Page:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome IV.djvu/380

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
725
726
MARC (ÉVANGILE DE SAINT)


la finale DE marc. — On en apporte d’intrinsèques et d’extrinsèques. — 1° Arguments extrinsèques. — Sans parler de la ressemblance étonnante, signalée au début de cet article, entre l’Épttre aux Hébreux et la finale de Marc, on tire ces arguments des manuscrits, des versions et des Pères. — 1. Les manuscrits. — Eusèbe de Césarèe, Qusest. ad Marinum, i, t, xxii, col. 937, disait que cette finale ne se trouvait point dans tous les exemplaires de l’Évangile de Marc. « En effet, ajoutait-il, les exemplaires soignés placent le téXoç de l’Évangile selon saint Marc après… êçoëoûvro f « p-- Ce qui suit, se trouvant à peine dans quelques manuscrits et non dans tous, serait considéré comme superflu, et cela surtout parce que la fin paraît renfermer quelque chose de contraire au témoignage des autres évangélistes. » Saint Jérôme, Epist. cxx, 3, t. xxii, col. 987, copiant évidemment Eusèbe, répète de ce passage de Marc, quod in raris fertur Evangeliis, omnibus Grxcim libris pêne hoc capitulum in fine non habentibus, prsesertim cum diversa atque contraria evangelislis cseteris narrare videatur. Victor d’Antioche, tributaire d’Eusèbe, dit après lui que la finale existe seulement dans quelques manuscrits de Marc. Catense in Evangelia S. Matthœi et S. Marci, Oxford, 1840, t. i, p. 417. Une scholie qui est mise sous son nom assure même que la finale manque dans la plupart des manuscrits ; mais elle ajoute que ces versets s’étant rencontrés aussi dans le plus grand nombre des manuscrits, on les a conservés dans le texte de saint Marc. Ibid. Une homélie, attribuée tantôt à saint Grégoire de Nysse, tantôt à Sévère d’Antioche, tantôt à Hésychius de Jérusalem, affirme avec Eusèbe que, dans les exemplaires les plus exacts, l’Évangile selon Marc a le téXoç après èço600vTo yâp, t. xlvi, col. 644. Elle semble être de Sévère d’Antioche († 535). Mais tous ces écrivains, même saint Jérôme, ne font que répéter ce qu’avait écrit Eusèbe, dont le témoignage est ainsi le seul à affirmer que la finale de Marc manquait dans les manuscrits soignés. Le silence de plusieurs Pères grecs et latins (voir col. 726) au sujet de la finale actuelle de saint Marc a été interprété comme une preuve de l’absence de ces versets dans les manuscrits à l’usage de ces écrivains. De fait, deux des plus anciens manuscrits onciaux, » et B, n’ont pas cette finale ; encore a-t-on justement remarqué que dans le Vaticanus le copiste a laissé après Marc, xvi, 8, un espace blanc assez considérable pour contenir la finale ordinaire. Trois autres onciaux, L, du VIIIe siècle, T 1, du vu » ou du vni « , W, du vme ou du IXe, contiennent deux finales, la canonique et une plus courte. Cf. Amélineau, Notice des manuscrits coptes de la Bibliothèque nationale renfermant des textes bilingues du N. T., Paris, 1895, p. 43-44 ; Gregory, Textkritik des N. T., Leipzig, 1900, t. i, p. 70-71, 94-95. Mais la finale canonique se lit dans tous les autres onciaux qui contiennent l’Évangile de saint Marc. Quant aux cursifs, ils reproduisent le texte complet, et huit seulement, 1, 15, 20, 22, 199, 206, 209 et 300, conservent par une note placée à la marge le souvenir des anciennes hésitations. Toutefois un certain nombre d’autres, de trente à quarante, accompagnent le texte du commentaire et de la scholie de Victor d’Antioche. Ils répètent les doutes anciens, mais ils affirment en même temps/ que ces versets se trouvaient dans le plus grand nombre des exemplaires. Les faits, d’ailleurs, leur donnent raison, et si on ne veut que compter les manuscrits, la grande majorité contient les derniers versets de l’Évangile de saint Marc.

Le témoignage des manuscrits grecs en faveur de l’authenticité de cette finale est corroboré par celui de tous les Évangéliaires et Synaxaires grecs. Tous, en effet, nous apprennent que Marc, xvi, 9-20, sont lus dans la liturgie grecque aux matines de l’Ascension et forment le troisième des eùayyéXia suôivà àvanâ<ri[ia, ou des

I récits de la résurrection, lus chaque année à Pâques, et aux matines des dimanches. Voir Lectionnairks, col. 147.

2. Les versions. — La finale de Marc existait dans la version latine antérieure à saint Jérôme. De tous les. manuscrits connus, seul le Bobbiensis, ii, du Ve siècle, contient une autre finale. Saint Jérôme a conservé Marc, xvi, 9-20, dans sa revision de l’Italique, et tous les manuscrits de la Vulgate les contiennent. Cf. Wordsworth et White, Novum Testamentum D. N. J. C. latine, Oxford, 1891, t. i, fasc. 2, p. 267-268. Toutes les versions syriaques, la Peschito, la curetonienne, la philoxéno-héracléenne, les possèdent. Ils ne se trouvent pas cependant dans le Codex Sinaiticus, publié par M me Lewis. Holzhey, Der neuentdeckle Codex Syrus Sinaiticus, Munich, 1896, p. 39. La version gothique, dans le seul manuscrit qui nous en reste, n’a pas, il est vrai, la finale entière de Marc ; mais comme le texte manque seulement à partir des trois premiers mots du ꝟ. 12 du chapitre xvi, le feuillet mutilé atteste suffisamment la présence de la finale entière dans cette version. Parmi les traductions coptes, la bohaïrique ou memphitique, qui est complète pour les Évangiles, contient la finale de Marc. Les fragments jusqu’ici connus des autres versions coptes ne l’ont pas encore fournie* La version arménienne, faite au ve siècle sur un manuscrit grec que les traducteurs appellent une « copie impériale », n’avait pas, les anciens manuscrits en font foi, la finale de Marc, iet les Arméniens n’ont pas lu cette finale dans leur liturgie avant l’époque des Croisades. Ils possèdent cependant une traduction ancienne de ces versets faite sur la Peschito. De leur absence dans la version, faite sur le grec, il faut conclure que la copie impériale, qui a servi de texte, ne les possédait pas. Or qu’était-ce, sinon un des cinquante manuscrits qu’Eusèbe de Césarèe fit faire par ordre de Constantin pour les principales Églises ? Si cette hypothèse est vraie, Eusèbe serait responsable de l’absence de cette finale de Marc dans la traduction officielle de l’Église arménienne. Cette finale manqua encore dans un manuscrit, coté n° 13 à la bibliothèque Vaticane, d’une version arabe. Dans toutes les Églises, qui se servent de versions dans la liturgie, sauf l’ancienne Église d’Arménie, on a toujours lu et on lit encore aux offices publics les derniers versets de saint Marc.

3. Les Pères. — Leurs témoignages fournissent ea faveur de la finale de saint Marc des attestations plus anciennes que celles des manuscrits et des versions. Le Pasteur d’Hermas, Sim., ix, 25, 2, Funk, Patres apostolici, 1901, 1. 1, p. 620, semble reproduire des paroles de Marc, xvi, 15 sq. Les critiques reconnaissent que saint Justin, Apol., i, 2, 39, 46, t. vi, col. 329, 388, 397, fait des allusions manifestes au texte de cette finale. Traitant le même sujet que saint Marc, il emploie, par réminiscence assurément, les mêmes mots. Tatien avait fait entrer ce récit dans son Atà-zzaaâptùt, ainsi qu’on le sait par la version arménienne du commentaire de saint Éphrem et par la traduction arabe de l’ouvragelui-même. Cf. Zahn, Geschichte des Neutestamentlichen Kanons, Erlangen et Leipzig, 1891, t. ii, p. 553554. Saint Irénée, Cont. hxr., III, x, 6, t. vii, col. 879, cite iMarc, xvi, 19, comme la fin du second Évangile. Saint Hippolyte, Cont. Noetum, 18, t. x, col. 829, fait peut-être allusion au même verset, et quelques critiques, pensent que les Constitutions apostoliques, viii, i r t. i, col. 1061, où on remarque d’autres allusions à la finale de Marc, seraient tributaires d’un autre écrit du même saint Hippolyte. Cf. ibid., vi, 15, col. 948. Clément d’Alexandrie, Origène, Tertullien, saint Cyprien, saint Grégoire le Thaumaturge et saint Denys d’Alexandrie se taisent, il est vrai, sur les derniers versets de saint Marc. Faut-ilconclure de leur silence qu’ils n’admettaient pas leur authenticité ? La conclusion ne,