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une fête mobile, le jour qu’on la devoit célébrer, s’annonçoit tous les ans. Elle se faisoit ordinairement vers le quatrième des Nones de Février, c’est-à-dire le second jour de ce mois. On y farcissoit une truie. Proper. L. IV, El. I. Les Prêtres qui célébroient ces têtes étoient des esclaves & des affranchis. Ils furent institués, dit Macrobe, Saturnal. 1, C. 7. non seulement à l’honneur des Lares, mais aussi de la Manie, leur mère. Tarquin le Superbe les rétablit ; & sur la réponse de l’oracle, qui ordonna que l’on sacrifiât des têtes pour les têtes, c’est-à-dire, pour la santé & la prospérité des gens de chaque famille, on y sacrifioit des enfans. Mais Brutus, après avoir chassé les Rois, ☞ interpréta les paroles de l’oracle, de ordonna qu’au lieu de têtes d’enfans, on immoleroit à ces Dieux des têtes de Pavots. Durant les Compitales, chaque famille mettoit à la porte de la maison la statue de la Déesse Manie. On suspendoit aussi aux portes des maisons des figures de laine qui représentoient des hommes & des femmes, pour prier les Lares & la Manie de se contenter de ces figures, & d’épargner les gens de la maison ; pour les esclaves, au lieu de figures d’hommes, on offroit des balles ou pelotes de laine. Scaliger, Poet. L. I, c. 28. Le Roi Tullius établit que les esclaves qui célébroient les compitales, jouiroient de la liberté pendant tout le temps que dureroit la Fête ; c’étoit en effet un moyen très-propre à procurer l’avantage des familles, que de gagner l’affection des esclaves, en les faisant jouir quelque-temps de la liberté. Auguste ordonna qu’on orneroit de fleurs deux fois l’année, au printemps & en été, les statues des Dieux Lares qui étoient dans les carrefours. Voyez Varron, Festus, Macrobe, Denys d’Halicarnasse, Suétone, Rosinus, le Calendrier Romain, &c. Voyez encore Aulu-Gelle, L. X, c. 24.

COMPITALICE. adj. m. & f. Compitalitius. Qui appartient aux Fêtes compitales. Le jour compitalice, Dies compitalitius, étoit celui auquel on célébroit les Compitales. Les Jeux compitalices, Ludi compitalitii, étoient les jeux qui se faisoient à cette fête.

Ces noms viennent de compitum, comme on l’a dit, ou competum, qui vient de competo, qui signifie concourir ; c’est un endroit où plusieurs rues concourent, aboutissent. Avant la fondation de Rome, ces Compitales se célébroient dans les carrefours des villages car cette fête est plus ancienne que Rome.

COMPLAIGNANT, ANTE adj. terme de Palais. ☞ Celui qui se plaint en Justice du tort qu’on lui a fait ; demandeur & accusateur en matière criminelle. Actor, petitor. Il s’est rendu complaignant. La partie complaignante. Tous les Arrêts, en matière criminelle, portent, entre un tel, demandeur, & complaignant contre tels & tels, défendeurs, accusés.

☞ On dit substantivement le complaignant, la complaignante.

COMPLAINTE. s. f. Plainte & doléance d’une personne qui souffre. Querela, querimonia. Dans les Pastorales il y a d’ordinaire des complaintes de Bergers. On entendit cette triste complainte. Ce mot vieillit. Il est demeuré dans le style des Monitoires. Cor. Je ne le rejeterois point si absolument. On ne le dit guère qu’au pluriel. De grandes complaintes.

Complainte, en termes de Palais, en matière prophane, se dit des actions possessoires, qui appartiennent à un propriétaire pour se maintenir en possession de son héritage d’un droit réel quelconque. Vindiciarum petitio, postulatio. On forme une complainte en cas de saisine & de nouvelleté ; ce qui signifie en vieux langage, en cas de trouble de possession, comme quand un autre usurpe un héritage dont on est en possession depuis un an & jour. Alors on forme une complainte possessoire, & il faut juger la réintégrance avant que de plaider au fond. Ce fut M. Simon de Bucy, Président au Parlement de Paris, qui inventa, & mit en usage la complainte en cas de saisine & de nouvelleté. Il faut intenter la complainte dans l’an de la possession du détenteur. On dit matière de complainte, cas de complainte ; former, intenter, exécuter, prendre complainte. Ramener la complainte sur les lieux, se dit, lorsque le Juge ou un Commissaire se transporte sur un héritage contentieux, & entend les parties.

Pour intenter légitimement une demande en complainte, il faut un trouble, une entreprise, un attentat, de la part de celui contre qui cette demande est dirigée. Aubry, Mém. pour le Chap. de Reims.

Complainte, en matière bénéficiale, se dit d’une action qu’on forme pour être maintenu en un Bénéfice après en avoir seulement pris possession, en vertu des provisions du Collateur. Vindiciarum postulatio in beneficio ecclesiastico. On peut intenter Complainte dans l’an du trouble contre celui qui a un titre coloré. ☞ Comme cette action est une action possessoire, il n’y a que les Juges séculiers qui en puissent connoître ; le possessoire étant une affaire de fait qui regarde la puissance séculière,

☞ Mais la connoissance du pétitoire des bénéfices appartient de droit au Juge d’Eglise, à l’exception des affaires de régale dont le Parlement de Paris connoît au pétitoire, privativement à tous autres Juges.

☞ Celui qui a perdu sa cause au possessoire, ne peut plus se pourvoir au pétitoire par devant le Juge d’Eglise ; parce que les Juges laïques ne jugent pas le possessoire sur le fait de possession seulement, mais par le mérite du fonds & des titres des contendans, dont ils examinent la validité, d’où il s’en suit qu’il seroit inutile de les faite examiner de nouveau par les Juges d’Eglise, avec risque de voir réformer quelquefois par eux les arrêts de la Cour ; ce qui seroit absurde. Ferriere.

☞ Les complaintes pour les bénéfices doivent être poursuivies par devant le Juge Royal, qui ressortit nuement au Parlement ; auquel la connoissance en appartient privativement aux juges inférieurs & des Seigneurs Haut-Justiciers, quand même ils seroient fondateurs, collateurs ou présentateurs des bénéfices.

Les complaintes se jugent le maltin, & ne sont pas des procès de Commissaires. La complainte n’a pas lieu contre le Roi, parce que la complainte est une espèce d’accusation contre celui par lequel nous prétendons avoir été injustement troublés ; & cette accusation ne convient point à un sujet à l’égard de son Roi.

Ces mots viennent du verbe latin plangere, dont on a fait complangere.

COMPLAIRE, v. n. Se rendre agréable à quelqu’un, en déférant à ses volontés & à ses sentimens. Obsequi ; indulgere, morem gerere. Les Courtisans ne tâchent qu’à complaire aux Princes & aux Puissances. On gagne le cœur des personnes les plus difficiles, à force de les flatter, & de leur complaire. Il a fait cela pour vous complaire.

On dit, se complaire ; pour dire, se plaire, se délecter en soi-même, en ses productions, en ses ouvrages, y mettre sa satisfaction, son plaisir. Il se complait en lui-même. Il se complaît en sa personne. Il se complaît dans tous ses ouvrages, dans tout ce qu’il fait,

COMPLAISANCE. s. f. déférence aux sentimens & aux volontés d’autrui. Obsequium, obsequentia. ☞ La complaisance est une condescendance honnête par laquelle nous plions notre volonté, pour la rendre conforme à celle des autres. Elle consiste à ne contrarier le goût de qui que ce soit, dans tout ce qui est indifférent pour les mœurs, à s’y prêter