Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, XIX.djvu/359

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pression ; un amour de la vérité porté aussi loin qu’il est possible ; la connaissance des affaires de son empire, comme vous l’avez de votre maison : je vous dirai tout cela, mais quand ? Ma foi, je voudrais bien que ce fût sous huitaine, car il en faut moins pour arriver de La Haye à Paris du train dont je suis revenu de Pétersbourg à La Haye ; mais Sa Majesté Impériale et le général Betzky, son ministre, m’ont chargé de l’édition du plan et des statuts des différents établissements que la souveraine a fondés dans son empire pour l’instruction de la jeunesse et le bonheur de tous ses sujets. J’irai le plus vite que je pourrai, car vous ne doutez pas, bonnes amies, que je ne sois aussi pressé de me restituer à ceux qui me sont chers qu’ils peuvent l’être de me revoir. Sachez, en attendant, qu’il s’est fait trois miracles en ma faveur : le premier, quarante-cinq jours de beau temps de suite, pour aller ; le second, cinq mois de suite dans une cour, sans y donner prise à la malignité ; et cela, avec une franchise de caractère peu commune et qui prête au lorquet des courtisans envieux et malins ; le troisième, trente jours de suite d’une saison dont on n’a pas d’exemple, pour revenir, sans autre accident que des voitures brisées : nous en avons changé quatre fois. Combien de détails intéressants je vous réserve pour le coin du feu ! Je commence à perdre les traces de vieillesse que la fatigue m’avait données ; il me serait si doux de vous retrouver avec de la santé, que je me flatte de cette espérance. Je compte beaucoup sur les soins de Mme de Blacy, et sur ceux de Mme Bouchard ; je les salue et les embrasse toutes deux. Mme Bouchard, qui ne pardonne pas aisément une bagatelle, me permettra apparemment de garder un long et profond ressentiment d’un mal qui ne m’a pas encore quitté. La première fois que vous verrez M. Gaschon, dites-lui que si son affaire n’est pas faite, ce n’est pas que je l’aie oubliée ; les circonstances n’étaient guère propres au succès dans un pays où la souveraine calcule. J’ai vu Euler, le bon et respectable Euler, plusieurs fois : c’est l’auteur des livres dont votre neveu a besoin. J’espère qu’il sera satisfait. La princesse de Galitzin en avait fait son affaire avant mon départ, et depuis mon arrivée, le prince Henri s’en est chargé. Vous me direz : Pourquoi se reposer sur d’autres de ce qu’on peut faire soi-même ? C’est que l’édition d’un des volumes publiés à Pétersbourg est épuisée, et que l’édition de l’autre