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CON

soit des yeux du corps, soit des yeux de l’esprit. Contemplation des choses Divines. Contemplation des corps célestes.

☞ Ce mot signifie, particulièrement en philosophie, l’action de fixer un même objet dans son entendement, de l’envisager sous toutes ses faces différentes, pour en acquérir une connoissance exacte.

Contemplation, en termes de Spiritualité & de Théologie mystique, est une vue de Dieu ou des choses divines, simple, libre, pénétrante, certaine, qui procède de l’amour, & qui tend à l’amour. 1o. Cette vue est simple. Dans la contemplation l’on ne raisonne point comme dans la méditation. 2o. Elle est libre, parce que pour la produire, il faut que l’ame soit affranchie même des moindres péchés, des affections déréglées, de l’empressement & des soins inutiles & inquiétans. Sans cela l’entendement est comme un oiseau qui a les piés liés, & qui ne peut voler, si on ne le met en liberté. 3o. Elle est claire & pénétrante ; non pas comme dans l’état de gloire, mais aux prix des connoissances de la foi qui sont toujours obscures. Dans la méditation on ne voit les choses que confusément, comme de loin, & d’une manière plus seche. La contemplation nous les fait voir plus distinctement, & comme de près. Elle nous les fait toucher, sentir, goûter, expérimenter dans l’intérieur. 4o. Elle est certaine, parce que son objet sont les vertus surnaturelles, que la lumière divine lui découvre, & lorsque cette manifestation se fait immédiatement à l’entendement, elle n’est point sujette à l’erreur. Quand elle se fait ou par les sens ou par l’imagination, il s’y peut quelquefois mêler quelque illusion. 5o. Elle procède de l’amour & tend à l’amour. C’est l’emploi de la plus pure & de la plus parfaite charité. L’amour en est le principe, l’exercice en est le terme.

Les Mystiques nomment la contemplation un regard simple & amoureux sur Dieu présent. Fen. La contemplation consiste dans des actes si simples, si directs, si uniformes & si paisibles, qu’ils n’ont rien de marqué par où l’ame puisse les distinguer. L’ame doit être entièrement passive à l’égard de Dieu, en sorte qu’elle soit dans un repos continuel, sans secousse & sans agitation : de-là vient qu’on l’appelle une oraison de silence & de quiétude ; en sorte qu’elle doit être exempte de toute l’activité des ames inquiètes, qui s’agitent pour sentir leur opération. Id. La contemplation la plus sublime doit être subordonnée à la science Théologique, & aux règles de l’Eglise. Boss. La contemplation n’est ni un ravissement, ni un saisissement, ni une suspension extatique de toutes les facultés de l’ame : l’état de contemplation passive n’est qu’une paix & une souplesse infinie, pour se laisser mouvoir aux impressions de la grâce, & pour mieux sentir l’impulsion divine. Fenel. Les Contemplatifs disent que les savans sont moins disposés à la contemplation, que les ignorans, parce qu’ils ont moins de foi & d’humilité. Boss. La contemplation est l’exercice du pur amour. Fenel.

Contemplation, (En) signifie, en termes de contrats & de traités, en considération. Habitâ ratione, propter, ob. Cette donation lui a été faite en contemplation de l’alliance qu’il faisoit avec le donateur. Les deux Rois ont relâché de leurs prétentions en contemplation de la paix. En contemplation de ce mariage, le père a donné, cédé, &c. Je fais cela en contemplation de sa prière. Le Maître.

Contemplation, terme de Médecine, c’est un nom qu’on a donné à la catalepsie, parce que ceux qui en sont attaqués, paroissent immobiles & contemplatifs. Voyez Catalepsie.

CONTEMPLATRICE. Voyez Contemplateur.

CONTEMPLER, v. a. attacher son esprit, ou sa vue, sur quelque objet, pour le considérer avec attention. Contemplari, speculari. Quand on contemple le ciel, ses astres, les merveilles de la nature, on ne sauroit s’empêcher d’admirer la sagesse du Créateur. Contempler les perfections divines. Ce jeune homme à force de contempler cette fille, en est devenu amoureux : il ne se lasse point de la contempler. Le plus grand plaisir d’un homme orgueilleux, c’est de contempler l’idée qu’il se forme de lui-même, & se relever à ses propres yeux. Nicol.

Seigneur, je n’ai jamais contemplé qu’avec crainte
L’auguste Majesté sur votre front empreinte. Rac.

On l’emploie aussi absolument & sans régime, alors il est synonime à méditer. C’est un homme qui passe sa vie à contempler.

Contemplé, ée. part.

Ces mots viennent de templum. On appeloit de ce nom un endroit d’où l’on pouvoit regarder de tous côtés, ou un lieu qu’on pouvoit découvrir de tous côtés. ☞ C’étoit un espace de terre découverte, où les augures contemploient le vol des oiseaux, après l’avoir consacré par certaines paroles. Voyez Varron.

☞ CONTEMPORAIN, AINE. adj. qui est du même temps. Æqualis, ejusdem temporis. Ces deux Auteurs sont contemporains. La Reine Elisabeth & la Reine Marie Stuart étoient contemporaines. Socrate, Platon, Aristophane étoient contemporains.

☞ On appelle auteurs contemporains, ceux qui ont écrit l’histoire du temps où ils vivaient.

☞ On dit substantivement, c’est mon contemporain. On met les anciens bien haut pour faire dépit à ses contemporains.Fonten.

CONTEMPTEUR. s. m. qui méprise. Contemtor. Il ne se dit guère qu’en cette phrase. Les libertins sont contempteurs des loix divines & humaines. La Bruyère lui a donné un usage plus étendu, quand il a dit : Uni de goût & d’intérêt avec les contempteurs d’Homère, il attend paisiblement que les hommes détrompés lui préfèrent les Poëtes modernes. Il a dit aussi contempteur de la vertu. Ainsi il n’a point eu d’égard à la remarque de Vaugelas, qui condamne ce mot comme hors d’usage. Danet & Richelet ne le mettent dans leurs Dictionnaires que pour le condamner aussi ; cependant beaucoup de Prédicateurs emploient ce terme. Le Pere de l’Aubrussel a dit : ces Critiques téméraires contempteurs de la tradition, &c. M. l’Abbé Des Fontaines s’en servoit souvent. Ce mot est usité dans le style soûtenu.

CONTEMPTIBLE. adj. m. & f. vieux mot, qui signifioit vil, méprisable. Contemnendus, spernendus, despiciendus, aspernandus. Vaugelas condamne ce mot qui est aujourd’hui peu usité.

CONTENANCE. s. f. capacité d’un vaisseau, étendue d’une chose. Capacitas. Il faut qu’un muid de vin, mesure de Paris, soit de la contenance de 140 pintes. La contenance de cette terre est de tant d’arpens, de tant de setiers de semence.

Contenance. s. f. manière de se tenir, posture, disposition où l’homme met les membres de son corps. C’est une habitude du corps, relative à certaines circonstances, qui marque qu’on a vraiment les dispositions, soit dans le cœur, soit dans l’esprit, convenables à la position où l’on se trouve. Vultus, totiusque corporis habitus. Les Rois, les Magistrats, ont une contenance grave & sérieuse. Les sots, les gens qui n’ont point vu le monde, ne savent quelle contenance tenir. L’Orateur jeta d’abord les yeux sur son auditoire, pour assûrer sa contenance. S. Evr. Sénèque est un fanfaron qui tremble à la vue de la mort, & qui ramasse toutes ses forces pour assûrer sa contenance. Id. ☞ La contenance est différente suivant la différence des états. La contenance d’un militaire n’est pas celle d’un Magistrat. La contenance n’est nécessaire que dans l’exercice des fonctions de son état, mais on doit toujours avoir du maintien. Le maintien est pour la Société ; la contenance pour la représentation.