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ET L’ATLANTIDE.

Quant à la langue de ces peuples, Diodore de Sicile nous apprend qu’on donnait aux Nymphes le nom d’Atlantides, parce que dans la langue des Atlantiques, le mot Nymphé signifiait femme, et M. Baer remarque très-bien que Nymphé dans la langue hébraïque signifie nouvelle mariée, et que la racine de nymphe est Nuph, distiller, tomber en gouttes, qui va très-bien aux Nymphes ; pour aux nouvelles mariées ce n’est pas mon affaire.

Un Jupiter, oncle paternel d’Atlas, eut dix fils qu’on nomma les Curètes. Or ce mot Curètes est tout à fait hébreu ; il signifie district, famille.

Tant que les Atlantiques demeurèrent fidèles à leurs lois, à leurs chefs et à leurs dieux, ils furent riches, puissants et heureux ; mais lorsqu’ils eurent perdu leur innocence et oublié leur devoir, les dieux irrités s’assemblèrent ; et on ne sait pas ce qu’ils firent ; car le reste du dialogue de Platon nous manque. Hiatus valde deflendus. Ce qui n’empêche pas M. Baer de croire et d’assurer que le sort des Atlantiques fut le même que celui des Israélites corrompus ; et moi qui n’aime pas à disputer, j’y consens.

Lorsque vous réfléchirez, mon ami, que s’il y avait seulement dans tout l’alphabet de deux peuples, deux caractères communs et désignant les mêmes sons, il y aurait plus d’un million à parier contre un, que ces deux peuples ont communiqué par quelque endroit, et que vous vous rappellerez combien il y a de ressemblance entre le récit de Moïse et celui de Platon, vous ne douterez point que vraiment l’Atlantide des prêtres de Sais, ne soit la Palestine de la Bible. Eh bien, mon ami, parcourez les extraits des dialogues du Timée et du Critias de Platon que M. Baer a très-maladroitement ajoutés à la fin de son ouvrage et je veux mourir si vous ne regardez l’auteur comme un enfant qui s’amuse à observer les nuées à la chute du jour. Le jour est bien tombé depuis environ deux mille cinq cents ans que Platon écrivait, et M. l’aumônier de Suède a vu dans les nuées de l’auteur grec, tout ce qu’il a plu à son imagination, aidée de beaucoup de connaissances, d’étude et de pénétration. Excellent mémoire à lire pour apprendre à se méfier des conjectures des érudits.

Mais je m’aperçois, mon ami, que je me suis arrêté trop