Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, IV.djvu/341

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de temps à autre lorsqu’il pleut, ou qu’on veut avoir fait la Sala, avant que de se mettre au lit : mais un iman logé, vêtu, nourri dans son hôtel, avec des appointements ! cela ne va point à Bibicosa. Je connais ses affaires. La pauvre femme n’a pas six mille sequins de revenu ; et vous prétendez qu’elle en donnera deux mille à un iman ? Voilà t-il pas qui est bien imaginé !…

« — De par Brama, j’en suis fâché, répliqua l’homme saint ; car voyez-vous, si j’avais été son iman, je n’aurais pas tardé à lui devenir plus nécessaire : et quand on est là, il vous pleut de l’argent et des pensions. Tel que vous me voyez, je suis du Monomotapa, et je fais très bien mon devoir…

« — Eh ! mais, lui répondit Amine d’une voix entrecoupée, votre affaire n’est pourtant pas impossible. C’est dommage que le mérite dont vous parlez ne se présume pas…

« — On ne risque rien à s’employer pour les gens de mon pays, reprit l’homme du Monomotapa ; voyez plutôt… »

« Il donna sur-le-champ à Amine la preuve complète d’un mérite si surprenant, que de ce moment vous perdîtes, à ses yeux, la moitié de ce qu’elle vous prisait. Ah ! vivent les gens du Monomotapa ! »

Alibeg et Nassès avaient la physionomie allongée, et se regardaient sans mot dire ; mais, revenus de leur étonnement, ils s’embrassèrent : et jetant sur Amine un regard méprisant, ils coururent se prosterner aux pieds du sultan, et le remercier de les avoir détrompés de cette femme et de leur avoir conservé la vie et l’amitié réciproque. Ils arrivèrent dans le moment que Mangogul, de retour chez la favorite, lui faisait l’histoire d’Amine. Mirzoza en rit, et n’en estima pas davantage les femmes de cour et les bramines.

CHAPITRE XLVI.

sélim à banza.

Mangogul alla se reposer au sortir du bal ; et la favorite, qui ne se sentait aucune disposition au sommeil, fit appeler Sélim, et le pressa de lui continuer son histoire amoureuse. Sélim obéit, et reprit en ces termes :