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CXLVIII
PRÉCIS HISTORIQUE,

peut-être est-ce le cas de dire ab uno disce omnes. Leur luxe, dans ces maisons appelées templeries, était tout agricole : on trouva dans l’une de leurs commanderies, qui était une véritable ferme, 14 vaches, 5 génisses, 2 bœufs, 290 moutons et brebis, 105 porcs, 8 jumens, 11 poulains et le palefroy du commandeur. Du reste, rien de brillant, point d’ameublement marquant ; les chapelles n’avaient qu’un calice et qu’un seul ornement. Mais le duc de Normandie et les seigneurs de cette province leur avaient fait beaucoup de dons, comme tous les princes et seigneurs de la chrétienté, et leur richesse fut le plus grand si ce n’est leur seul crime. Jean-sans-Terre, particulièrement, avait surpassé tous les autres princes à cet égard : il leur assura tous les ans, dit M. l’abbé de la Rue[1], un marc d’argent par chaque vicomte de l’Angleterre, rapportant cent livres à son domaine ; et de plus, une coupe d’argent du poids d’un marc, par chaque ville, château ou terre en Normandie, dans le Maine, l’Anjou, la Touraine, le Poitou et la Gascogne, lui produisant un revenu de même valeur : il fait, dit-il, cette donation aux pauvres chevaliers du Christ.

L’altération des monnaies, si fréquente alors, avait également sa source dans des besoins sans cesse renaissans. Le droit de battre monnaie était un privilège de féodalité que possédaient seuls les grands vassaux, les barons : plus de quatre-vingts seigneurs jouissaient de ce droit en France, notamment les comtes du Maine ; le roi seul pouvait faire battre de la monnaie d’or et d’argent. De l’un des côtés de la monnaie était une croix, et de l’autre des piliers, d’où est venue l’expression, qui subsiste encore, de croix et piles, quoiqu’on ne rencontre plus ces signes sur les pièces que nous connaissons. Avant Charles VI, les monnaies étaient parsemées de fleurs de lys sans nombre, du côté opposé à l’effigie : elles furent réduites à trois sous son règne, peut-être même sous

  1. Essais historiques sur la ville de Caen, t. II, p. 404.