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CUR

Ce mot vient de Curatus, que les Auteurs de la basse Latinité ont dit pour Curator. Ménage.

Curé Primitif, est celui qui s’est réservé les gros fruits d’une Cure, les droits honorifiques, & quelques marques de prééminence, tandis qu’il la fait desservir par un Vicaire perpétuel, auquel il donne une portion congrue pour subsister. Parochus primigenius. Le Concile de Mérida, tenu en 666. permet dans son can. 12. à l’Evêque de prendre dans les Paroisses les Prêtres & les Diacres qui le pourront soulager, & de les mettre dans son Eglise Cathédrale, sans néanmoins qu’ils doivent cesser d’avoir inspection sur les Eglises dont ils seront tirés, & d’en recevoir le revenu. Ils y établiront seulement des Prêtres choisis par l’Evêque pour y servir à leur place, & ils leur donneront des Pensions. Quelques-uns croient que c’est là l’origine des Curés Primitifs. Il y a beaucoup d’Abbés, de Chapitres, de Communautés, qui sont Curés Primitifs. Un Curé Primitif, est celui qui a droit de jouir des fruits d’un Bénéfice uni, lequel avoit charge d’ames selon sa première & primitive institution, mais ayant été converti en Bénéfice simple, le soin des âmes a été transféré à un Vicaire perpétuel. Le Mait. Le nom de Curé Primitif a été inconnu aux Anciens, il ne se trouve point dans le Droit Canonique. Id. La qualité de Curé Primitif, est odieuse ; elle sépare le Bénéfice d’avec l’Office ; elle dépouille le Curé de la récompense légitime due à son travail, & à ses soins ; & ne lui laisse qu’un revenu médiocre, avec le titre de Vicaire perpétuel. Id.

Curé signifie en Bretagne ce que nous appelons Vicaire, & ce que le reste du Royaume appelle Curé, les Bretons l’appellent Recteur.

Curé, se dit proverbialement en ces phrases, il faut faire Carême-prenant avec sa femme, & Pâque avec son Curé. On dit aussi, vous allez trop vite à l’offrande, vous ferez cheoir Monsieur le Curé, à ceux qui s’empressent trop de faire quelque chose, & surtout de manger à table. On dit aussi, il a affaire au Curé & aux Paroissiens, pour dire, à plusieurs parties ensemble. On dit aussi.

Qui croit sa femme & son Curé,
Est en hasard d’être damné,

On dit que c’est gros Jean qui remontre à son Curé, pour dire, que c’est un ignorant qui veut instruire un homme qui en sait plus que lui.

CURE. s. f. Terme de Fleuriste. Nom de tulipe. Cure printanière est gris de lin fort pâle & blanc. Cure tardive de même. Morin.

CUREAU. s. m. Terme de Tondeurs de draps. C’est un petit instrument de bois, semblable à la tête d’un maillet, dont ces ouvriers se servent pour faire agir celui des deux couteaux des forces à tondre, que l’on appelle le Mâle. Ce même instrument s’appelle mailleau quand il est emmanché.

CURE-DENT. s. m. Petit instrument, ou aiguille dont on se cure, on se nettoie les dents. Dentiscalpium. On fait des cure-dents d’or, d’ivoire, de bois, de plume. Les Espagnols font des cure-dents de paille, d’où est venu ce proverbe qui leur est fort familier, En un da ca la paja, En un donne-moi la paille, ou le cure-dent, pour dire ; En un clin d’œil.

Cure-dent d’Espagne. s. m. Plante dont la racine est fibreuse & annuelle. Ses feuilles sont plus larges, plus courtes & plus émoussées que celles du fenouil. Son ombelle est ordinairement retrécie & serrée, & ses semences sont ordinairement plus petites que celles du fenouil. Visnaga. Cette plante croît d’elle-même en Italie, en Sicile & dans les contrées méridionales de la France. Il y a beaucoup de personnes, sur-tout en Espagne, qui font des pédicules roides & odoriférans, des ombelles du visnaga, des cure-dents.

CURÉE. s. f. Terme de Vénerie, est le repas qu’on fait faire aux chiens & aux oiseaux, en leur faisant manger la bête qu’ils ont prise. Esca prædacea, pars prædæ canibus à venatore, vel accipitri ab aucupe porrecta. Curée chaude, est quand on leur donne sur le champ quelque partie de la bête. On disoit anciennement cuirée, d’où le mot de curée a été fait par corruption, à cause que la curée se fait dans le cuir de la bête. Men. Curée froide, est celle qu’on leur prépare d’ailleurs. Cette curée se fait de morceaux de pain trempés dans le sang de la bête, qu’on met sur la peau avec quelques morceaux de chair, qu’on appelle le droit des chiens, comme la cervelle & le cou. Les chiens font quelquefois la curée du gibier avant que le Veneur arrive.

On appelle fouaille, la curée du sanglier, car elle se fait avec du feu. Quelques-uns disent cuirie. La curée du lièvre se fait avec pain, fromage & friandise, brunis dans le sang du lièvre. Aux chiens niais & jeunes on donne la tête & les épaules. Les curées baignées sont laxatives ; les curées essuyées.

☞ On dit, en parlant des chiens, qu’ils font curée, lorsque, sans attendre le Veneur, ils mangent la bête qu’ils ont prise.

On dit, mettre les chiens en curée, pour dire, leur donner plus d’ardeur à la chasse par la curée qu’on leur fait. Et l’on dit dans le même sens qu’ils sont en curée. On dit, défendre la curée, pour dire, Empêcher à coups de gaule que les chiens n’approchent trop tôt de la curée.

☞ Dans le sens figuré, on le dit des hommes lorsque le butin & le profit qu’ils ont faits, les animent davantage à quelque entreprise. Ce petit avantage a mis les troupes en curée, elles sont en curée. Il a fait curée à son armée du pillage de cette ville. Le profit qu’il a trouvé d’abord en cette affaire, l’a mis en curée. Acad. Fr.

☞ Je respecte beaucoup une pareille autorité ; mais je ne conseillerai à personne de se servir de cette expression. Non-seulement elle est basse, mais elle présente encore quelque chose de dégoûtant.

CURE-OREILLE. s. m. Petit instrument d’or, d’argent, ou d’ivoire, qui est plat & délié, avec un petit rebord creux à l’un des bouts qui sert à nettoyer l’oreille & à d’autres opérations relatives à cette partie. Auriscalpium.

CURECTIS. s. m. C’étoit le troisième jour des Apaturies, auquel les jeunes gens qui entroient dans l’âge de puberté faisoient couper leurs cheveux dans le Temple de quelque Divinité, & les consacroient à Diane ou à Appollon. De Κοῦρος, jeune homme.

CURE-PIED. s. m. Instrument de fer crochu qui sert à nettoyer le dedans du pied des chevaux, à en ôter la terre, la crotte, ou le sable. Pediscalpium.

CURER. v. a. Nettoyer quelque lieu profond, quelque chose de creux, en ôter les ordures. Purgare. curer un puits, des fossés, un canal, un étang, un privé, &c.

Curer, se dit aussi des dents & des oreilles, qu’on nettoie de l’ordure qui s’y attache, avec des plumes, ou quelques autres petits instrumens propres à cela, qu’on appelle cure-dent, ou cure-oreille. Quand il s’agit des dents & des oreilles, il est selon l’usage de dire nettoyer, plutôt que curer.

Curer, est aussi un terme de laboureur, qui se dit de la charrue qu’on nettoie avec le curoir.

Curer. Terme d’Agriculture. Curer une vigne en pied, c’est ôter du pied des seps tout le bois inutile que l’ignorance d’un vigneron y avoit laissé dans l’ébourgeonnement. Ainsi les vignerons disent ; je viens de curer en pied, j’ai déjà trois arpens de vignes curés en pied. Liger.

Curer. Les Couverturiers se servent aussi de ce mot, pour dire, Nettoyer. Curer des chardons.

Curer, en terme de Chasse, se dit des oiseaux qu’on purge en leur donnant une cure. Il ne faut point paître oiseau qu’il n’ait curé, ou rendu ses cures. Voyez Cure.

Curer, en ce sens, signifie rendre gorge ; & les Veneurs ont abusé du terme de curée, qu’ils ont emprunté des Fauconniers, pour l’appliquer aux repas