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Page:Dictionnaire de Trévoux, 1771, II.djvu/919

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COR

dit bander le cordeau ; tracer le long du cordeau. Cette allée, ce bâtiment, sont tirés au cordeau. Tirer une planche au cordeau, une allée, une rue tirée au cordeau. Des alignemens tirés au cordeau.

Cordeau signifie encore la petite corde avec laquelle on étrangle ceux qui sont condamnés à la potence. Restis, resticula laqueus.

CORDEAUX. s. m. pl. en termes de pêche. Ce sont plusieurs morceaux de lignette, ou médiocre ficelle, qui sont attachés de distance en distance à la corde de la ligne de fond.

Cordeaux, terme de manufacture. Ce sont aussi des espèces de lisières, que l’on fait à certaines étoffes.

CORDÉE. s. f. ficelles de six ou sept brasses ou plus, à laquelle on attache, d’espace en espace, plusieurs petits hameçons avec quelque appât pour prendre des anguilles, &c.

CORDELAT. s. m. étoffe de laine, qui se fabrique à Albi, & aux environs de cette ville de Languedoc.

CORDELE. Voyez Cordelle.

CORDELER, v. a. tortiller quelque chose en forme de corde. Cordeler les cheveux ou autres matières déliées. Torquere.

Cordelé, ér. part. pass. & adj.

Leur longue chevelure en natte cordelée,
Et de tresses d’argent & d’incarnat mêlée,
Leur flottoit sur l’épaule. P. Le Moine.

CORDELETTE. s. f. diminutif de corde. Funiculus. Corde menue.

Cordelette, terme de Conchyliologie. C’est une élévation ronde & étroite, qui règne le long d’une coquille entre les stiles & les cannelures.

CORDELI. adj. terme de verrerie. Epithète que l’on donne au verre, lorsque le four étant un peu froid, il y aura dans le pot une partie du verre qui deviendra plus dure que l’autre, & qu’ayant pris avec la canne, de l’une & de l’autre, on en aura souflé une pièce dans laquelle on appercevra comme de la ficelle, tantôt grosse, tantôt menue. Comme ces traces sont d’une qualité différente du reste de l’ouvrage, elles le feront casser. Encyc.

CORDELIER, s. m. Religieux de l’ordre de S. François, qui est habillé de gros drap gris, avec un petit capuce, une mozette ou chaperon, & un manteau de même étoffe ; qui porte le soc ou sandale, & qui a une ceinture de corde où il y a trois nœuds. Franciscanus cui apud gallos nomen est à fune quo cinctus est. On l’appelle autrement frere mineur. Les Cordeliers sont ainsi appelés à cause de la corde dont ils sont liés : & ce nom leur fut donné à la guerre de S. Louis contre les infidèles, à laquelle les frères mineurs ayant repoussé les barbares, quand le Roi demanda leur nom, on lui répondit que c’étoit des gens de corde liés. Les Cordeliers sont agrégés dans l’université, & reçus docteurs. Ils suivent les sentimens de Scot qui fut parmi eux un grand homme & un subtil docteur.

On dit d’un homme peu scrupuleux, qu’il a la conscience large comme la manche d’un cordelier.

On appelle aussi la haquenée ou la jument des Cordeliers, un bâton sur lequel s’appuient ceux qui voyagent à pié. On dit aussi parler latin devant les Cordeliers ; pour dire, vouloir faire parade de sa science devant ceux qui en sçavent davantage : ce qui repond au proverbe latin. Sus docet minervam. Voyez origine du proverbe françois dans les Heures perdues du Chevalier de Rior, p. 22.

CORDELIÈRE. s. f. Religieuse du même ordre que les Cordeliers, & qui porte une semblable ceinture. Monialis franciscana.

Cordelière, en terme d’Architecture, est un petit ornement taillé en forme de cordes sur les baguettes, ou un petit liteau qui se met sous les patenôtres, Funiculi variis nodis impliciti.

On appelle aussi cordelière, une petite tresse de soie noire avec plusieurs nœuds à la distance d’un pouce, que les femmes portent quelquefois au cou, en place de coller. Funiculi, bombycini.

CORDELIERE, espèce de serge rase qui se fabrique dans quelques endroits de Champagne, particulièrement à Reims ; elles sont en partie laines d’Espagne, & en partie laines françoises.

On appelle aussi Cordelières, en termes de blason, le filet plein de nœuds que les veuves ou les filles mettent en guise de cordon, pour entourer l’écu de leurs armes. Funiculi variis nodis impliciti. La plûpart tiennent que l’origine en vient d’Anne de Bretagne. Cette Reine de France, épouse de Charles VIII, qui commença à régner en 1483, puis de Louis XII, qui lui succéda en 1498, institua une espèce d’ordre en l’honneur des cordes dont notre Seigneur fut lié en sa passion, & pour la dévotion qu’elle avoit à S. François d’Assise, dont elle portoit le cordon. Elle donna à cette ordre le nom de la cordelière, & pour marque un collier fait d’une corde à plusieurs nœuds entrelacés de lacs d’amour dont elle honora les principales dames de sa cour, pour le mettre autour de leurs armes. M. Herman, dans son Histoire des ordres militaires, dit que cette Princesse institua cet ordre après la mort de Charles VIII, & qu’elle prit pour devise : j’ai le corps delié, faisant allusion au mot Cordelier, parce que la mort de son mari l’avoir affranchie du joug du manage ; mais cette cordelière signifioit plutôt un engagement qu’un affranchissement de loix, & Herman a confondu apparemment cette Reine avec Louise de la Tour d’Auvergne, qui, après la mort de Claude de Montaigu son mari, prit pour devise, j’ai le corps delié, P. Hél. T. VIII, c. 68. Anne de Bretagne institua cet ordre à l’imitation de son père François, Duc de Bretagne, qui en mit un pareil alentour de l’écu de ses armes, à cause de la dévotion qu’il avoit à S. François d’Assise. Claude Faucher, dans ses Origines des armes, dit que la cordelière jadis fut comme la marque d’honneur que la Reine Anne de Bretagne donnait à celles qu’elle choisissoit, ainsi que le collier à coquilles jadis donné par le Roi aux Chevaliers de l’ordre de S. Michel. Voyez sur cet ordre vrai ou prétendu, l’Abbé Justin, T. II, C. 89, p. 845, & Favyn, Hist. de Nav. L. X, p. 524. & L. XVIII, p. 1270. Mais Matthieu Compain, Jésuite, dit qu’on en a vu de plus anciennes à Châlons sur des ornemens. Avant les Cordelières, les armoiriers des hommes & des femmes s’entouroient de guirlandes, de feuilles ou de fleurs, comme les images que les grecs & les romains nommoient stemmata. Les religieux les ont entourées de couronnes d’épines, ou de chapelets & de patenôtres ; ce qu’a retenu encore l’ordre de Malte.

Cordelière, (La) nom d’un vaisseau de Louis XII, l’Amiral de sa flotte. Ce vaisseau avoit été bâti par les soins la Reine, qui en avoit fait la dépense. C’étoit un des plus beaux navires qu’on ait jamais vu. En 1252, dans un combat naval contre les Anglois, la Cordelière accrocha le Régent, le plus grand de la flotte angloise, & ils furent tous deux brûlés sans qu’on ait su par où le feu s’y étoit mis.

☞ CORDELLE, CORDEAU, petite corde. Ce mot n’est point d’usage au propre. On dit quelquefois dans un sens figuré, attirer quelqu’un dans la cordelle ; pour dire, dans son parti, dans sa faction. In societatem, in partes suas trahere. Il se dit ordinairement en mauvaise part. Les Ligueurs répandirent un certain nombre de Bourgeois des plus habiles d’entr’eux dans les provinces & les villes principales du Royaume, pour attirer à leur cordelle les Catholiques les plus zélés, & fortifier le parti. Vign. Marv.

Dans nos vieux Poètes cordelle se prend pour toutes sortes de liaisons, & ne signifie pas tou-