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fruits qui naissent par paquets le long des tiges. Ce fruit est terminé d’un style fourchu lorsqu’il n’est qu’embryon, & il est enveloppé d’une membrane qui le garantit jusqu’à ce qu’il ait acquis sa maturité. Pour lors il est arrondi, un peu comprimé, lisse & glabre, & composé d’une coque grisâtre qui renferme une semence tendre, douce & d’un goût d’amande. La même semence donne les deux individus mâles & femelles.

On se sert en Médecine principalement de la semence, dont la décoction faite dans du lait est très-bonne contre la toux & contre la jaunisse. Les feuilles sont bonnes aussi contre la brûlure : on en tire un suc qui est propre pour la surdité.

Chanvre bâtard. Galeopsis. Sa fleur est une espèce de tuyau découpé par le haut en deux lèvres, dont la supérieure est exposée en cueilleron & l’inférieure, divisée en trois parties, dont celle du milieu est la plus grande : son calice est comme un entonnoir fendu en cinq pointes. Boerhaave fait mention de quatorze espèces différentes de galeopsis, entre lesquelles il n’y en a que quatre qui aient des propriétés médicinales connues. Voyez le Dict. de James, au mot Galéopsis.

L’huile de chanvre est recommandée pour les pommades dans les petites véroles. Sa graine, qu’on nomme chénevis, sert à nourrir les oiseaux. Les feuilles de chanvre sèches, ou sa farine mêlée dans la boisson, rendoient ceux qui en usoient ivres, stupides & hébétés. Les Arabes néanmoins s’en servent ; ils en font une espèce de vin qui enivre. De la Mare, Traité de la Police, L. V, T. II, c. 3, où il cite Siméon Sethi, de aliment. facult. Cœlius Apitius, de re culinar. L’Auteur du Traité de la Police appelle chénevis, plante d’où l’on tire le chanvre : mais cela est contre l’usage constant & universel. Il n’y a que la semence de cette plante qui s’appelle chénevis, la plante se nomme chanvre. Chanvre mâle, cannabis sativa mas fructifera, sæcunda. Chanvre femelle, cannabis sativa femina, florifera, sterilis.

Teiller ou tiller, broyer le chanvre. Voyez ces mots. Rouir le chanvre, c’est le faire tremper quelque temps dans l’eau pour le faire sécher & tiller plus facilement. Cannabim rivo macerare, aquâ subigere. Il est défendu de faire rouir le chanvre dans des eaux vives où il y a du poisson. L’eau où a croupi le chanvre pour se rouir, est très-pernicieuse pour la santé ; & l’on remarque que les fièvres en automne sont fort fréquentes dans les pays où le chanvre est commun. Aussi l’on y défend de mettre tremper les chanvres dans les rivières & les eaux courantes qui sont bonnes à boire. On fait avec le chanvre de la toile & des cordes. Le plus gros chanvre, dont l’écorce est plus rude, est employé aux cordes ; & celui qui est plus fin fait du linge fin.

On nomme chénevotte les fragmens des tiges du chanvre dépouillées de leur écorce. On dit, j’en fais autant de cas que de chénevottes, pour dire, j’en fais peu de cas : il n’est bon qu’à brûler.

Chanvre. s. m. se prend souvent en françois pour la filasse qu’on tire des tiges de la plante du chanvre après qu’elles ont été rouies. On dit, voilà du chanvre, du chanvre peigné, du chanvre fin prêt à filer. Cannabini corticis filamenta. Des cordes de chanvre. Funes cannabini. Il a vendu tant de chanvre. De la toile de chanvre. Tela cannabina.

Chez les Romains, le chanvre nécessaire aux emplois de la guerre, s’amassoit par les ordres des Empereurs, seulement en deux villes de l’Empire d’Occident, à Ravenne en Italie, & à Vienne dans les Gaules. Celui qui en avoit l’Intendance au deçà des Alpes, étoit appelé le Procureur du Linifice des Gaules, & avoit son établissement à Vienne.

Κάνναϐις, cannabis, chanvre, vient du celtique Canab. Pezron.

CHANVRIER. s. m. Ouvrier qui habille, prépare & vend du chanvre.

☞ CHANVRIÈRE, s. f. Lieu semé de chanvre. La Fontaine s’est servi de ce mot.

Quand la chanvrière fut verte.

☞ On dit plus communément Chenevière. Voyez ce mot.

☞ CHAO, Ville de la Chine dans le Pekeli, du département de Chinting, Lat. 38d 10′.

☞ Chao. Autre ville de la Chine dans la Province de Justnan, département de Tali. 26d 46′.

☞ CHAOCHEU, Grande ville de la Chine dans la Province de Quanton, sur les frontières de celle de Fokien, Par les 23d 30′ de lat. Son département comprend dix villes.

☞ CHAOCHING. Ville de la Chine au département de Pingyang, par les 37d 27′ de latitude.

☞ Il y a une autre ville de ce nom dans la Province de Channton, département de Tungchang. Lat. 37d 44′.

☞ CHAOGAN. Ville de la Chine dans la Province de Fokien, département de Changchar, Lat. 24d.

CHAOHOA. Ville de la Chine dans la Province de Soutchouen, département de Paoning. Lat. 33d 10′.

☞ CHAOKING. Grande ville de la Province de Quanton dans la Chine, capitale d’un territoire de même nom. Elle a dix cités dans son ressort. Le Viceroi fait sa résidence dans cette ville. Lat. 23d 30′.

CHAOMANTIE. s. f. Parmi les Alchimistes, c’est l’art de prédire l’avenir par le moyen des observations que l’on fait sur l’air. Chaos, dans le style de Paracelse, signifie l’air. Dict. de James.

CHAOS, On prononce Caos. s. m. Masse informe, grossière ; mélange confus de tous les élémens. Chaos. Les Poëtes ont feint qu’il a servi de matière première à la production du monde, & qu’il subsistoit avant que toutes les choses fussent rangées dans l’ordre où elles sont. Comment la matiere s’est-elle trouvée dans le degré de mouvement nécessaire pour former un monde, plutôt qu’un chaos ? Vall. La terre est sortie d’un chaos noir, ténébreux & indigeste ; & le monde s’est développé de cette masse informe & confuse. S. Evr.

Chaos, dans l’Ecriture, est appelé un espace immense & impénétrable, tel que celui qui est entre le lieu des bienheureux & l’enfer. Luc, XVI, 26. Le Port-Royal a traduit un grand abyme. Le P. Bouhours un gouffre très-vaste. Il y a un gouffre très-vaste entre vous & nous. Le P. Simon l’a suivi. Il y a de plus un grand gouffre entre vous & nous. Les Grecs anciens entendoient l’air par le chaos. Vossius, De Idolol. L. II, c. 25.

Ce mot est purement grec, χάος, qui vient de χαίνω, dehisco.

Le chaos des Poëtes n’est autre chose que l’état où toutes choses étoient dans l’instant de la création, avant que Dieu les eût arrangées dans l’ordre où elles sont. Voyez les notes de Grotius sur son premier livre de la Vérité de la Religion Chrétienne. Hésiode, dans la Théogonie, v. 116 & suiv. & Ovide au commencement de ses Métamorphoses, ont décrit le chaos. Jean André d’Anguillara a traduit la Description d’Ovide en vers italiens. Gasparo Murtola le décrit dans le premier chant de son Poëme della Creatione del Mondo, n. 23 & suiv. De Bartas l’a aussi décrit dans Le premier Jour de la première Semaine, & il commence ainsi :

Ce premier monde étoit une forme sans forme,
Une pile confuse ; un mélange difforme,
D’abymes un abyme, un corps mal compassé,
Un chaos de chaos, un tas mal entassé, &c.

D’Assouci décrit ainsi le chaos en vers burlesques :

Alors il n’était point de monde,
Point de miroir ni de rotonde,