cord avec la nature ; il faut que je puisse dire : « Je n’ai pas vu ce phénomène, mais il est. »
Comme la poésie dramatique, l’art a ses trois unités : de temps, c’est au lever ou au coucher du soleil ; de lieu, c’est dans un temple, dans une chaumière, au coin d’une forêt ou sur une place publique ; d’action, c’est ou le Christ s’acheminant sous le poids d’une croix au lieu de son supplice, ou sortant du tombeau vainqueur des enfers, ou se montrant aux pèlerins d’Emmaüs.
L’unité de temps est encore plus rigoureuse pour le peintre que pour le poëte ; celui-là n’a qu’un instant presque indivisible.
Les instants se succèdent dans la description du poète, elle fournirait à une longue galerie de peinture. Que de sujets depuis l’instant où la fille de Jephté vient au-devant de son père, jusqu’à celui où ce père cruel lui enfonce un poignard dans le sein !
Ces principes sont rebattus ; où est le peintre qui les ignore ? Où est le peintre qui les observe ? On a tout dit sur le costume, et il n’y a peut-être aucun artiste qui n’ait fait quelque faute plus ou moins lourde contre le costume.
Avez-vous vu la sublime composition où Raphaël lève avec la main de la Vierge le voile qui couvre l’Enfant Jésus, et l’expose à l’adoration du petit saint Jean qui est agenouillé à côté d’elle[1] ? Je disais à une femme du peuple :
« Comment trouvez-vous cela ?
— Fort mal.
— Comment, fort mal ? mais c’est un Raphaël.
— Eh bien, votre Raphaël n’est qu’un âne.
— Et pourquoi, s’il vous plaît ?
- ↑ Ce tableau se trouve au Musée ; il a été gravé par A. Boucher, Desnoyers, et F. Poilly. (Br.)