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seur ; & en les retenant avec des chevilles & de la colle forte que l’on applique toute chaude dessus : ce que l’on appelle communément coller & cheviller, tel qu’on le voit en C, même fig. L’autre, fig. 2, en les assemblant à tenon A, & à mortaise B ; cet assemblage se fait en perçant dans l’épaisseur du bout B, d’un de ces deux morceaux de bois, un trou méplat qu’on appelle mortaise, avec un bec-d’âne, fig. 77, & un ciseau, fig. 75, & en entaillant le bout A de l’autre morceau de bois du tiers de son épaisseur de chaque côté ; & laisser par-là de quoi remplir la mortaise B ; ce qu’on appelle tenon. On fait entrer ensuite le tenon dans la mortaise, que l’on colle & que l’on cheville, si on le juge à propos. Mais ordinairement lorsque le tenon & la mortaise sont bien dressés, & qu’ils entrent bien juste l’un dans l’autre, on se contente de les cheviller sans les coller ; afin que si par la suite il étoit nécessaire de démonter cet assemblage, on n’ait que les chevilles à ôter pour les séparer. On a toujours soin lorsque l’on fait ces sortes d’ajustemens, de tenir le tenon A plus d’un côté que de l’autre, afin qu’il puisse rester à l’extrémité de la mortaise B, une épaisseur de bois qui puisse la soutenir, & de la rendre plus ferme. Il faut observer encore de tenir ce tenon A, un peu plus épais que la troisieme partie de l’épaisseur du bois ; parce que de ces trois parties, le tenon n’en a qu’une, & la mortaise en a deux, & que deux sont plus forts qu’une. Il arrive quelquefois que ce même tenon A ne traverse pas la mortaise B, comme on le voit dans les fig. 3 & 4 ; ce qui rend cet assemblage beaucoup plus propre, & non moins solide.

Le second assemblage, fig. 3. 4. & 5. se nomme à bouement, & se fait à tenons & à mortaises comme le précédent ; à l’exception que les moulures ou les cadres de ses paremens sont coupés en onglet[1]. Il y en a de trois sortes. La premiere, fig. 3. est appellée à bouement simple, parce qu’elle n’a de moulure A que d’un côté. La seconde, fig. 4. est appellée à bouement double, parce qu’elle en a des deux côtés. Et la troisieme, fig. 5. est appellée à bouement double de chaque côté, parce les moulures A sont doubles des deux côtés. La mortaise est ici percée à jour ; & comme il s’y trouve un tenon de chaque côté, ils ne contiennent chacun que la moitié de l’épaisseur du bois.

Le troisieme assemblage, fig. 6. 7. & 8. se nomme à queue d’aronde ; c’est une espece d’ajustement à tenons & à mortaises ; mais qui differe des précédentes, en ce que les tenons A s’élargissent en approchant de leurs extrémités, & qu’ils comprennent toute l’épaisseur du bois, & les mortaises sont faites comme les tenons. Il y en a de trois sortes : La premiere, fig. 6. que l’on appelle à queue d’aronde seulement, sert quelquefois à entretenir de fortes pieces de bois pour les empêcher de se déranger de leurs places, lorsqu’elles sont posées. Aussi cet assemblage n’est-il pas des plus solides, parce qu’il coupe le bois transversalement. La seconde, fig. 7. se nomme à queue perdue, parce que ces especes de tenons A sont perdus dans l’épaisseur du bois, & qu’ils se trouvent recouverts par un joint B en onglet, qui rend cet ajustement fort propre. La troisieme, fig. 8. se nomme à queue percée, parce que les tenons A entrent dans les mortaises B, & traversent l’épaisseur du bois. Cet assemblage seroit fort solide, & plus que le précédent, si ce qui reste de bois C entre chaque mortaise ne se trouvoit pas à bois debout[2] ; & que

le bois disposé de cette maniere n’a aucune force, & est sujet à s’éclater d’une façon ou d’une autre. C’est pourquoi les bons ouvriers ont soin de choisir pour cet effet des morceaux de bois noueux dans cet endroit, & propres à cela, afin de donner à ces intervalles plus de fermeté. Celui qui porte les tenons, n’a pas besoin de ces précautions, en observant toujours de le disposer à bois de fil[3].

Le quatrieme assemblage, fig. 9. se nomme à clé. Il sert ordinairement à joindre deux morceaux de bois ou planches l’une contre l’autre, ainsi que pour les emboîtures, fig. 14. comme nous le verrons ci-après. Ce n’est autre chose qu’une mortaise A fig. 9. percée de chaque côté, dans l’une desquelles on chasse à force[4] une espece de tenon, collé, chevillé & retenu à demeure d’un côté, & par l’autre chevillé seulement, pour donner la liberté de démonter cet assemblage lorsqu’on le juge à propos. On en peut placer dans la longueur de deux planches que l’on veut joindre ensemble, autant qu’il est nécessaire pour les entretenir.

Le cinquieme assemblage, fig. 10. & 11. se nomme un onglet ou anglet. C’est une espece d’assemblage quarré, plus long à faire & moins solide que les autres ; raison pour laquelle on s’en sert fort peu. Il s’en fait cependant de deux sortes : l’une fig. 10. dont l’extrémité A du bois est taillée quarrement d’un côté, & à onglet de l’autre. Et l’autre B est percée d’une espece de mortaise à jour, dont un côté est aussi en onglet. La seconde sorte en onglet, fig. 11. s’assemble simplement à tenons & à mortaises dans l’angle : mais il est mieux de le faire, comme ceux des assemblages quarrés.

Le septieme assemblage, fig. 13. se nomme en adent. Il sert à joindre des planches l’une contre l’autre, à l’usage des lambris, panneaux de portes, &c. On l’appelle plus communément assemblage à rainure & languette, parce qu’il est composé d’une rainure A faite avec les bouvets, fig. 105. 190 & 111. & d’une languette faite avec celui fig. 107.

Le huitieme & dernier assemblage, fig. 14. se nomme en emboîture. Il est composé d’une emboiture A, sur laquelle on fait une rainure B d’un bout à l’autre, dans laquelle entre la languette C. Cette emboiture se trouve percée de distance en distance, de mortaises D dans lesquelles s’ajustent des clefs E, chevillées seulement, pour retenir de part & d’autre plusieurs planches E, assemblées à rainures & languettes, comme nous venons de le voir, à l’usage des tables, des portes, &c.

Des lambris. Les lambris de menuiserie sont très en usage, & d’une plus grande utilité en France & dans les pays voisins du Nord que dans les pays chauds ; car dans ceux-là, ils échauffent les pieces, les rendent seches, & conséquemment salubres, & habitables peu de tems après leur construction ; au-lieu que dans ceux-ci, ils font perdre une partie de la fraîcheur des appartemens, & les insectes, en abondance, s’y amassent & s’y multiplient. Ils n’ont pas le seul avantage d’économiser des meubles dans les pieces d’une moyenne grandeur, & dans celles qui sont les plus fréquentées : ils ont encore celui de corriger leurs défauts : comme des irrégularités, biais, enclaves, causés par des tuyaux de cheminées, murs mitoyens, ou par la décoration extérieure des bâtimens, sur lesquels on adosse des armoires, dont les guichets conservent la même symmétrie que le reste des lambris. Les bâtis[5] qui

  1. Un morceau de bois coupé en onglet, ou à quarante-cinq degrés, c’est la même chose.
  2. Le bois debout, dans de certains ouvrages, comme, par exemple, dans des tenons ou mortoises, est lorsque les fibres du bois sont disposées sur la largeur ou l’épaisseur de ces mêmes tenons ou mortoises, & non sur la longueur.
  3. Le bois de fil est lorsque les fibres du bois sont disposées sur la longueur des ouvrages.
  4. Chasser à force, c’est frapper jusqu’à ce que ce qui est frappé ne puisse plus entrer sans rompre quelque chose.
  5. Un bâti de panneaux est le chassis sur lequel il est assemblé.