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CON

Ordre. Les converses ne furent établies qu’après sa mort. Elles n’étoient pas Religieuses, comme les convers ; mais selon toutes les apparences elles étoient du nombre de celles qui se donnoient en servitude elles & leurs descendans à un Monastère. Celles de Vallombreuse jouissoient de leurs biens leur vie durant, s’il en faut croire Didace Franchi & quelques autres Historiens de cet Ordre. Elles faisoient néanmoins une espèce de profession entre les mains de l’Abbé, & vivoient comme en société sous l’obéissance des Supérieurs de l’Ordre. P. Hél. T. V, c. 28. S. Guillaume, Abbé d’Hirfauge, fut le premier qui établit des convers en Allemagne dans le XIe siècle. Id. c. 52. Les Frères convers Bénédictins de la Congrégation du Mont Canin s’appellent Frères commis. Id. T. VI, c. 29. Un Frère convers ne peut posséder des bénéfices. Une Sœur converse. Administra, adjutrix, conversa Soror.

Ce mot vient du latin conversus. Quelques Auteurs les ont appelés fratres barbati, parce qu’ils laissoient croître leurs barbes, ce qui se pratique dans l’Ordre des Chartreux.

CONVERSABLE. adj. m. & f. commode, agréable dans la conversation ; qui a l’accès, l’entretien doux & facile. Sociabilis, commodus. Il me semble qu’il n’y a plus de personnes conversables dans le monde. Voit. Les Pedans, les gens chagrins & inquiets ne sont guère conversables. Ce mot est hors d’usage.

☞ CONVERSANO, ville du Royaume de Naples, dans la province de Bari, avec un Evêché suffragant de Bari.

☞ CONVERSATION. s. f. discours mutuels entre deux ou plusieurs personnes sur les objets qui se présentent. L’entretien roule sur un objet déterminé, & se dit ordinairement de supérieur à inférieur. Sermonis communicatio, colloquium, conversatio. Voyez Entretien. La conversation est le lien de la société, c’est par elle que s’entretient le commerce de la vie civile, que les esprits se communiquent leurs pensées, & que les cœurs expriment leurs mouvemens. S. Evr. La communication de pensées & de sentimens, qui se fait par le commerce de la conversation, est le plaisir le plus doux de la vie raisonnable. Val. Comme les livres ne parlent pas d’ordinaire comme on parle en conversation, il ne faut pas aussi parler en conversation comme les livres. M. Scud. C’est dans la conversation que naissent d’ordinaire les termes nouveaux : ils y demeurent Jusqu’à ce qu’un long usage leur fasse perdre entièrement le caractère de la nouveauté. Bouh. Il faut user avec beaucoup de réserve, dans la conversation même, des termes qui ne font que de naître ; les mots & les phrases d’une langue étant à peu près comme les fruits, qui ne valent rien ni trop mûrs, ni trop verds. Id. La conversation a du rapport au gouvernement populaire, où chacun a droit de suffrage, & jouit de la liberté. Balz. La conversation toute seule peut donner l’agrément du langage. M. Scud. L’agrément de son esprit le rendoit maître de la conversation dans tous les lieux où il étoit. P. de Cl. L’art de la conversation consiste moins à y montrer de l’esprit, qu’à en faire trouver aux autres. La Bruy. La conversation est un commerce où chacun doit contribuer du sien pour le rendre agréable. Bell. Il y a des malices ingénieuses qui rendent la conversation plus piquante & plus enjouée. S. Evr. Dans la conversation ordinaire, comme il ne faut rien dire avec étude, il ne faut aussi rien dire par hasard. S. Evr. Il faut que la conversation soit un peu flatteuse avec les femmes, & qu’il y ait je ne sai quoi de retenu. Ch. de Mer. L’étude augmente les talens de la nature ; mais c’est la conversation qui les met en œuvre, & qui les polit. S. Evr. ☞ Le ton de la bonne conversation est coulant & naturel, il n’est ni pesant, ni frivole, il est sans pédanterie, gai sans tumulte, poli sans affectation, galant sans fadeur, badin sans équivoque. Ce ne sont ni des dissertations, ni des épigrammes ; on y raisonne sans argumenter ; on y plaisante sans jeux de mots ; on y associe avec art l’esprit & la raison, les maximes & les saillies, l’ingénieuse raillerie & la morale austère. On y parle de tout, pour que chacun ait quelque chose à dire ; on n’approfondit point les questions, de peur d’ennuyer ; on les propose comme en partant, on les traite avec rapidité, la précision mène à l’élégance ; chacun dit son avis, l’appuie en peu de mots, & n’attaque point avec chaleur celui d’autrui ; nul ne défend opiniâtrement le sien ; on dispute pour s’éclairer, on s’arrête avant la dispute, chacun s’instruit, chacun s’amuse, tous s’en vont contens ; & le sage même peut rapporter de ces entretiens des sujets dignes d’être médités en silence. R. Est-ce là votre ton ? Voyez Caquet.

CONVERSE. adj. & s. f. terme de Géométrie. Conversus. Une proposition est appelée converse d’une autre, quand, après avoir tiré une conclusion de quelque chose qu’on a supposé, on vient dans cette autre proposition converse à supposer ce qui avoit été conclu, & à en tirer ce qui avoit été supposé. Par exemple, on démontre en Géométrie que si les côtés d’un triangle sont égaux, les angles opposés à ces côtés sont aussi égaux : la converse de cette proposition est, que si les angles d’un triangle sont égaux, les côtés opposés à ces angles sont égaux.

Converse, terme d’Astrologie, direction converse. Directio conversa. C’est celle qui est opposée à la direction directe, c’est-à-dire, que par la direction directe, le Promoteur est porté au significateur suivant l’ordre des signes, & par la converse il y est porté d’Orient en Occident, & contre l’ordre des signes.

☞ En Logique, on dit qu’une proposition est converse d’une autre, lorsque de l’attribut de la première on fait le sujet de la seconde, & du sujet de la première l’attribut de la seconde. Cette proposition, tout ce qui est matière est impénétrable, est la converse de celle-ci : tout ce qui est impénétrable est matière. Voyez Conversion.

CONVERSEAU. s. m. terme de Charpentier. Les converseaux dans les moulins sont quatre planches d’un pouce & demi d’épaisseur, posées au dessus des archures, deux devant, & deux derrière.

CONVERSER, v. n. discourir mutuellement sur différens objets. Colloqui, sermonem conferre. Les Chartreux ne doivent converser avec personne. Dans l’humeur où je me trouve, je ne dois plus converser avec les personnes vivantes. Voit. Converser avec les gens de lettres.

C’est peu d’être agréable, & charmant dans un livre ;
Il faut encore savoir & converser & vivre. Boil.

Converser se dit figurément, en parlant de la lecture, de la contemplation. Les gens d’étude conversent avec leurs livres, avec les Savans de l’antiquité, avec les morts. Versari cum libris. Les contemplatifs conversent avec leurs pensées, avec Dieu, avec les Anges. Secum, cum Deo, cum Angelis versari.

CONVERSIBLE. Voyez Convertible, qui est plus usité.

☞ CONVERSION. s. m. Ce mot désigne en général l’idée d’un changement ; mais il a différentes acceptions suivant l’emploi qu’on en fait au propre ou au figuré.

☞ Ce mot est quelquefois synonime à transmutation. Conversio, mutatio. Les Payens ont cru les conversions, les métamorphoses d’hommes en arbres, en fontaines, en pierres, en oiseaux, &c.