniers. Les Ecclésiastiques appelèrent autrefois louable coutume, les droits que le Clergé levoit sur les gens d’Eglise, comme décimes, annates, déports, proficiats, &c. contre lesquels Paquier a fait de fortes invectives. On a appelé coutumes Episcopales, certains deniers ou tributs qu’ils faisoient payer à Pâque.

Le mot de coutume se prend aussi dans le droit Canon pour de certains droits que les Evêques exigeoient des Ecclésiastiques & des Moines dans leurs visites. Ils les appelèrent droits de procuration ou de coutumes : comme ils ne se contentoient pas des droits ordinaires, les Moines ont souvent adressé aux Papes leurs plaintes, pour avoir quelque modération. Le Pape Clément V jugea à propos dans le Concile de Vienne d’apporter le remède nécessaire à ces excès. Il y fut arrêté que les Evêques dans les visites des Monastères n’exigeroient que ce que le droit commun ou spécial, la coutume ou le privilège leur accorderoient. Voyez les Clémentines au titre de Censibus, exactionibus & procurationibus.

Coutume a signifié autrefois un revenu annuel en blé, vin & autre chose payable au Seigneur qui avoit donné l’héritage à cette condition. Ainsi on dit, prendre un héritage à coutume ; pour dire, à certaines charges spécifiées, ou selon l’usage ordinaire des lieux. On appelle aussi droits des coutumes, d’autres sortes de droits établis par les Seigneurs dans les marchés sur les denrées par l’usage & la coutume des lieux.

Coutume se dit proverbialement en ces phrases. C’est la coutume de Lorris, où le battu paye l’amende : ce qui se dit, quand un homme qui a sujet de se plaindre, est encore condamné. Cet article ne se trouve