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en parlant des emplois, des charges ou dignités, des affaires. Il disoit que cette dignité étoit trop chargeante pendant les troubles de ce siècle, Flech. Malgré cette autorité, ce mot n’a pas été reçu.

CHARGEMENT. s. m. Terme de Marine & de Commerce. C’est la charge d’un vaisseau : on le dit aussi de toutes les marchandises chargées sur un vaisseau. Navis onus. C’est la même chose que cargaison.

Chargement, signifie aussi l’acte par lequel il paroît qu’un Marchand a chargé telle quantité de marchandises sur un vaisseau. Acad. Fr. Il a produit le chargement & les connoissances de telles marchandises.

Chargement, dans Rabelais, signifie l’action par laquelle on frappe. Et de cettui coup ne sentit que le chargement.

CHARGEOIR. s. m. Terme de Canonier. Instrument avec lequel on charge le canon. Instrumentum quo pulvis sulfuratus & globus tormento induntur. Cet instrument est garni de sa lanterne, de sa lampe, & de deux boîtes pour charger la poudre à canon

☞ C’est aussi dans les Manufactures de salpètre une espèce de selle à trois pies sur laquelle on place la hotte, qu’on appelle bachou, quand il s’agit de la charger.

☞ CHARGER. v. a. Ce mot a toutes les acceptions du mot charge, tant au propre qu’au figuré. C’est en général mettre une charge sur quelque chose. Onerare. On charge un mulet, un cheval, un bateau. Charger un âne de pommes. Onerare pomis costas aselli. Il faut un homme pour charger ces Crocheteurs. Les Chameaux sont dressés à se baisser quand on les charge.

On le dit dans un sens approchant, pour, peser sur. Cette poutre charge trop cette muraille. Gravare. Tout cet attirail chargeroit trop le carosse.

On dit en termes de Marine, charger un vaisseau, pour dire, lui donner sa charge, le remplir d’autant de marchandises qu’il peut en porter ; le charger en grenier, c’est-à-dire, le charger de marchandises sans être embalées ni entonnées. Charger un vaisseau à cueillette, c’est le charger de marchandises reçues de différens particuliers : ce terme est usité en ce sens sur l’Océan ; mais sur la Méditerranée, pour exprimer la même chose, on dit charger au quintal. Charger la pompe d’un vaisseau, c’est y jeter de l’eau par en haut ; charger à la côte, se dit sur mer d’un gros vent qui force un vaisseau à se tenir près de terre, sans pouvoir gagner la pleine mer.

Charger, se dit aussi des alimens qui sont difficiles à digérer. Les écrevisses chargent l’estomac, on a de la peine à les digérer. Vous me chargez trop, en me voulant faire boire des rasades. L’usage de ce mot en ces phrases est fondé sur ce qu’on sent un poids dans l’estomac après avoir beaucoup mangé & beaucoup bu, ou après avoir mangé de certaines choses.

Charger, se dit encore en termes d’Horloger. Charger un balancier, c’est le rendre plus lourd pour retarder la montre ou l’horloge. Tardare Horologium addito ad libramentum pondere. Les balanciers des monnoies sont fort chargés de plomb.

Charger la glace, chez les Miroitiers, c’est mettre le mercure derrière la glace, & mettre des poids sur la surface pour en faire écouler le vif-argent superflu. Diffundere, oblinire mercurio.

Charger, chez les Doreurs, c’est appliquer l’or sur une pièce où il n’y en a point encore, ou en mettre de nouveau dans les endroits ou il n’y en a pas assez.

☞ Dans plusieurs arts & métiers, le mot charger conserve cette signification, ou une à peu près semblable. Voyez Charge.

Charger, se dit aussi chez les Brodeurs, les Ciseleurs, &c. Un habit chargé de broderie, de passemens. Cet écu est chargé de trois fleurs de lis. Em parlant des grandes qualités du Roi.

Déjà pour les chanter tel accorde sa lyre,
Et tel pour en charger le marbre & le porphyre,
D’un ardeur incroyable aiguise son ciseau.

Charger. En termes de Monnoie on dit, charger la coupelle d’affinage ; c’est après que le plomb y a bouilli quelque temps, y jeter les matières, c’est à-dire, l’or ou l’argent qu’on veut affiner. Charger les creusets, charger le creuset de matières ; c’est y jeter les matières, c’est-à-dire, l’or ou l’argent pour les fondre. Charger le fourneau de charbon, c’est y jeter du charbon.

Charger. Les Corroyeurs se servent de ce terme en parlant de divers apprêts qu’ils donnent à leurs cuirs. Ils disent, charger un cuir de bière, le charger d’alun, le charger de couleur ; pour signifier, l’imbiber d’un dose suffisante de toutes ces drogues & ingrédiens.

Charger la chaudière ; c’est y mettre les ingrédiens nécessaires.

Charger le peigne. Terme de Manufacture de lainage. C’est mettre & insérer dans les dents du peigne la quantité convenable.

Charger, est aussi un terme de Vinaigrier, qui signifie, emplir. Implere. Charger les vaisseaux. Pot à charger. Entonnoir à charger.

Charger, est aussi un terme de Fileuse. Il signifie, mettre du chanvre, du lin autour de la quenouille pour filer. Circumdare. Je vais charger ma quenouille. Ma quenouille est bien chargée.

Charger, en termes de Guerre, signifie, attaquer vigoureusement l’ennemi. In aciem hostium irruere. Les ennemis nous chargèrent d’abord en telle occasion ; mais nous les chargeâmes à notre tour. Ils avoient ordre de ne se point découvrir, que l’ennemi ne fût passé, pour le charger en queue. Ablanc.

Charger se dit aussi, pour exprimer l’action de celui qui en frappe un autre. Si vous le mettez en colère, il vous chargera. Charger quelqu’un de coups, le battre excessivement ; le charger d’injures, d’opprobres, Contumeliis proscindere ; c’est l’en accabler.

☞ On dit burlesquement, charger de bois, le dos de quelqu’un fuste dolare lumbos ; lui donner des coups de bâton.

Il pourroit bien, mettant affront dessus affront,
Charger de bois mon dos comme il a fait mon front. Mol.

Charger, se dit aussi des armes à feu. Tormento ou fistulæ ferreæ, sulfuratum pulverem ac globum indere. C’est mettre dans une arme à feu, ou dans une pièce d’artillerie la quantité de poudre suffisante & les balles, le boulet ou autres choses nécessaires pour l’effet qu’on se propose. Un canon se charge avec des boulets, des cartouches, des balles ramées. Les ennemis ont éventé la mine depuis qu’elle a été chargée, ils en ont tiré la poudre. Il a chargé ses pistolets.

Charger, se dit au figuré, de ce qui peut donner lieu à l’exercice des facultés de l’ame. Charger sa mémoire d’une chose, mettre une chose dans sa mémoire, & s’appliquer sérieusement à la retenir. Memorià aliquid custodire. Il ne faut charger sa mémoire que de bonnes choses. Charger sa mémoire de bagatelles.

☞ On dit aussi qu’il ne faut pas trop charger la mémoire des enfans, pour dire, qu’il ne faut pas les obliger à retenir trop de choses.

Charger sa conscience de quelque chose, prendre quelque chose sur sa conscience, s’en rendre responsable devant Dieu.

Charger, signifie aussi, imposer quelque condition onéreuse. Onus imponere. Un héritier est chargé