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CON

Damnatio. Il croyoit sa cause bonne, & ne croyoit pas qu’il pût intervenir quelque condamnation contre lui. La confirmation d’une sentence doit emporter condamnation de dépens. On entend aussi par condamnation les choses mêmes auxquelles la partie est condamnée, comme une somme d’argent, les intérêts & frais. Payer le montant des condamnations. Au Palais on dit, passer condamnation, subir condamnation ; pour dire, acquiescer à la demande ou à la sentence de la partie.

☞ Passer condamnation, c’est proprement consentir que la partie adverse obtienne jugement à son avantage : & subir condamnation, c’est acquiescer à un jugement dont on pourroit pourtant appeler.

☞ Au figuré, dans le langage ordinaire, passer condamnation, c’est convenir qu’on a eu tort.

Condamnation le dit aussi en matière spirituelle. Celui qui pèche mortellement, qui communie indignement, attire sa condamnation, il perd la grace de Dieu.

CONDAMNATOIRE. adj. Qui porte condamnation. Damnatorius. Suffrage condamnatoire. Ce mot se trouve dans Pomey. Il n’en vaut pas mieux.

CONDAMNER, v. a. Prononcer un arrêt, une sentence ; donner un jugement contre quelqu’un qui porte quelque peine, perte, ou dommage ; soit à l’égard de son honneur, soit à l’égard de sa vie. Damnare, condemnare. On ne doit condamner personne sans l’entendre. Les Ecclésiastiques ne peuvent condamner personne à mort. Il a été condamné à l’amende, & aux dépens, dommages & intérêts. Condamner par défaut, par contumace.

Faites rougir les Dieux qui vous ont condamnée. Rac.

Condamner se dit aussi pour assujettir quelqu’un à quelque loi, le réduire à la nécessite de faire quelque chose. Nous sommes tous condamnés à mourir.

Jésus-Christ en mourant nous a tous condamnés
A l’imiter dans sa souffrance. L’Abbé Tétu.

Que ferez vous, hélas ! d’un cœur infortuné
Qu’à des pleurs éternels vous avez condamné. Rac.

Condamner, signifie, par extension, blâmer, désapprouver. Vituperare, arguere, reprehendere. Il y a des actions indifférentes qu’on ne peut condamner sans injustice. Les gens de bien sont souvent condamnés par les méchans. Les ignorans condamnent tout ce qu’ils n’entendent point. On est bien aise de trouver que les malheureux sont coupables, afin de les abandonner, & de les condamner avec quelque apparence de justice. Port.-R.

Il faut se regarder soi-même un fort long-temps,
Avant que de songer à condamner les gens. Rac.

Condamner se dit aussi de certaines pensées, & de certaines façons de parler, qu’on ne juge pas dignes d’entrer dans les beaux discours, & dans le beau langage. Damnare, reprehendere, proscribere. On ne se sert guère de la raison, quand on condamne un mot sans lequel on ne sauroit raisonner. Vaug. R. N.

Fuis ce soin trop exact,
Qui pour un mauvais mot condamne une pensée.Vill.

Elle a, d’une insolence à nulle autre pareille,
Après trente leçons, insulté mon oreille,
Par l’impropriété d’un mot sauvage & bas,
Qu’en termes décisifs condamne Vaugelas. Mol.

Condamner soi-même, (Se) se dit de ceux qui parlent contre eux-mêmes, qui se contredisent, qui disent quelque chose qui leur est préjudiciable. En avançant cette proposition, vous vous condamnez vous-même. Tuo te mucrone jugulas.

On dit figurement condamner une porte, une fenêtre ; pour dire, la fermer en sorte qu’on ne la puisse plus ouvrir ; en interdire l’usage. Obserare.

On dit proverbialement & figurement, qu’un homme a été condamné aux dépens, quand il a fait quelqu’entreprise qui ne lui a pas réussi.

Condamner un vaisseau, en termes de Marine, c’est le juger incapable de tenir la mer.

☞ CONDAPOLI. Ville de la presqu’Île de l’Inde, au deçà du Gange, au Royaume de Golconde.

Condamné, ée. part.

CONDAT. Condatum. Voyez Condé, c’est la même chose : & ce nom se donne à plusieurs lieux, pour la même raison que celui de Condé. Condatum s’est dit en françois Condat ou Condé en différentes provinces.

La Congrégation de Condat & de Saint Oyan est appelée autrement la Congrégation de Saint Claude. Voyez Claude. Condat, en latin Condate, est la même chose que ce qui s’est dit ailleurs Condé, & signifient l’un & l’autre confluent, jonction de deux rivières ; & en effet, il n’y a point en France de lieu qui porte l’un & l’autre de ces noms, qui ne soit en un endroit où deux rivières ou deux ruisseaux se joignent. L’Abbaye de S. Claude ou de Condat est au confluent des rivières de Bionne & d’Aliere.

☞ CONDAVERA. Ville d’Asie, dans la presqu’Île de l’Inde, sur la côte de Malabar, au Royaume de Carnate.

CONDÉ. Ce mot, en ancien langage, signifioit confluent, & on a donné ce nom à plusieurs lieux situés en des endroits où deux rivières se joignent. Confluentes, Condatum, Condate. Il y a Condé, ville du Hainault dans les Pays-Bas, au confluent de l’Escaut & de la Haisne. Condé sur le Nereau ou Noireau, Condæum ad Norallum, est une petite ville de Normandie dans le Bessin sur le Nereau, qui mêle ses eaux avec l’Orne. Condé, rivière de France dans le Quercy. Condé, rivière de Canada. Il y a aussi une contrée de la Basse Ethiopie nommée Condé, & le Cap Condé à l’est de l’Île de Cayenne.

Condé est aussi le nom d’une branche de la Maison-Royale de France. Le Chef de cette branche est Louis de Bourbon, Prince de Condé, I du nom, fils de Charles de Bourbon, Duc de Vendôme, & frère puîné d’Antoine de Bourbon, Duc de Vendôme & Roi de Navarre. Condæus. On dit, la Maison de Condé, le Prince de Condé, la branche de Condé, l’Hôtel de Condé. Le Vicaire de J. C. sous une telle caution n’appréhenda rien ; sûr de tout, pourvu que le Prince de Condé fût rendu à l’Eglise ; & persuadé que d’assurer à l’Eglise le Prince de Condé, étoit l’épreuve la plus certaine qu’il pouvoit faire des dispositions du Roi, &c. P. Bourdal. Oraison Funèbre du Prince de Condé. De quelle consolation ceux qui avoient le cœur françois & le cœur chrétien ne furent-ils pas pénétrés, voyant cet enfant, que le seul nom de Condé avoit rendu peu auparavant redoutable au S. Siège, rendre lui-même au S. Siège, dans la personne de son Ministre, le devoir de l’obéissance filiale, & le rendre au nom de la France, dont il étoit l’organe & l’interprète ! Id. Le Prince de Condé valoit seul des armées entières à la France. Id. Oraison Funèbre de Louis de Bourbon, Prince de Condé.

Le grand Condé, c’est ce même Louis de Bourbon, Prince de Condé, II du nom, ce Héros si fameux. Bourbon-Condé se dit de la même branche de la famille Royale de France, qui est Bourbon par sa tige, & Condé par cette branche.

Condé. Ville & principauté qui a donné le nom à la branche de Bourbon Condé.