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CRE

dibilité. Jesus-Christ dit lui-même qu’il est Dieu, & il le prouve en faisant des miracles : cela n’ajoute-t-il pas un degré de crédibilité qui nous ôte toute la liberté d’en douter.

☞ CRÉDIT. s. m. Signifie en général la faculté de faire usage de la puissance d’autrui.

Dans le commerce c’est un prêt mutuel qui se fait d’argent & de marchandises sur la réputation de la probité & de la solvabilité d’un négociant, ou faculté d’emprunter sur la réputation qu’on a d’être solvable. Fides. Il a bon crédit chez les Marchands, sur la place. Conserver, perdre son crédit. Faire crédit, vendre à crédit, achetter à crédit, emere, vendere sine præsente pecuniâ, sed acceptâ tantum emptoris fide. Ne pas payer comptant ce qu’on achette.

A crédit, signifie quelquefois envain, sans profit. Personne ne vous sait gré de ce que vous faites, vous travaillez à crédit. Quelquefois il signifie, sans preuve, sans fondement. Tout ce que cet Avocat allègue est à crédit, sans preuve.

On dit proverbialement que crédit est mort, ou qu’on fait crédit depuis la main jusqu’à la bourse, pour dire qu’on veut être payé comptant, & d’une fille qui est grosse avant le mariage, qu’elle a pris à crédit un pain sur la fournée. Les lettres de crédit sont différentes des lettres de change, & cependant s’exigent par les mêmes voies. Ce sont des lettres missives qu’on donne à des gens de confiance pour prendre de l’argent sur des correspondans en des lieux éloignés, en cas qu’ils en aient besoin. Voyez Créance, lettre de créance.

Crédit, se dit aussi du cours que les papiers ou effets de commerce ont dans le public & parmi les Négocians. On dit que les billets d’une compagnie ont pris crédit, lorsque les Marchands ne font aucune difficulté de les recevoir. Prendre crédit signifie pareillement dans le négoce des actions de compagnie, lors qu’elles sont achetées à plus haut prix qu’elles n’ont été créées.

Dans un sens métaphorique, ce mot est employé comme synonyme de considération, de pouvoir : Auctoritas, gratia. C’est une relation personnelle fondée sur la connoissance du mérite ou sur l’inclination, dont l’effet est de pouvoir faire usage de la puissance d’un autre qui a quelque supériorité sur nous. Car il faut remarquer que le mot de crédit emporte nécessairement l’idée d’infériorité & de dépendance. On ne dit point d’un Souverain qu’il a du crédit sur l’esprit de son Ministre : mais on le dit du Ministre à l’égard du Souverain.

On dit, à la vérité, qu’un Souverain a du crédit parmi les autres Princes les alliés puais alors, étant pris solitairement, il est regardé comme inférieur aux autres Princes, considerés comme formant ensemble un même tout. Ce Ministre a acquis un grand crédit sur l’esprit de ce Prince. Ce Président s’est mis en crédit dans sa compagnie. Perdre son crédit. Employer son crédit. User de tout son crédit. Abuser de son crédit.

Quand sur un jeune cœur un Amant qu’on estime
A pris quelque crédit,
On commence à douter si l’amour est un crime
Aussi grand qu’on le dit. B. Rab.

On le dit de même du pouvoir que l’on a sur soi-même, sur son propre esprit.

Quoi ! l’homme sur soi-même a si peu de crédit
Qu’il devient scélérat quand Delphes l’a prédit ? Corn.

On le dit dans un sens plus étendu de la considération, de la réputation & de l’autorité qu’on acquiert dans le public par la vertu, la probité, la bonne foi, le mérite. Existimatio. Les Grecs se sont mis en crédit par les sciences qu’ils cultivoient ; les Romains par leur valeur ; les Chrétiens par la sainteté de leur doctrine & la pureté de leurs mœurs. L’éloquence croit nécessaire à Rome pour se donner du crédit. S. Evr. Cet habile hypocrite jouit de tout le crédit que donne la vertu, id.

Crédit, terme de coutumes. C’étoit autrefois un droit que les Seigneurs avoient sur leurs sujets, & qui consistoit en ce que pendant un certain tems ils pouvoient les contraindre à leur prêter de l’argent. Il s’appeloit aussi droit d’emprunt. L’Evêque de Nantes avoit crédit pendant 15 jours sur ses sujets & sur ceux du Prince, c’est-à-dire, qu’il pouvoit pendant ce temps-là les contraindre à lui prêter de l’argent, & le Duc de Bretagne avoit aussi le même crédit, ou droit d’emprunt, pendant 15 jours, sur ses hommes & ceux de l’Evêque. Lobineau, T. I. p. 204.

CREDITER, v. a. Coucher par écrit sur le Mémorial, sur le Journal, ou sur le Grand-Livre, la somme que l’on doit à quelqu’un, ou une somme que quelqu’un a payée.

CREDITEUR. s. m. Terme dont les Négocians se servent assez souvent, pour signifier un créancier, ou, comme ils disent, celui qui doit avoir.

CREDO. s. m. Le Symbole des Apôtres qui contient les articles principaux de notre Foi. Apostolorum symbolum præcipua fidei capita complectens. Il se met entre les oraisons du Bréviaire & des Heures. L’Office commence par un Pater, un Ave, & un Credo. Les Curés sont tenus de faire apprendre à tous leur Paroissiens leur Credo. La Messe en est au Credo, qui est un autre Symbole dressé au Concile de Nicée, qu’on chante au milieu de la Messe.

Credo, (le mont) montagne de France, dans le Bugey. C’est une partie du mont Jura qui est aussi nommé le grand Credo, & qui s’étend entre la Franche-Comté & le Rhône.

CRÉDULE. adj. m. & f. Qui croit trop facilement & légèrement. Credulus. Les enfans, les femmes, les peuples sont crédules, ont l’esprit crédule. Qu’un Amant est crédule & qu’il se laisse aisément persuader ce qui lui paroît agréable. Il se perdit par la crédule & superstitieuse opinion qu’il eut du courroux des Dieux. S. Evr. Nous ne sommes pas si simples, ni si crédules, dans les choses temporelles, que quand il s’agit de conscience & de foi. Port-R.

CRÉDULITÉ. s. f. Disposition, ou plutôt foiblesse d’esprit qui le porte à croire légèrement & sans examen tout ce qu’on nous propose. Credulitas. L’incrédulité qui rejette tout, n’est pas plus dangereuse que la crédulité qui admet tout indistinctement. Les Charlatans abusent de la crédulité des peuples.

Je me plais dans l’erreur ; laissez-moi ce que j’aime,
Et jouir des douceurs de ma crédulité. Corn.

Du Cange dit qu’on a appelé autrefois Crédulité, la profession de la Foi Chrétienne, qu’on a depuis appelée Croyance.

CRÉER, v. a. Tirer du néant, faire quelque être de rien, & sans matière préexistante. Aliquid è nihilo creare, procreare, efficere ; conficere. C’est Dieu seul qui a créé toutes choses. Dieu a créé les âmes des hommes après leur conception, selon l’opinion de S. Augustin.

Créer. Réproduire l’humanité de Jesus-Christ dans l’Eucharistie par la consécration. Voyez Création.

Créer, se dit par extension des hommes à l’égard des choses dont ils sont les inventeurs. Invenire, excogitare, fingere. Boileau semble créer les pensées d’autrui par le tour qu’il y donne. La Bruy. Si la Nature n’a pas formé les Sirènes, ou les Néréides, on ne peut pas du moins en contester l’existence aux Poëtes qui les ont créées, & qui leur ont donné l’être. Ab. Nicaise.

Créer, se dit figurément & abusivement des nouveaux établissemens d’Officiers que font les Rois & les Princes souverains dans leurs Etats. Creare. On a créé bien des Offices pour faire des levées de deniers extraordinaires. Créer des Charges, des Offices, c’est établir des Charges nouvelles, des Offices nouveaux.

☞ On dit aussi créer des rentes, créer une pension, constituer sur soi-même une rente, une pension. Il a créé, constitué des rentes sur lui, sur tout son bien. Créer une pension sur un bénéfice, se dit du Pape qui octroie l’établissement d’une pension sur un bénéfice.