Page:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/401

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
775
756
CIRCONCISION


raient leur fornication, c’est-à-dire le châtiment de leur révolte, jusqu’à ce que les cadavres des pères de ces enfants fussent consumés dans le désert. Num., xiv, 33. Il y a donc lieu de croire que la circoncision, comme du reste la célébration régulière de la Pàque, fut suspendue en conséquence de cette malédiction. Il est certain du moins que cette suspension n’eut lieu que sur l’ordre ou le consentement de Dieu, car nulle part la Sainte Écriture n’en fait un grief aux Israélites. Cette pratique ne fut remise en vigueur que quand le peuple eut commencé la conquête.de cette terre que le Seigneur avait donnée à son ancêtre Abraham. — C’est à Galgala, sur la rive droite du Jourdain, non loin de Jéricho, que les enfants d’Israël durent se soumettre à la loi de la circoncision. Sur l’ordre du Seigneur, Josué les fit « circoncire pour la seconde fois », avec des Couteaux de pierre, et ensuite le Seigneur dit : « Aujourd’hui je vous ai enlevé l’opprobre de l’Egypte. » Jos., v, 2-11. Cf. Vigouroux, Les Livres Saints et la critique rationaliste, Paris, 1891, t. iv, p. 447-452. Ce passage de Josué réclame quelques explications. 1. Quand l’auteur sacré dit que les Israélites eurent à être circoncis « pour la seconde fois », il ne parle pas d’une circoncision à opérer de nouveau sur ceux qui l’avaient déjà reçue. Origène, In libr. Jesu Nave, Hom. v, 5, t. xii, col. 849, se trompe évidemment en prêtant ce sens au texte, et en concluant de là que ce passage ne doit pas être entendu littéralement. Une première circoncision générale avait eu lieu jadis au temps d’Abraham, sur l’ordre du Seigneur ; cet ordre est donné pour la seconde fois au temps de Josué, et c’est pour la seconde fois qu’on se met alors à circoncire la descendance d’Abraham. Les Hébreux qui étaient âgés de plus de quarante ans et qui avaient reçu la circoncision en Egypte ou dans les premiers temps de l’exode ne pouvaient la recevoir de nouveau. — 2. La circoncision fut faite avec des couteaux de pierre. Peut-être les Égyptiens se servaient-ils de semblables instruments pour circoncire. Toujours est-il qu’ils employaient des pierres tranchantes pour ouvrir le liane des morts à embaumer. Hérodote, ii, 86. Les couteaux de pierre dont les Hébreux se sont servis à Galgala ont été peut-être en partie retrouvés. En 1870, l’abbé Richard, hydrologue, a recueilli un bon nombre de ces couteaux disséminés dans le sol ou à la surface autour des ruines de Galgala, sur un rayon de plusieurs kilomètres. Il en trouva ensuite une grande quantité dans un tombeau que l’on a cru être celui de Josué et aux alentours, à Kharbet-Tibnéh. Ce sont généralement des instruments en silex ; quelques-uns sont en calcaire blanchâtre qui paraît avoir passé par le feu. Revue archéologique, 1870, p. 378-379 ; Comptes rendus de l’Académie des inscriptions et belles-lettres, 1870, p. 358-359 ; V. Guérin, dans le Journal officiel, 6 octobre 1874, p. 6880, et Description de la Palestine, Samarie, t. ii, p. 104 ; Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, t. iii, p. 199-203. Cette découverte a expliqué le sens de deux additions qu’on lit dans le texte grec de Josué. Après xxi, 40, les Septante ajoutent qu’on donna à Josué la ville de Thamnasacar, dans les montagnes d’Éphraïm, et que « Josué y recueillit les couteaux de pierre avec lesquels il avait circoncis les fils d’Israël, nés au cours du voyage dans le désert, et les déposa à Thamnasacar ». Après xxiv, 30, ils ajoutent encore : « On l’ensevelit sur les limites de son héritage, à Thamnasacar, dans les montagnes d’Ephraïm, au nord des montagnes de Galaad. Lorsqu’on l’y eut déposé dans son sépulcre, on y plaça près de lui les couteaux de pierre avec lesquels il avait circoncis les fils d’Israël à Galgala, comme l’avait prescrit le Seigneur lorsqu’il les eut amenés d’Egypte, et les couteaux y sont encore de nos jours. » En faisant ainsi rassembler d’abord auprès de lui, et ensuite dans son tombeau, tous ces instruments de pierre, peut-être Josué voulait-il empêcher qu’ils ne devinssent par la suite des objets de superstition. Notons toutefois que la présence

du tombeau de Josué à Kharbet-Tibneh est sérieusement contestée. Cf. Séjourné, Thimnath-Serach et Thimnath-Herès, dans la Revue biblique, 1893, p. 608-626. — 3. Après cette circoncision, le Seigneur dit à Josué : « Aujourd’hui je vous ai enlevé l’opprobre de l’Egypte. » Cet opprobre, hérpâh, n’est point un opprobre rapporté d’Egypte, puisque les survivants qui avaient été en servitude dans ce pays en étaient sortis pour la plupart circoncis. Mais cet opprobre est l’état d’incirconcision, que les Égyptiens regardent comme déshonorant ; c’est cette honte, Septi, dont parle le Livre des morts, xvii, 11, 15. Le mot hébreu est pris dans un sens analogue dans Ézéchiel, xvi, 57 ; xxxvi, 15. Le Seigneur semble donc dire que désormais les Égyptiens n’auront plus à regarder son peuple comme de race inférieure et impure.

3° Dans la suite de l’histoire juive. — À partir de l’établissement des Hébreux dans la terre de Chanaan, la loi de la circoncision fut toujours fidèlement observée. Cette pratique distingue alors les Israélites de leurs voisins de l’ouest, les Philistins, habituellement flétris du nom méprisant d’  « incirconcis », ’arlim. Jud., xiv, 3 ; xv, 18 ; I Reg., xiv, 6 ; xvii, 26, 36 ; xxxi, 4 ; II Reg., i, 20, etc. Le même nom est attribué à d’autres peuples idolâtres. Is., lii, 1 ; Ezech., xxviii, 10 ; xxxii, 19-32 ; Esth., xiv, 15. Les étrangers qui voulaient s’incorporer au peuple juif continuaient à se faire circoncire. Judith, xiv, 6. En Perse, au temps d’Esther, beaucoup « embrassèrent la religion et les rites » des Juifs. Le texte grec dit : KEpiETÉjiovTo xa ! îouSiï’ov, « furent circoncis et vécurent à la juive. » Esth., vni, 17. D’après le Talmud, Kerithoth, 81 a, Pesachim, viii, 8, trois conditions sont nécessaires pour devenir juif : la circoncision (mïlâh), le baptême purificatoire et le sacrifice. Ces conditions remplies, on devenait prosélyte de justice, c’est-à-dire affilié selon les règles au peuple d’Israël, mais néanmoins toujours inférieur au juif de naissance. Sous Antiochus IV Épiphane, la circoncision eut ses martyrs. Ce tyran faisait périr les mères qui avaient procuré la circoncision à leurs enfants, et il associait ces enfants au supplice maternel. I Mach., i, 63, 64 ; II Mach., vi, 10 ; Josèphe, Ant. jud., XII, v, 4.

4° Dans l’Évangile. — Saint Luc, i, 59 ; II, 21, mentionne la circoncision de saint JeanBaptiste et ensuite celle de Notre - Seigneur.

III. Le rite de la circoncision. — 1° Son cérémonial.

— La circoncision était pratiquée sur l’enfant mâle huit jours après sa naissance. La circoncision que certains peuples imposaient aux femmes, Strabon, XVII, ii, 5, ne fut jamais en usage chez les Juifs. Saint Thomas, Summ. theolog., iii, q. lxx, a. 2 ad 4, donne deux raisons de cette abstention. — Dans le principe, la circoncision fut pratiquée sur l’enfant dans l’endroit même où il était élevé. Chez les nomades, l’opérateur était un membre de la famille, parfois même le père, Gen., xvii, 23, ou la mère. Exod., iv, 25. On n’a pas de renseignements sur la manière dont la circoncision se pratiquait en Israël sous les Juges et sous les Rois. Dans les derniers temps, ce fut un opérateur spécial qui fut appelé à circoncire, au moins dans chaque centre important. Il portait le nom de môhêt, dérivé de rnûl, « circoncire. » Jamais la circoncision n’a été donnée dans le Temple. L’opération s’exécutait habituellement le matin, dans la synagogue, en présence d’au moins dix personnes. Deux sièges étaient préparés, l’un pour le témoin ou parrain, l’autre pour le prophète Élie, censé présent à la cérémonie. La présence du prophète se déduisait d’une fausse interprétation rabbinique de Mich., iii, 1, combiné avec III Reg., xix, 10. Le père de l’enfant devait aussi se trouver là. En faisant l’opération, le môhêl disait : « Béni soit le Seigneur notre Dieu, qui nous a sanctifiés par ses préceptes et nous a. donné la circoncision. » Le père de l’enfant continuait en disant : « Qui nous a sanctifiés par ses préceptes et nous a donné d’introduire notre enfant dans l’alliance d’Abraham notre père. » Schabbath, ꝟ. 137 b. Ensuite le môhêl