Page:Dictionnaire de spiritualité, tome 2.2, Com-Cy, 1953.djvu/1300

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qui facilitent la mise en pratique de cette dévotion.

Les ouvrages postérieurs de François Froment (La véritable dévotion au Sacré-Cœur de Jésus-Christ, Besançon, 1699, entrepris en même temps que celui de Croiset), et de Joseph de Gallifet (De l’excellence de la dévotion au Cœur adorable de Jésus-Christ, Lyon, 1733) ne firent pas oublier celui de Croiset. Ce fut néanmoins le seul ouvrage qu’il consacra à la dévotion au Sacré-Cœur. Écarté de Lyon, et voyant son ouvrage mis à l’Index, il se tut sur ce sujet. Ni son Année chrétienne, au vendredi qui suit l’octave de la Fête-Dieu, ni ses Règlemens pour Messieurs les pensionnaires, parmi les pratiques de dévotion, ne la proposent. Il n’est pas douteux qu’après l’enthousiasme, peut-être intempestif, de ses premières années de sacerdoce, Croiset ne s’imposât lui-même cette réserve, pour satisfaire aux directions de ses supérieurs. Il écrit cependant de Lyon le 29 août 1713 à la sœur Chalon : « J’espère donner prochainement sa vie (de Marguerite-Marie) en un volume entier », et il réclame des documents. Cette vie n’a pas été publiée (Fr.-L. Gauthey, Vie…, t. 1, p. 612-613).

Par la propagation de la retraite pour un jour chaque mois, procurant « un moyen facile de faire la retraite à toutes sortes de personnes, surtout à ceux qui à raison de leurs occupations n’ont pas assez de loisir pour consacrer huit à dix jours à une retraite annuelle », Croiset se montre un initiateur. Pareillement, en offrant ce guide quotidien que sont ses Exercices de piété, sorte d’année chrétienne, qui répond peut-être à celle du janséniste Nicolas Letourneux (Année chrétienne, Paris, 1684 svv ; à l’Index en 1691), Croiset se distingue par une utilisation plus marquée de l’année liturgique (sanctoral et temporal), pour alimenter la méditation quotidienne.

La doctrine spirituelle de Croiset ne peut être dite réellement originale. Toute son attention se porte sur l’ascétique, la pratique des vertus, l’opposition à l’esprit du monde. Dans cette lutte constante, l’effort est soutenu par la méditation des grandes vérités de la première semaine des Exercices, les seules développées dans ses retraites mensuelles, ses Règlements, et principalement par la pensée de la mort. Cette dernière est prépondérante, parce qu’« à la mort chacun a l’esprit chrétien ». Il y revient constamment, comme à la lumière qui juge pensées et démarches. La fin même de la retraite mensuelle est de « se mettre, par un véritable changement de vie, en état de bien mourir ». Croiset n’en guida pas moins, durant près de deux siècles, une foule de chrétiens dans la vie spirituelle.

Mémoires de Trévoux, passim. — É. Régnault, Le R. P. Jean Croiset, Toulouse, 1888 (quelques lettres de Croiset). — Courte biographie et lettres inédites de la B. Marguerite-Marie, l’apôtre du Sacré-Cœur de Jésus, Toulouse, 1890. — C. Sommervogel, Bibliothèque de la Compagnie de Jésus, Paris, t. 2, 1891, col. 1661-1686 ; t. 9, col. 151-153 ; Suppl. nos 434, 1241, 4151. — E. Letierce, Étude sur le Sacré-Cœur, t. 2, Paris, 1891, p. 53-100. — E. Soulilier et R. Terret, Les Jésuites à Marseille aux 17e et 18e siècles, Avignon, 1899. — H. Dutouquet, art. Croiset, DTC, t. 3, col. 2338-2339. — Fr.-L. Gauthey, Vie et œuvres de la bienheureuse Marguerite-Marie, 3 vol., Paris, 3e éd., 1915. — A. Hamon, Histoire de la dévotion au Sacré-Cœur, t. 1, Vie de la bienheureuse Marguerite-Marie, Paris, 1923, t. 3, 1927. — J. Décréau, Le P. Croiset fut-il directeur ou dirigé de sainte Marguerite-Marie, dans l’Ami du clergé, 20 avril 1950, p. 241-243.