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nobles, les plus riches & les plus estimés des citoyens. Les Magistrats Romains, jaloux de l’autorité de ces Officiers, firent tout leur possible pour les détruire ; de sorte que l’on ne prit plus pour ces places importantes que des gens inconnus, sans nom, sans réputation, obscurs, comme porte la Novelle 15. de Justinien. De Defens. Civit. Cela parut d’une trop dangereuse conséquence au service du Prince & au bien public. On les rétablit. Voyez la Novelle citée, Godefroy sur cette Novelle & de la Mare, Tr. de la Pol. T. I. p. 25. Le Défenseur des pauvres, des pupilles & des veuves, prenoit soin des affaires de ces sortes de personnes, qui seroient souvent indéfendues, si personne n’étoit chargé de leurs affaires. Les Diacres au commencement de l’Eglise étoient les Défenseurs des pauvres, des pupilles & des veuves ; mais dans la suite cet emploi devint une charge, qui fut exercée par des laïques. Justinien en parle dans sa 15e. Novelle. Les Défenseurs de l’Eglise étoient comme les Commissaires & les Subdélégués du Patriarche. Le premier, ou le Chef de ces Défenseurs, jugeoit avec d’autres Défenseurs, qui étoient les assesseurs, les affaires de moindre conséquence qui étoient du ressort du Patriarchat, & il en rendoit compte ensuite au Patriarche.

Il est parlé dans le Droit Romain des Défenseurs : c’étoit dans les villes qui n’étoient ni libres, ni privilégiées des Officiers préposés pour la répartition des impôts, ou tributs : ils régloient ce que chacun des habitans devoit payer. La fonction des Défenseurs étoit semblable à celle des Censeurs de Rome & à celle de nos Elus : on ajouta dans la suite à leur pouvoir celui de juger les causes sommaires. Voy. la 15e. Novelle de l’Empereur Justinien, & liv. 4. de Defens. Civit.

Défenseur en Mythologie. Surnom d’Hercule, qui avoit à Rome un Temple sous ce titre. Defensor. C’étoit-là où les Soldats & les Gladiateurs, à qui son donnoit un congé honorable, venoient suspendre leurs armes.

DÉFENSIBLE. adj. m. & f. Vieux mot. Qui se peut défendre, qui est de défense, qui est à l’abri, à couvert. Munitus, defensioni opportunus, a, um. Une place défensible.

DÉFENSIF, ive. adj. Il n’est guère en usage qu’au féminin, & signifie qui est fait pour la défense. Les armes défensives sont les casques & les cuirasses, & autrefois le bouclier. Voyez au mot Arme. Arma ad legendum, ad defendendum. Les Princes les plus foibles font entr’eux des ligues offensives & défensives, pour se précautionner contre l’attaque des plus puissans. Voy. Ligue. Il s’emploie aussi substantivement, mais seulement au féminin. Etre sur la défensive, ne faire simplement que se défendre. Paratum esse ad resistendum, resistere oppugnantibus. Ils se tiennent le plus qu’ils peuvent sur la défensive.

DÉFENSIF. s. m. Terme de Médecine & de Chirurgie. C’est ce qui sert dans la cure d’une plaie pour empêcher la violence de la douleur, l’hémorrhagie, l’impression de l’air extérieur, &c. On dit un défensif, comme on dit un astringent. La cautérisation étant faite, on couvre la plaie avec de petits bourdonnets de charpie… & l’œil d’un défensif & d’une compresse triangulaire. Dionis. Pour le premier appareil de l’entorse M. Dionis se servoit d’un petit défensif fait avec le blanc-d’œuf, l’huile rosat & la poudre d’alun.

Défensif. Terme d’Oculiste. Bandage que l’on met sur les yeux d’un malade après quelque opération, comme celle de la cataracte. Defensivum. Je mis un défensif sur ses deux yeux, ce que je continuai jusqu’au neuvième jour, auquel temps je fus obligé de lui ôter le bandage, à cause d’une légère fluxion qui lui survint aux deux yeux. Geisler. Journ. des Sc. 1720. p. 445.

DÉFÉQUER, v. a. Terme de Chimie. Oter les fèces ou impuretés d’une liqueur. Defecare, purgare, expurgare. On fait des distillations & autres opérations en Chimie pour en séparer le plus pur & le plus subtil d’avec les fèces, le marc ou la lie.

Déféqué, ée. part. Defecatus, purgatus, expurgatus. L’esprit de vin bien déféqué s’évapore facilement.

DÉFÉRANT, ante. adj. Qui a de la déférence. Facilis, commodus. Un homme civil & déférant est bien venu par-tout. Il n’est pas en usage.

DÉFÉRENCE, s. f. Condescendance honnête, qui fait qu’on se conforme aux sentimens & aux volontés de ceux pour qui l’on doit avoir des égards. Reverentia, obsequium. Quoique la déférence soit une suite de la considération ou du devoir, il y a cependant un terme au-delà duquel elle cesse d’être ce qu’elle étoit. Sacrifier indistinctement sa volonté à celle des autres, c’est bassesse, ou bêtise. On a de la déférence pour l’âge, pour le mérite, pour la dignité de quelqu’un. Avoir de la déférence pour les personnes de mérite & de qualité. Ablanc. Prévenez-vous les uns & les autres par des témoignages d’honneur & de déférence. Port-R. Le respect & la déférence naissent de l’estime mutuelle que doivent avoir deux amis. S. Evr.

DÉFÉRENT. adj. quelquefois employé substantivement. Terme d’Astronomie dans le système de Ptolomée. Cercle déférent, qui porte la planète avec son épicycle. C’est un cercle qu’on a supposé pour expliquer l’excentricité, le périgée & l’apogée des astres, sur lequel on a dit que la planète se mouvoit ; & il est placé dans l’épaisseur de chaque sphère. Circulas deferens. Comme une planète n’est pas toujours également éloignée de la terre, l’on a compris que son mouvement propre se fait dans un cercle, ou ellipse, qui n’est pas concentrique à la terre. C’est ce cercle ou ellipse excentrique qu’on appelle déférent, parce que passant par le centre de la planète, il semble la supporter & la soutenir dans son orbite. On supposoit ces déférens différemment inclinés à l’Ecliptique, mais jamais de plus de huit degrés, excepté celui du soleil, qui est dans le plan de l’Ecliptique même, qui se trouve coupé différemment par le déférent de chaque planète en deux points qu’on appelle nœuds. Dans le systême de Ptolomée ce même déférent est aussi appelé le déférent de l’Epicycle, parce qu’il traverse l’Epicycle par son centre, & qu’il semble le soutenir.

☞ Comme on n’avoit imaginé les cercles excentriques, que pour expliquer les points de l’apogée & du périgée ; aujourd’hui qu’il est démontré que les planètes décrivent des ellipses autour du soleil, on a banni ces cercles déférens, comme l’on avoit banni les Epicycles de Ptolomée.

Déférent. Terme d’Anatomie. Ce mot se dit des vaisseaux du corps humain. Des vaisseaux déférens, des vaisseaux préparans. On appelle vaisseaux déférens, des vaisseaux qui conduisent la semence goute à goute dans les vésicules séminaires. Quelques-uns appellent ces vaisseaux éjaculatoires. Ils sont blancs, nerveux, ronds, situés en partie dans le scrotum, & en partie dans l’abdomen, un à droite, & un à gauche.

Déférent, se prend substantivement, en termes de monnoie, & signifie les marques qui indiquent le lieu de la fabrication, le Directeur & le Graveur. Acad. Fr. Le déférent des monnoies est ordinairement une lettre qui se place au bas de l’écusson ; celui du Directeur, au bas de l’effigie ; celui du Graveur, avant le millésime. Celui des monnoies ne change point. Ceux du Directeur & du Graveur sont arbitraires.

DÉFÉRER. c. n. Se conformer aux sentimens & aux volontés de ceux à qui l’on doit des égards. Voyez Déférence. Aliquem observare, alicui honorem deferre, reverentiam erga aliquem adhibere. Les inférieurs doivent déférer aux supérieurs. En matière de langues on doit tout déférer à l’usage. Bouh. Il faut déférer aux loix, aux arrêts de défenses. Ils devoient déférer aux anciennes loix de l’Eglise. Pasch. Il faut déférer aux avis, aux sentimens des plus sages, des plus expérimentés.

Aux avis d’un censeur tu ne dois déférer
Qu’autant qu’il aura su t’instruire & t’éclairer. Vill.