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PERDRIX — PERE


l’Asie et de l’Afrique. On en voit jusque dans le nord de l’Espagne et dans les Landes françaises. Le coq des sables commun, pterocles arenarius, le khudry des Arabes, se trouve dans le désert de Judée. Une autre espèce, le pterocles setarius, le kata des Arabes, se montre de temps en temps par milliers dans les parties découvertes de la vallée du Jourdain et dans le désert qui est à l’est. Le désert de Judée et les abords de la mer Morte sont encore fréquentés par deux autres espèces, le pterocles exustus et le senegalensis, dont le plumage présente, avec des traits délicats, une tonalité générale enharmonie avec celle du terrain. Delà vient que les oiseaux du genre perdrix échappent si facilement à la vue de leurs ennemis. Cf. Tristram, The natural history of the Bible, Londres, 1889, p. 224-229. 2° La perdrix dans l'Écriture. — La Sainte Écriture fait trois fois mention de la perdrix. David constate que Saùl le poursuit « comme on poursuivrait une perdrix dans les montagnes ». I Reg., xxvi, 20 Cette comparaison est parfaitement justifiée. On a vu plus haut comment les perdrix des différentes espèces communes en Palestine sont poursuivies à travers les rochers et finissent par se laisser prendre, quand la fatigue les a harassées. Ainsi Saùl comptait épuiser les forces de David par une poursuite acharnée et finir par s’emparer de lui. — On lit dans l’Ecclésiastique, xi, 32 (28) :

Comme la perdrix de chasse dans sa cage, Ainsi est le cœur de l’orgueilleux, Et comme l’espion il guette la ruine, Changeant le bien en mal, il dresse des pièges.

Cette perdrix de chasse, jtlpSiS 0-/jpeutt, ç, est celle qu’on . employait comme appeau. On dressait pour cet usage des alouettes, des linottes, des pigeons, des cailles et surtout des perdrix. Celles-ci étaient ensuite placées dans une cage qu’on dissimulait en partie au moyen d’un couvert de feuillage. En avant de la cage, un filet manœuvré par un chasseur caché, pouvait s’abattre sur les oiseaux qu’attiraient les cris des perdrix prisonnières, ou les empêtrer de telle sorte qu’il était ensuite aisé de les prendre à la main. Cf. Tristram, The natural history, p. 163-164. L’orgueilleux méchant et perfide est comparé à l’oiseau qui sert d’appeau ; il attire auprès de lui, mais pour perdre et faire tomber dans ses pièges. — Enfin, Jérémie, xvii, 11, emprunte aux mœurs de la perdrix cette autre comparaison :

Une perdrix couve (des œufs) qu’elle n’a pas pondus ; Tel est l’homme qui acquiert des richesses injustement ; Au milieu de ses jours, il doit les quitter, Et à sa fin il n’est plus qu’un insensé.

Ce texte semble supposer que la perdrix va s’emparer d'œufs d’oiseaux d’une autre espèce, qu’elle les couve et qu’ensuite les poussins abandonnent celle qui n’est pas leur mère. Cette dernière se trouverait alors dans le cas de la poule qui a couvé des œufs de canards, comme on dit proverbialement en français. Le chaldéen traduit : « Voici, comme la perdrix rassemble des œufs qui ne sont pas à elle, et en les chauffant couve des poussins qui pourtant ne la suivent pas, ainsi en est-il de tout méchant qui possède des richesses mal acquises. » On lit dans les Septante : « La perdrix a crié, elle a rassemblé ceux qu’elle n’a pas engendrés, » et dans la Vulgate : « La perdrix a couvé ceux qu’elle n’a pas engendrés. » Saint Ambroise, qui a toute une lettre sur les mœurs de la perdrix, Ep. xxxil, t. xvi, col. 10691071, accepte le fait de la perdrix s’emparant d'œufs étrangers. Cf. Hexæm., vi, 3, t. xiv, col. 246. Saint Jérôme, In Jer, , iii, 17, t. xxiv, col. 789, pour justifier cette assertion, s’appuie sur les auteurs d’histoire naturelle, qu’il, cite d’ailleurs assez vaguement. Saint Augustin, Cont. Faust., sur, 12, t. xur, col. 289, explique le même texte, mais sans s’arrêter au rapt des œufs

étrangers. Il est à remarquer que le texte hébreu ne suppose nullement que des œufs soient pris par la perdrix à d’autres oiseaux. D’ailleurs les faits ne justifient pas cette affirmation. Le coucou va porter ses œufs dans le nid d’un autre oiseau qui les couve à son insu, mais on ne cite pas d’oiseau qui aille s’emparer des œufs d’un autre pour les couver lui-même. Le texte hébreu dit seulement : qorê' dâgâr velô' yàlâd, « la perdrix a couvé et n’a pas engendré. » En supposant les deux termes de la phrase unis par un pronom relatif, « la perdrix a couvé (ce qu’elle) n’a pas engendré, » il suffirait, pour justifier l’assertion, de dire, non pas que la perdrix a pris des œufs, mais qu’on lui en a mis à couver qu’elle n’avait pas pondus, et que ces œufs, appartenant à des oiseaux qui n'étaient pas de son espèce, ont donné des poussins qui l’ont abandonnée pour se livrer à leurs allures propres. Ainsi l’homme acquiert injustement des richesses qui, à un moment, l’abandonnent et sont perdues pour lui, par un juste retour des choses. Le verbe dâgâr veut dire « amasser » pour couver, quand il s’agit des oiseaux. Mais sa signification ne s'étend pas jusqu'à l’idée d’aller chercher des œufs ailleurs que dans le nid où ils sont déposés. Quant au verbe yâlâd, il signifié « engendrer » et « pondre », en parlant des oiseaux ; Mais comme ce passage de Jérémie est le seul où yâlâd soit employé à propos d’oiseaux, on ne voit pas pourquoi ce verbe ne pourrait pas signifier « engendrer » dans le sens de « faire éclore », d’où la traduction possible : « La perdrix a couvé et n’a pas fait éclore, » c’est-à-dire n’a pas mené à terme sa couvée. Cf. Vatable, dans le Script. Sacr. cursus compl. de Migne, Paris, 1841, t. xix, col. 175. « Sur ce passage de Jérémie, écrit Tristram, The natural history, p. 225, on a proposé, plusieurs commentaires ingénieux, dont quelques uns sont contraires aux faits. On a affirmé que la perdrix dérobe les œufs d’autres oiseaux, les couve pour son propre compte, d’où la traduction du passage : Elle rassemble des œufs qu’elle n’a pas pondus. Mais il n’est pas vrai que la perdrix dérobe les couvées des autres. Il n’y a qu’une vraie interprétation. La perdrix pond un très grand nombre d'œufs. Une fois, j’ai trouvé un nid de trente-six œufs dans désert de Judée.' Mais elle a beaucoup d’ennemis, parmi lesquels l’homme n’est pas le moindre, qui recherchent son nid et lui dérobent ses -œufs. Les œufs de perdrix sont assidûment recherchés par les Arabes qui en font leur nourriture. Ils sont aisés à trouver et la quantitédétruite annuellement estsurprenante. Durant un printemps, en Palestine, près de huit cents œufs de perdrix grecque, caccabis saxatilis, ont été apportés à notre camp ; nous avions l’habitude de les utiliser chaque jour, encore tout frais, pour faire des omelettes. Autrefois on les ramassait sansdoute dans le même but. La pensée du prophète est donc que l’homme devenu riche par des moyens injustes n’aura guère la jouissance de sa prospérité mal acquise, mais qu’il la perdra prématurément, comme la perdrix qui commence à couver, mais est rapidement dépouillée de tout espoir de couvée. » La comparaison porterait ainsi, non sur la manière dont les richesses injustes sont acquises, mais sur la rapidité avec laquelle elles disparaissent. Il faudrait donc traduire :

La perdrix couve, sans mener à ferme ; Ainsi l’homme qui acquiert des richesses injustement.

H. Lesêtre.

PÈRE (hébreu : 'ab ; Septante : rcrriip ; Vulgate : paler), celui qui a engendré des enfants avec le concours de la mère. Le nom de père est employé par la Sainte Écriture dans des sens divers, tantôt par rapport aux hommes tantôt par rapport à Dieu. '

I. Par rapport aux hommes. — 1° Père au sens naturel, Gen., ii, 24 ; IX, 18, etc. — Sur les droits du père, voir Famille, t. ii, col. 2170. Les devoirs envers