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et Saxon, le grammairien, les cite également dans son histoire. Convenons donc que les premiers chapitres des annales de tous les peuples, ont été tirés de ces espèces de poëmes ; c’est pourquoi on les voit remplis de fables et de fictions. Eginhard rapporte[1] que Charlemagne fit former un recueil de toutes les œuvres des bardes saxons ; mais on ne sait pas ce que cette collection peut être devenue, à moins que ce ne soit celle dans laquelle Crantz paraît avoir puisé. Les bardes jouissaient de la plus grande considération : ils possédaient des terres qui étaient exemptes de toute imposition, et on les comblait d’honneurs[2]. Leurs fonctions étaient d’inciter les hommes à combattre pour la liberté, à défendre la patrie, et après la victoire ils célébraient les vainqueurs, et flétrissaient la mémoire des lâches qui avaient fui. On croit qu’en temps de paix leurs chants ont contribué à adoucir un peu les mœurs, à diminuer la barbarie, enfin à ébaucher l’homme social. La poésie des bardes était dans le genre de celle de Tyrtée, dont il nous reste quelques fragmens : mais s’ils en avaient la chaleur et la force, ils n’en avaient pas les grâces. On peut s’en convaincre eu lisant le barde Ossian, fils de Fingal, poëte écossais du 3e siècle, selon les uns, et du 5e selon les autres. Quelques auteurs ont placé ce poëte, qui est maintenant très-à la mode, entre Homère et Virgile. On avait d’abord cru que ses ouvrages avaient été supposés, soit par James

  1. Vit. Carol., cap. 29.
  2. En Irlande, les bardes avaient, outre la possession des terres, le droit de se faire nourrir pendant six mois aux frais du public, d’aller loger où ils le jugeaient à propos, et de mettre les habitans à contribution. Cet ordre, car c’en était véritablement un dans l’état, se soutint long-temps avec splendeur, et dura jusqu’au règne d’Edouard Ier, qui fit massacrer tout ce qui en restait. Cet événement a fourni à Gray le sujet d’une belle ode. Voyez Noël, dict. de la fable, au mot Bardes.