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Page:Dictionnaire général de la langue française de François Raymond-T2-12-Synonymes.djvu/14

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14 DICTIONNAIRE DES SYNONYMES.


Vient d’accoucher d’un sonnet ; un homme gai, facétieux, n’engendre pas la mélancolie.

ENFIN, A LA FIN, FINALEMENT. Enfin annonce particulièrement, par transition, la fin, la conclusion ; à la fin annonce la fin des choses ; finalement annonce un résultat.

ENFLÉ, GONFLÉ, BOUFFI, BOURSOUFFLÉ. Enflé offre l’idée d’un fluide dans le corps ; gonflé offre l’idée d’une forte tension par plénitude ; bouffi, l’idée d’une enflure grosse, flasque ; boursoufflé d’une enflure de la peau. Le mot enflé est le genre des trois autres : il se dit de tout corps qui reçoit une extension par des fluides. Gonflé suppose la plénitude ; bouffi ne s’applique qu’aux chairs ; boursoufflé se dit des choses auxquelles ou donne un gros volume par le souffle.

ENNEMI, ADVERSAIRE, ANTAGONISTE. Les ennemis se haïssent ; les adversaires se poursuivent par intérêt ; l’éloignement des antagonistes ne vient que de leur différente façon de penser.

ENNOBLIR, ANOBLIR. La naissance, le mérite éclatant et récompensé ennoblissent ; le prince anoblit. Les anoblis ne sont pas toujours nobles, et les vrais nobles ne sont pas toujours anoblis. Les anoblis ne sont pas toujours ennoblis aux yeux des hommes de sens ; tous ceux qui se sont ennoblis par une conduite généreuse n’ont pas été anoblis.

ÉNONCER, EXPRIMER. Énoncer demande les qualités de l’élocution ; exprimer, les qualités de l’éloquence. L’homme disert énonce ; l’homme éloquent s’exprime.

ENQUÉRIR (s'), INFORMER (s'). S’enquérir, c’est faire des recherches profondes pour reconnaître exactement ; s’informer, c’est demander des éclaircissements pour savoir ; s’enquérir dit plus que s’informer, A force de s’enquérir, on découvre ; à force de s’informer, on apprend.

ENSEIGNER, APPRENDRE, INSTRUIRE, INFORMER, FAIRE SAVOIR. Enseigner, c’est donner des leçons ; apprendre, donner des leçons dont on profite ; instruire, mettre au fait des détails ; informer, avertir des événements ; faire savoir, rapporter fidèlement. Enseigner et apprendre ont rapport à ce qui cultive l’esprit ; instruire, à ce qui est utile à la conduite ; informer renferme une idée d’autorité à l’égard des personnes qu’on informe, et de dépendance à l’égard de celles qui sont l’objet de l’information ; faire savoir satisfait la curiosité.

ENSEMBLE, A LA FOIS. On met ensemble les choses que l’on veut emporter à la fois. Ensemble désigne plutôt les rapports qui existent entre les actions ou les choses ; à la fois, les rapports qui existent entre les instants.

ENTENDRE, ÉCOUTER, OUÏR. Entendre, être frappé des sons ; écouter, prêter l’oreille ; ouïr marque une sensation confuse ; on a ouï parler, sans avoir entendu ce qui a été dit.

ENTENDRE, COMPRENDRE, CONCEVOIR. Le premier s’applique à la clarté du discours, tout cela s’entend ; le second se dit des principes, des leçons, des choses spéculatives, qui se comprennent ; le troisième, des arrangements, des projets, des plans, on les conçoit.

ENTENDRE RAILLERIE, ENTENDRE LA RAILLERIE.

Celui qui entend raillerie ne se fâche pas ; il la détourne avec adresse ou riposte avec esprit à celui qui, entendant la raillerie, voulait exercer son talent sur lui.

ENTENDU, HABILE, ADROIT. Habile se dit de la conduite ; entendu, des lumières, de l’esprit ; adroit, des grâces de l’action.

ENTÊTÉ, OPINIÂTRE, TÊTU, OBSTINÉ. On est entêté par attachement à ses propres opinions ; on est opiniâtre par une honte qui empêche de se rétracter ; on est têtu par indocilité, par la bonne opinion de soi-même, qui fait rejeter le sentiment d’antrui ; on est obstiné par mutinerie, par impolitesse.

ENTHOUSIASME, EXALTATION. L’enthousiasme est un élan momentané d’admiration causé par l’aspect réel ou idéal d’un objet étonnant ; l’exaltation est un état habituel de l’âme qui s’élève de sa propre force au-dessus des sentiments, des pensées ordinaires ; et, en sortant de la sphère humaine, se perd, égarée par des idées romanesques, dans l’empire imaginaire de la perfection.

ENTIER, COMPLET. Une chose est entière, lorsque toutes les parties sont assemblées comme elles doivent l’être ; elle est complète, lorsqu’elle a tout ce qui lui convient. Le premier a plus de rapport à l’intégrité essentielle ; le second, à la perfection.

ENTIÈREMENT, EN ENTIER. Entièrement modifie l’action exprimée par le verbe ; en entier modifie la chose. Quand vous avez lu entièrement un livre, la lecture en est achevée ; si vous l’avez lu en entier, vous n’en avez rien omis. Ainsi entièrement a plus de rapport à l’action générale ; en entier, plus aux parties de la chose.

ENTOURER, ENVIRONNER, ENCEINDRE, ENCLORRE. Enclorre, c’est enfermer par un mur, une haie, etc. ; enceindre, c’est renfermer dans une enceinte quelconque ; entourer a une signification plus directe, plus rapprochée de l’objet ; environner est plus vague et s’éloigne davantage de lui. Un parc est enceint de fossés, on ne peut l’enclorre que de murs ; une ville est entourée d’eau, elle est environnée de hameaux.

ENTREMISE, MÉDIATION. Les querelles entre les individus, même les Corps, s’apaisent par l’entremise des amis communs ; celles entre les États, par la médiation des autres États.

ENVERS, REVERS. Envers se dit du moins beau côté, du dessous d’une feuille, ou est opposé à l’endroit ; revers ne se dit que d’une portion d’étoffe repliée sur elle-même, du côté d’une médaille opposé à la face.

ENVIE, JALOUSIE. On est jaloux de ce qu’on possède, et envieux de ce que possèdent les autres. On peut devenir jaloux sans être naturellement envieux. La jalousie est un sentiment dont on a peine à se défendre ; l’envie est un sentiment bas, qui tourmente celui qui en est pénétré.

ENVIER, AVOIR ENVIE. Nous envions aux autres ce qu’ils possèdent ; nous avons envie de ce qui n’est pas en notre possession. Le premier est un mouvement de jalousie ou de vanité ; le second, de cupidité ou de volupté. On envie le bonheur de quelqu’un ; on a envie d’un cheval. Les subalternes envient l’autorité des supérieurs, les enfants ont envie de tout et qu’ils voient.

ENVIER, PORTER ENVIE. On envie les choses, et l’on porte envie aux personnes.

ÉPANCHEMENT, EFFUSION. L’épanchement se fait doucement ; l’effusion, avec vivacité. Au figuré, un cœur sensible se soulage par des épanchements ; un cœur trop plein de sentiments se décharge par des effusions.

ÉQUIPONDÉRANCE, ÉQUILIBRE. L’équilibre résulte d’une égalité de forces qui agissent en sens contraire ; l’équipondérance, de l’égalité de la gravitation des corps comparés.

ÉQUITÉ, JUSTICE. La justice rend à chacun ce que le droit ou la loi lui donne ; l’équité est la lui naturelle qui nous invite à agir envers les autres comme nous voudrions qu’on agît envers nous. Tout est juste quand la loi prononce ; c’est à l’équité à tempérer la rigueur de ses arrêts.

ÉQUIVOQUE, AMBIGUÏTÉ, DOUBLE SENS. L’équivoque a deux sens, l’un naturel, l’autre détourné et qu’on ne soupçonne, pas ; l’ambiguïté a un sens susceptible d’interprétation ; le double sens a deux significations naturelles, l’une littérale, et l’autre d’allusion. L’équivoque trompe ; l’ambiguïté instruit


faiblement ; le double sens instruit avec précaution. v. AMBIGUÏTÉ.

ERRER, VAGUER. L’homme égaré erre ; l’homme oisif vague. On erre sans boussole ; on vogue au gré des vents.

ÉRUDIT, DOCTE, SAVANT. Une bonne mémoire, de la patience dans l’étude forment un érudit ; l’intelligence et de la réflexion en font un homme docte ; ces choses et la pénétration dans les matières de spéculation en font un savant.

ESCALIER, DEGRÉ, MONTÉE. Escalier est. le seul d’usage ; degré se dit par ceux qui ne savent pas leur langue ; il n’est proprement qu’une partie de l’escalier, une ou plusieurs marches entre les paliers ; montée est populaire. v. DEGRÉ.

ESPÉRANCE, ESPOIR. L’espérance s’étend sur tous les biens que nous désirons ; l’espoir s’attache aux biens que nous désirons le plus ardemment, et dont la privation serait un malheur.

ESPÉRER, ATTENDRE. On espère obtenir les choses ; on attend qu’elles viennent. Nous espérons des réponses favorables ; nous les attendons.

ESPRIT, RAISON, BON SENS, JUGEMENT, ENTENDEMENT, CONCEPTION, INTELLIGENCE, GÉNIE. L’esprit est fin et délicat, il saisit les rapports plus ou moins éloignés entre les objets ordinaires ; la raison est sage et modérée, elle ne sort point des règles ; le bon sens est droit et sûr, il juge

sainement des choses communes ; le jugement est sain, solide et clairvoyant, il fait discerner, distinguer ; la conception est nette et prompte, elle épargne les longues explications, donne l’aptitude pour les sciences et les arts ; l’intelligence est habile et pénétrante, propre aux divers emplois ; le génie est heureux et fécond, il saisit les rapports les plus éloignés, entre les objets, particulièrement les plus grands. La bêtise est l’opposé de l’esprit ; la folie, de la raison ; la sottise, du bon sens ; l’étourderie, la légèreté, du jugement ; l’imbécillité, de l’entendement ; l’ineptie, de la conception ; l’incapacité, de l’intelligence ; la stupidité, du génie.

ÉTONNEMENT, SURPRISE, CONSTERNATION. L’étonnement est dans les sens ; la surprise, dans l’esprit ; la consternation, dans le cœur. Étonnement dit plus que surprise, dont il est l’effet ; car toutes les surprises ne causent pas de l’étonnement, de l’émotion.

ÉTONNEMENT, ÉMOTION. Ces mots se disent de l’agitation de l’âme, de l’esprit ; étonnement ne se dit que de l’esprit ; il est la cause, et l’émotion en est l’effet.

ÉTOUFFER, SUFFOQUER. Ce qui ôte la respiration suffoque. Les noyés sont suffoqués ; on étouffe dans un air trop dense.

ÉTOURDI, ÉVENTE, ÉVAPORE, ECERVELÉ. L’étourdi est celui en qui la vivacité du caractère nuit à la réflexion, il peut se corriger ; l’évaporé est celui qui par sa légèreté d’esprit est privé de la faculté de réfléchir ; l’éventé enchérit sur ce dernier, et n’a ni idée, ni esprit ; l’écervelé est celui dont la fougue du caractère, des passions, etc., annulle tout jugement.

ÉTROIT, STRICT. Étroit est du discours ordinaire ; strict est du style savant. Strict est d’une précision plus rigoureuse qu’étroit ; étroit est d’ut : usage plus général an propre comme au figuré. Strict ne s’emploie qu’au moral et en théologie on dit une stricte probité, le sens strict.

ÉVADER (s'), ÉCHAPPER (s'), ENFUIR (s'). S’évade se fait en secret ; s’échapper suppose qu’on a déj ; été pris, ou qu’on est près de l’être ; s’enfuir ne suppose aucune de ces conditions. On s’évade d’une prison, on s’échappe des mains de quel qu’un ; on s’enfuit après une bataille perdue.

ÉVEILLER, RÉVEILLER. Éveiller exprime l’action simple de tirer de l’état du sommeil ; réveiller