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cela lui arrivait quelquefois, que de perdre un quart d’heure à les chercher. La lettre de Ramsay ne fut donc point communiquée à Beccaria, à qui elle aurait pu être très-utile ; et Diderot ne l’a même retrouvée, ainsi que sa traduction, que longtemps après, lorsqu’il projeta de recueillir tous ses ouvrages, de les revoir, de les corriger, et d’en préparer une édition complète.




LETTRE DE M. DE RAMSAY


Peintre du roi d’Angleterre,


À M. DIDEROT.


Il y a environ un mois que je vous envoyai, par mon très-digne ami M. Burke, un exemplaire des Leçons de Sheridan, les Odes de Grey, avec le portrait gravé de M. Bentley. Je compte qu’ils vous seront parvenus ; mais si par quelque accident ils s’étaient égarés, je vous prie de me le faire savoir, afin qu’on puisse les recouvrer, ou vous en envoyer d’autres.

Voilà ce qu’un marchand appellerait le nécessaire ; mais le nécessaire est bien court entre ceux qui trafiquent d’esprit. Si l’on se réduit au nécessaire absolu, adieu la poésie, la peinture, toutes les branches agréables de la philosophie, et salut à la nature de Rousseau, à la nature à quatre pattes. Afin donc que cette lettre ne ressemble pas tout à fait à une lettre d’avis, j’y ajouterai quelques réflexions sur le traité Dei delitti e delle pene, dont vous et M. Suard me parlâtes chez M. le baron d’Holbach, lors de mon séjour à Paris.

Je n’ai fait qu’une légère lecture de ce Traité, et je me propose de le relire plus attentivement à mon premier loisir. À en juger au premier coup d’œil, il me paraît renfermer plusieurs observations ingénieuses, entre lesquelles quelques-unes pourraient peut-être avoir le bon effet qu’en attend l’auteur, plein d’humanité. Mais à considérer cet ouvrage comme un système, j’en trouve les fondements bien incertains, bien en l’air, pour y bâtir rien de solide et d’utile, à quoi l’on puisse se fier. La notion d’un contrat social où l’on montre le pouvoir souverain comme résultant de toutes les petites rognures de la liberté de