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même autant qu’on le peut, & à le prévenir lorsqu’on l’a su deviner. Les mœurs.

☞ Il semble que l’esprit doux & l’humeur égale réunis, fassent l’homme complaisant. Il est vrai qu’ils y contribuent ; mais il est vrai aussi que la complaisance ajoûte à la douceur & à l’égalité. A l’esprit doux, à l’humeur égale, joignez l’envie de plaire & de petits soins, vous serez complaisant.

☞ L’homme égal & doux est celui qui, toujours le même, toujours tranquille & sûr, évite toute occasion de me faire de la peine. L’homme complaisant fait quelque chose de plus pour moi. Il est disposé à penser comme je pense, à agir comme j’agis ; il entre dans mes vues & dans mes goûts, & profite de la moindre occasion de me faire plaisir. Mais aussi il faut avouer que la douceur de l’esprit & l’égalité de l’humeur ne sauroient devenir des vertus suspectes ; à quelque usage qu’on les emploie, elles seront toujours des vertus. Il n’en est pas de même de la complaisance, qui n’est vertu que par l’usage qu’on en fait.

☞ Pour faire une définition un peu exacte de cette affection que quelques-uns ont de plaire à tout le monde, il faut dire avec la Bruyère, que c’est une manière de vivre où l’on cherche beaucoup moins ce qui est vertueux & honnête, que ce qui est agréable.

On se flatte les uns & les autres, & le monde ne subsiste que par cette complaisance mutuelle. Flech. Dans le monde, il faut avoir de la complaisance, même pour les sots ; ils sont le plus grand nombre. Les personnes qui hantent la Cour, reconnoissant combien les humeurs contredisantes sont incommodes, prennent une route, qui est de ne contredire rien, & de louer tout indifféremment ; c’est ce qu’on appelle complaisance. Cette humeur qui est plus commode pour la forme, est très-désavantageuse pour le jugement. Port-R. La complaisance qui sacrifie tout aux autres, semble être la destruction de l’amour propre, & n’est bâtie que sur ses ruines. M. Esp. La complaisance qui est une vertu paisible, & très-nécessaire à la société, devient un vice, quand elle n’a point de bornes. M. Scud. La véritable complaisance est celle qui compatit avec liberté, qui cède sans foiblesse, qui loue sans flatterie, & qui, sans affectation & sans bassesse, rend la société agréable, & la vie plus commode & plus divertissante. Id. Rien de plus ennuyeux que la fade complaisance de ces gens qui se récrient sur tour. Bell. La fausse complaisance de nos amis nous endort, & nous jette dans une confiance ridicule. Maleb.

Complaisance se prend aussi quelquefois pour un vain plaisir qu’on prend en soi-même, & qui naît de la plus grande opinion qu’on a de soi. Inanis de se cum sensu voluptatis opinio. Avec quelle complaisance ambitieuse Luther ne se regardoit-il point lui-même, faisant le personnage de Héros sur le théâtre de l’Eglise ! Boss.

Complaisances au pluriel, se prend pour l’effet & les marques de la complaisance. Ses complaisances pour un tel lui coûtent cher. Acad. Fr.

Complaisances, en termes de l’Ecriture ; signifie quelquefois amour, affection. C’est dans ce sens que Dieu dit qu’il a mis toutes ses complaisances en son Fils ; pour dire, que son Fils est l’objet de son amour.

Complaisance, terme de Palais. C’est le payement fait des loyaux aides ☞ par le vassal à son Seigneur, dans les quatre cas marqués ; savoir, au cas de chevalerie du fils aîné, de mariage d’enfans, de voyage d’outre-mer, & de rançon du Seigneur. Voyez Aides, terme de Jurisprudence féodale.

COMPLAISANT, ANTE. adj. Qui tâche de plaire & de se conformer à l’humeur & à la volonté d’autrui. Obsequens, obsequiosus, placendi cupidus. Ce n’est pas être complaisant que de donner aveuglément dans le caprice de tout le monde : c’est être adulateur ou imbécille. Bell. Voyez Complaisance.

Complaisant est aussi s. & dans cette acceptation, on dit qu’un homme est le complaisant d’un autre ; pour dire, qu’il est assidu auprès de lui, & qu’il s’attache à lui plaire dans quelque vue d’intérêt. C’est le complaisant, un des complaisans d’un tel. On dit dans le même sens, qu’une femme est la complaisante d’une autre. Acad. Fr.

Les complaisans semblent vouloir s’oublier eux-mêmes, afin de s’appliquer & de se tourner uniquement à tout ce que veulent les autres. M. Esp. Pour être un complaisant habile & éclairé, il ne faut pas l’être toujours, ni paroître entièrement asservi. M. Esp.

Ces mots viennent du latin complacere, qui signifie la même chose.

COMPLANT. s. m. terme d’Agriculture. Lieu planté d’arbres, de vignes. Locus arboribus, vel vitibus consitus. J’ai fait un complant d’arbres dans ce parc. Il y a deux complans de vignes en ce quartier-là. On le dit aussi de la chose même qui est plantée. Voilà un complant de morillon de Bar sur Aube ; un complant de maronnier d’Inde. Oa le dit particulièrement des vignes.

☞ On a proprement appelé complant, la jouissance que l’on accorde à quelqu’un, à titre d’usufruit, d’un champ, à la charge d’y planter des arbres, & particulièrement des vignes, & à condition de rendre au bailleur par chaque année, une certaine portion des fruits. Donner une terre à complant.

Ce mot vient du latin complantare.

COMPLANTER, v. a. terme d’Agriculture, peu usité. Planter des vignes, des arbres, &c. Complantare.

Complanter, v. n. percevoir le droit de complant. Coutume de Poitou. Il n’est permis d’enlever les fruits sujets à ce droit, qu’après que le Seigneur a complanté.

COMPLANTERIE. s. f. terme de Coutumes. Lieux, terre, district sur lequel le Seigneur perçoit le droit de complant.

☞ COMPLÉMENT. s. m. C’est en général ce qui s’ajoûte à une chose, pour lui donner sa perfection, du mot latin complementum.

Complément, terme de Géométrie. C’est ce qui reste d’un quart de cercle, lequel est de 90 degrés, après qu’on en a retranché un certain arc. Complementum. L’arc, & son complément sont relatifs, & ne se disent que de l’un à l’égard de l’autre. Cet angle, ou cet arc est de 60 degrés, son complément est de 300. Ce mot est de grand usage dans la Trigonométrie.

Complément d’un angle à 180 degrés. C’est aussi l’excès de 180 degrés sur cet angle. Ainsi le complément à 180 degrés d’un angle de 100 degrés, est 80.

Complémens (Les) d’un parallélogramme sont les deux plus petits parallélogrammes que l’on fait en tirant deux lignes droites parallèles à chacun des côtés du grand parallélogramme, & qui se coupent à angle droit dans un point de la diagonale. On démontre en Géométrie que les deux complémens d’un parallélogramme sont égaux entr’eux.

En Astronomie, on appelle complément d’un astre, sa distance jusqu’au zénith, ou l’espace qu’il y a depuis le point où est un astre élevé sur l’horison jusqu’au zénith. La hauteur & le complément d’un astre sont le quart du cercle qu’il y a depuis l’horison jusqu’au zénith.

En termes de Navigation, ☞ on appelle complément de route, le complément de l’angle, que la route ou le rhumb que l’on suit fait avec le méridien du lieu où l’on est, c’est-à-dire la différence de cet angle à 90 degrés.

Complément de courtine, en termes de fortification, est la partie du côté intérieur, qui est composée de la courtine & de la demi-gorge ; c’est-à-dire, c’est