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que les débiteurs obtiennent contre tous leurs créanciers pendant un temps, pour faire homologuer un contrat, ou pour l’entérinement du répit qu’ils demandent.

Les Mâcons & les Couvreurs appellent aussi défense, le signe fait en forme de croix, qu’ils attachent au bout d’une corde, qu’ils laissent pendre de dessus le toit pour avertir les passans qu’ils travaillent sur la maison. Signum pensile. La défense n’est quelquefois qu’une latte attachée à une corde qui la tient suspendue. Mettre la défense, retirer la défense.

Défenses, en termes de Marine, sont de grosses pièces de bois longues de 15. à 20. pieds, qui sont amarrées à l’avant & à l’arrière du vaisseau pendant le combat, pour empêcher l’abordage des ennemis & des brûlots. Elles servent aussi dans un mouillage pour empêcher que les vaisseaux ne s’endommagent en se choquant les uns les autres. Ces pièces de bois s’appellent aussi des boute-hors.

On appelle aussi défenses, des bouts de mâts, des bouts de câble, ou de grosses cordes tressées qu’on laisse pendre le long des flancs du vaisseau, quand il est à l’ancre auprès de plusieurs bâtimens, pour rompre leur choc quand ils viennent à se heurter, & pour empêcher qu’ils ne s’endommagent. On se sert aussi pour la même précaution de fagots, ou autres choses semblables.

Défenses, se dit aussi de certaines pièces de bois endentées deux à deux, ou trois à trois, qui sont sur les préceintes du vaisseau, & servent à conserver les chaloupes contre les préceintes & les têtes des chevilles de fer, quand on les embarque, & quand il les faut remettre à la mer.

Défenses, en termes de Chasse, se dit de deux grandes dents d’en bas qui servent au sanglier pour se défendre. Apri dentes falcarii. Quelques-uns le disent aussi des dents de l’éléphant qui sont disposées de la même manière, & de celles du cheval marin. L’ivoire se fait des os & des défenses de l’éléphant. Ab. Les dents & les défenses du cheval marin sont fort grandes, & guérissent les hémorroïdes. Id.

En termes de Librairie ou de Relieurs, on appelle défenses, de petits feuillets qu’on met au commencement & à la fin des livres, & que l’on colle contre la couverture. Ordinairement ces feuillets ont toute la longueur du livre, mais ils n’ont que le tiers ou le quart de la largeur. On met quelquefois ces défenses de parchemin, & quelquefois on n’en met que vis-à-vis des nerfs. On les appelle défenses, parce qu’elles défendent le livre, & l’empêchent d’être endommagé par la carne du carton & par les nerfs, le repli de cuir de la couverture, & autres coutures. Les défenses sont encore recouvertes d’un feuillet entier du livre que l’on colle par-dessus contre la couverture.

Défenses, en termes de manège, se dit d’un cheval qui, en sautant ou en reculant, résiste à ce qu’on veut qu’il fasse.

DÉFENSEUR. s. m. Celui qui défend. Voyez Défendre. Defensor, propugnator. Charlemagne, Saint Louis, ont été les défenseurs & les protecteurs de l’Eglise. Heureux celui qui a le Dieu de Jacob pour son défenseur. Port. R. L’Eglise n’a jamais manqué & ne manquera jamais de défenseurs.

Défenseur, terme d’Histoire Ecclésiastique. C’étoit anciennement une dignité dans l’Etat & dans l’Eglise. Les Défenseurs avoient soin de conserver le bien public, & de protéger les misérables. Chaque Eglise Patriarchale avoit son Défenseur, & cet usage commença vers l’an 423. Il s’est conservé sous d’autres noms. C’est la même chose que les Avocats, ou Avoués qui défendoient autrefois les intérêts des Eglises. Voyez le mot Avoué. L’Empereur se qualifie encore Avocat de l’Eglise. Les Rois d’Angleterre ont conservé le titre de Défenseur de la Foi, qui fut accordé à Henri VIII. par Léon X. & qui lui fut confirmé par Clément VII. Le Concile de Chalcédoine, Can. 2. appelle le Défenseur d’une Eglise Ἔκδικος. Le Pape Urbain, Cap. Salvator, de Simonia, dit que ce Concile entend par-là des Avoués, des Châtelains, des Juges. Codin, de Officiis aulæ. Const. parle aussi de Défenseurs du Palais ; & Bollandus, Act. Sanct. Janu. T. I. p. 501. En 407. un Concile de Carthage, c. 97. demande à l’Empereur des Défenseurs du nombre des Scholastiques, c’est-à-dire, des Avocats qui étoient en exercice ; & qu’il leur fût permis d’entrer dans les cabinets des Juges toutes les fois qu’il seroit nécessaire pour les affaires de l’Eglise. Ces Défenseurs sont à peu près ce que furent dans la suite les Avoués, & c’est là une espèce de commencement de l’Avouerie. Dans l’Ordo Romanus, quand le Pape va à l’Eglise de la Station dire la Messe, il est à cheval avec ses principaux Officiers, & les Acolytes avec les Défenseurs l’accompagnent à pied. Les Ecclésiastiques obtinrent des Empereurs d’avoir leurs Défenseurs, qui étoient des laïques chargés de maintenir les intérêts de l’Eglise dans les Tribunaux des Magistrats. Dès l’an 368. Valentinien parle d’un Défenseur de l’Eglise Romaine. Tillem. Il n’est donc pas vrai que le Concile d’Afrique tenu en 423. soit le premier qui parle des Défenseurs dans son Canon 42. Il y avoit des Défenseurs de l’Eglise, des Défenseurs du patrimoine de Saint Pierre, qui alloient dans les Provinces pour avoir soin des biens de l’Eglise Romaine, & qu’on appelle encore dans l’Ordre Romain Défenseurs Régionaires, Defensores Regionarii. Il y avoit aussi des Défenseurs des Monastères, des Défenseurs des Eglises Paroissiales. S. Grégoire parle souvent de ces Officiers ; & c’est dans ses Lettres & dans celles du Pape Pelage qu’il tant chercher tous les devoirs des Défenseurs.

Les Défenseurs des Eglises, ou Avoués, étoient de deux sortes. Les uns étoient Défenseurs des causes, ou des procès de l’Eglise ; & les autres, Défenseurs de ses terres. Le Prince donnoit les premiers ; les seconds étoient héréditaires, & c’étoient les fondateurs ou patrons des Eglises. Les premiers furent appelés dans la suite Œconomes & Vidames ; & ils prirent soin non-seulement des procès, mais encore de tout ce qui regardoit les provisions & le revenu des Eglises. Le premier ou le Chef des Défenseurs de l’Eglise, s’appeloit Primus Defensor, ou Primicerius Defensor ; en Grec Πρωτέκδικος. Gretser, Meursius, & le P. Goar, ont parlé fort au long de cet Office. Voy. aussi Macri, Du Cange, Spelman & Hofman, dans leurs Dictionnaires ; & ci-dessus au mot Avoué.

Nous n’avons point de charge qui réponde à celles des Défenseurs : on peut cependant, soit pour la nature & la qualité de leurs charges, soit pour la manière dont ils faisoient les affaires, soit pour leurs fonctions, les comparer aux Procureurs Généraux & à leurs Substituts, ou aux Lieutenans Généraux de Police & aux Commissaires. Il y avoit un Défenseur de l’Empire, ou du Royaume, Defensor Regni. Il étoit chargé de soutenir les droits de l’Empire, l’autorité du Prince, la rigueur des loix. Le Défenseur de la ville, Defensor civitatis, Defensor plebis, maintenoit les droits, les usages, les coutumes de chaque ville : on pourroit peut-être le comparer au Conseiller-Pensionnaire de chaque ville de Hollande. Cet Officier connoissoit toutes les causes pécuniaires au-dessous de 500 pistoles, & des crimes légers. Ont faisoit par-devant lui les insinuations des testamens & des donations, & les dépositions de témoins. C’est pour cela qu’il avoit son Archive ou son greffe. Voyez la Novelle 15. & Senator Cassiod. L. VII. Epist. 11. Ces Défenseurs des Villes, ou Cités, qui étoient chargés des premiers soins de la Police dans les principales villes chez les Romains, ne pouvoient sortir de ces villes, non plus que les Présidens des Provinces, de la Province qui leur étoit confiée, si ce n’étoit pour accomplir un vœu, & à condition d’y revenir coucher le même jour. De la Mare, Tr. de la Pol. Tom. 1. p. 206. Il y avoit aussi dans les Gaules des Défenseurs des villes. L’élection de ces Magistrats dépendoit du Président de la Province. La loi portoit qu’il les choisiroit entre les plus