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Page:Dictionnaire des Apocryphes collections de tous les livres apocryphes de l’Ancien et du Nouveau Testament tome 1 1856.djvu/337

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14. Ils ont dit : Venez, allons faire la guerre à la mer, afin qu’elle se retire de devant nous, et que nous puissions nous étendre.

15. Le flots de la mer se sont aussi assemblés, ils ont tenu conseil, et ont dit : Venez, allons inonder les arbres des forêts, et ajoutons-les à notre empire.

16. Mais la forêt avait vu avorter ses desseins ; car le feu s’en est approché, et elle a été consumée.

17. Il en fut de même des desseins des flots de la mer. Car le sable leur résista et les contint.

18. Si donc l’on t’établissait le juge de ces combats, qui entreprendrais-tu de condamner ou de justifier ?

19. Je lui dis : Ils ont certes formé de vains projets. Les forêts naissent des entrailles de la terre, et la mer a son lit où elle peut rouler ses flots.

20. Et il me répondit : Tu as bien jugé, pourquoi n’as-tu pas raisonné de même à ton égard ?

21. De même que la terre est le lieu des forêts, et la mer celui des flots ; aussi ceux qui sont sur la terre ne peuvent comprendre que les choses de la terre ; ainsi ceux qui habitent au-dessus des cieux comprennent seuls les choses qui s’y passent.

22. Alors je lui dis : Je vous prie, Seigneur, de me donner l’intelligence de ces mystères[1].

23. Car je n’ai point prétendu sonder les choses qui sont au-dessus de nous ; mais celles seulement dont nous sommes tous les jours les tristes témoins. Pourquoi Israël est-il devenu l’opprobre de toute la terre, et le peuple chéri a-t-il été livré aux nations infidèles ? Pourquoi la loi de nos pères est-elle abolie, et pourquoi les livres saints ne se trouvent-ils plus[2]?

24. Semblables à de faibles sauterelles[3], nous passons nos jours dans la frayeur et dans la crainte, et nous ne sommes pas dignes d’obtenir miséricorde.

25. Mais Dieu oubliera-t-il son nom qu’il a établi au milieu de nous[4]? C’est sur quoi je vous ai interrogé.

26. Et il me répondit : Plus tu sonderas ces mystères, et plus ils exciteront ton admiration ; car le siècle se hâte d’arriver à sa fin, avec une rapidité incroyable[5].

27. Et il ne peut comprendre les choses qui sont réservées aux justes dans les temps à venir, parce qu’il est plein d’injustice et de misère.

28. À l’égard des choses sur lesquelles tu m’interroges : Je te dirai que le mal a été répandu sur toute la terre comme une semence ; mais le temps de sa destruction n’est pas encore venu.

29. Si donc la semence[6] n’est auparavant dissipée, et que le lieu où le mal a été semé ne soit détruit, le bien n’y portera aucun fruit[7].

30. Car Adam[8] porte dès le commencement[9] dans son cœur un germe malheureux[10]. Combien n’a-t-il point produit de crimes, et combien n’en produirat-il point jusqu’au temps de la moisson ?

31. Examine toi-même quel fruit d’impiété n’est point sorti de cette semence funeste.

32. Et quand on viendra à couper ces épis sans nombre, quelle sera l’abondance de cette moisson ?

33. Je lui dis : Comment ces choses se feront-elles ? quand arriveront-elles ? pourquoi nos jours sont-ils courts et sujets à tant de maux ?

34. Et il me répondit : Ne prétends point sonder les secrets du Très-Haut ; car quelque grands que fussent tes efforts, ils seraient inutiles.

35. Les âmes des justes[11] n’ont-elles pas voulu apprendre ces choses des lieux-mêmes où elles sont retenues [12], lorsqu’elles ont dit : Jusqu’à quand espérerons-nous, et quand viendra le fruit et le temps de la moisson ?

  1. Litt. Le sens d’entendre, c’est-à-dire le don de l’intelligence et de comprendre le juste sens des choses.
  2. Non pas que ces livres fussent absolument perdus, ni que la loi fût entièrement abolie ; mais parce que, durant une si longue captivité, le culte de Dieu, l’observance de la loi et la lecture publique de l’Écriture, paraissaient comme abolies et anéanties.
  3. Litt.: Pourquoi ne faisons-nous que passer dans le siècle ? Pourquoi sommes-nous errants et vagabonds sans demeure fixe, et dispersés de côté et d’autre, comme les sauterelles le sont par le vent.
  4. Ou dont nous sommes appelés. Dans le nom d’Israël, que Dieu donna à Jacob, se trouve et qui signifie Dieu.
  5. C’est-à-dire que les hommes se hâtent de pénétrer dans les mystères des siècles à venir par une curiosité très-imprudente. Voy. le verset suivant.
  6. Du mal. Voy. le vers. précédent.
  7. Voy. ci-dessus le vers. 55, note 1052.
  8. [Le genre humain.]
  9. [Depuis que, par orgueil, le premier homme commit volontairement le péché à l’instigation du démon.]
  10. [Le démon introduisit l’orgueil dans le cœur de l’homme, et c’est l’orgueil qui est ce germe malheureux, que la concupiscence échauffe et développe.]
  11. Qui sont morts, c’est ce qui faisait le sujet de l’attente des justes morts avant Jésus-Christ : ils attendaient avec impatience leur délivrance par son avènement et sa mort. Abraham et les autres patriarches avaient désiré ardemment de voir ses jours, et, dans l’assurance de les voir, ils s’en étaient réjouis par avance.
  12. Litt. : Des lieux de réserve. Il s’agit des limbes qui, selon les premiers Pères de l’Église, étaient un lieu de paix et de repos ; c’est ce qu’ils appellent, par opposition au lieu où sont les réprouvés, un meilleur lieu ; le sein d’Abraham, des patriarches et des prophètes, le lieu des saints. Voy. S. Justin, Dialog. cum Tryph.; les Const. apostol., liv. vi, ch. 17 ; S. Irénée, liv. 1, ch. 65 ; Clément d’Alex., Strom., liv. Iv et vi ; Tertul, contr. Marc., liv. v ; Origène, Periarchon., liv. iv. Voy.