Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 10.djvu/371

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ques. Le 3 Mai 1661, l’auteur des tables carolines observa à Londres avec M. Huyghens le passage de Mercure sur le soleil. En 1677, le 28 Octobre, vieux style, M. Halley eut le premier l’avantage d’observer dans l’île de Sainte Hélene l’entrée & la sortie de Mercure sur le Soleil ; ce qui donnoit la position du nœud d’une maniere beaucoup plus précise qu’on ne l’avoit établi par les observations de 1631 & 1661, ces deux premieres n’étant pas d’ailleurs aussi complettes à beaucoup près qu’on pouvoit le desirer.

Cependant quoique Mercure ait été vû encore deux fois depuis ce tems-là sur le Soleil, ce n’a été qu’en 1723 que M. Halley s’est déterminé à publier ses élémens des tables de cette planete, dont on peut dire que le mouvement est assez exactement connu aujourd’hui. On peut s’en assûrer en comparant ces élémens à deux autres observations du passage de Mercure sur le Soleil faites en 1736 & 1743, & qui ont été aussi complettes qu’on pouvoit le desirer.

Selon M. Newton, le mouvement de l’aphélie de Mercure seroit beaucoup plus lent que ne supposent les Astronomes, ce qui ne doit pas nous étonner, Mercure n’ayant jamais été si souvent ni si exactement observé que les autres planetes. Ce mouvement, suivant M. Newton, est d’environ 52″ par an. Le mouvement du nœud, déterminé par M. Halley, d’après ses observations des passages de Mercure par le Soleil en cent ans de 1°. 26′. 35″. selon la suite des signes.

L’excentricité de cette planete est très-considérable, & sa plus grande équation du centre est, selon M Halley, de 24°. 42′. 37″. Cependant les Astronomes sont encore partagés là-dessus, & cet élément de sa théorie est celui qui paroît jusqu’à présent le moins connu. Il n’en est pas de même de l’inclinaison de son orbite au plan de l’écliptique, M. Halley l’a établie par des observations décisives & fort exactes de 6°. 59′. 20″.

M. Halley, dans la dissertation qu’il a donnée sur l’observation du passage de Mercure faite dans l’île de Ste Hélene en 1677, a prédit les différens passages qui doivent être observées jusqu’au xix. siecle ; suivant le calcul de cet astronome, Mercure doit être vû dans le Soleil proche de son nœud ascendant au mois d’Octobre des années 1756, 1769, 1770, 1782, 1789, & proche de son nœud descendant au mois d’Avril des années 1753, 1786, 1799. Voyez Passage. Chambers, Wols, & Inst. astr. de M. le Monnier.

M. le Monnier, dans l’assemblée publique de l’académie des Sciences d’après Pâques 1747, a lu un mémoire qui contient les élémens de la théorie de Mercure, déterminés avec l’exactitude qu’on sait qu’il apporte dans l’Astronomie. (O)

Mercure, en Physique, se prend pour le mercure du barometre dans les expériences de Toricelly. Voyez Barometre.

Quoique le mercure ne se soutienne ordinairement dans le barometre qu’à la hauteur de 28 à 29 pouces, cependant M. Huyghens a trouvé que si on enferme le mercure bien purgé dans un lieu bien fermé & à l’abri de toute agitation, il se soutiendra alors à la hauteur de 72 pouces, phénomene dont les Philosophes ont assez de peine à rendre raison. M. Muschenbroeck, dans son Essai de Physique, l’attribue à l’adhésion du mercure aux parois du verre, & dit, pour appuyer son sentiment, que lorsqu’on secoue un peu le tuyau, le mercure se détache, & retombe à la hauteur de 29 pouces. Voyez Barometre. (O)

Mercure ou Vif-argent, (Hist. nat. Minéralogie, Chimie, Métallurgie & Pharmacie.) en latin,

mercurius, argentum vivum, hydrargyrum. Le mercure est une substance métallique fluide, d’un blanc brillant, semblable à de l’étain fondu ; le mercure est, après l’or & la platine, le corps le plus pesant de la nature, cela n’empêche pas qu’il ne se dissipe entierement au feu. Quelques auteurs placent le mercure au rang des métaux, d’autres le regardent comme un demi-métal ; mais la fluidité qui le caracterise fait qu’il paroît n’appartenir ni aux métaux, ni aux demi-métaux, quoiqu’il ait des propriétés communes avec les uns & avec les autres. Il paroît donc plus naturel de le regarder comme une substance d’une nature particuliere.

Le mercure se trouve en deux états différens dans le sein de la terre ; ou il est tout pur & sous la forme fluide qui lui est propre, & alors on le nomme mercure vierge, parce qu’il n’a point éprouvé l’action du feu pour être tiré de sa mine ; ou bien il se trouve combiné avec le soufre, & alors il forme une substance d’un rouge plus ou moins vif que l’on nomme cinnabre. Voyez cet article, où l’on a décrit les différentes especes de cinnabre, & la maniere dont on en tire le mercure ; il nous reste donc simplement à parler ici du mercure vierge, & de la maniere dont il se trouve.

De toutes les mines de mercure connues en Europe, il n’en est point de plus remarquables que celles d’Ydria dans la Carniole, qui appartient à la maison d’Autriche. Ces mines sont dans une vallée au pié de hautes montagnes, appellées par les Romains Alpes Juliæ. Elles furent découvertes par hasard en l’année 1497. On dit qu’un ouvrier qui faisoit des cuves de bois, ayant voulu voir si un cuvier qu’il venoit de finir étoit propre à tenir l’eau, le laissa un soir au bas d’une source qui couloit ; étant revenu le lendemain & voulant ôter sa cuve, il trouva qu’elle étoit si pesante, qu’il ne pouvoit point la remuer ; ayant regardé d’où cette pesanteur pouvoit venir, il apperçut qu’il y avoit sous l’eau une grande quantité de mercure qu’il ne connoissoit point ; il l’alla porter à un apothicaire qui lui acheta ce mercure pour une bagatelle, & lui recommanda de revenir lorsqu’il auroit de la même matiere : à la fin cette découverte s’ébruita, & on en avertit l’archiduc d’Autriche, qui se mit en possession de ces mines, dont les princes de cette maison se sont jusqu’à présent fait un revenu très-considérable.

Les mines d’Ydria peuvent avoir environ neuf cens piés de profondeur perpendiculaire ; on y descend par des bures ou puits, comme dans toutes les autres mines ; il y a une infinité de galeries sous terre, dont quelques-unes sont si basses, que l’on est obligé de se courber pour pouvoir y passer, & il y a des endroits où il fait si chaud que, pour peu qu’on s’y arrête, on est dans une sueur très-abondante. C’est de ces souterreins que l’on tire le mercure vierge ; quelques pierres en sont tellement remplies, que lorsqu’on les brise, cette substance en sort sous la forme de globules ou de gouttes. On le trouve aussi dans une espece d’argille, & quelquefois l’on voit ce mercure couler en forme de pluie & suinter au-travers des roches qui forment les voûtes des souterreins, & un homme a souvent été en état d’en recueillir jusqu’à 36 livres en un jour.

Quant à la mine de mercure ou roche qui contient le mercure vierge, on la brise avec des marteaux, & on en fait le lavage, ainsi que de l’argille qui en est chargée ; à l’égard des pierres qui n’en contiennent qu’une petite quantité, on les écrase sous des pilons, & on les lave ensuite pour en dégager la partie terreuse & pierreuse la plus légere, & qui ne renferme plus de mercure ; après quoi on porte cette mine lavée dans un magasin. On ne travaille dans les souterreins que pendant l’hiver, alors on amasse