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siége. Voyez là-dessus sa Dissert. sur la morve, imprimée en 1761.

Morve, s. f. (Jardinage.) maladie qui survient aux chicorées & aux laitues ; c’est une espece de pourriture dont le nom a été fait de son aspect. On dit aussi morver.

MORVEDRO, ou MORVIÉDRO (Géogr.) ancienne ville d’Espagne au royaume de Valence. Ce sont les restes de la fameuse & infortunée Sagonte, bâtie par les Zacynthiens, qui lui avoient donné le nom de leur patrie. On l’appelle aujourd’hui Morvedro, en latin, Muri veteres, à cause des vieilles murailles qui s’y trouvent, & qui nous rappellent encore par ces tristes vestiges une partie de la grandeur de l’ancienne Sagonte. On y voit en entrant sur la porte de la ville une inscription à demi-effacée, en l’honneur de Claude II. successeur de Galien. A une autre porte on voit une tête d’Annibal faite de pierre. Près de la cathédrale se voyent les restes d’un vieil amphitéâtre de 357 piés d’étendue, avec 26 bancs l’un sur l’autre taillés dans le roc ; & ces bancs & les voûtes étoient d’une structure si solide, qu’ils se sont conservés depuis tant de siecles.

Morvedro est située à 2 milles de la mer, sur un rocher élevé, au bord d’une riviere qui porte son nom, & quelquefois celui de Turulis, à 4 lieues de Valence. Long. 17. 36. lat. 39. 44. (D. J.)

MORVEUX, (Maréchall.) On appelle ainsi un cheval qui a la morve. Voyez Morve.

MORRIS, s. m. (Comm. & Hist. mod.) nom propre d’une monnoie d’Espagne. Le morris étoit d’or ; ce fut le roi Alfonce le sage qui le fit battre. Morris est dit par corruption de maravedis.

MORUNDA, (Géog. anc.) Ptolomée nomme deux villes de ce nom, l’une en Médie, l’autre dans l’Inde, en-deçà du Gange. (D. J.)

MORVOLANT, s. m. en terme de Blondier, c’est de la soie mêlée qui tombe dans le déchet, & qui empêche la suite du devidage.

MORXI, s. m. (Medecine.) nom d’une maladie pestilentielle commune dans le Malabar & dans plusieurs autres contrées des Indes orientales.

MOSA, (Géogr. anc.) nom latin de la Meuse ; nous en avons parlé suffisamment sous le nom moderne, autant du-moins que le plan de cet ouvrage le permet. Nous ajouterons ici que depuis César jusqu’à nous le cours de ce fleuve a éprouvé bien des changemens. Il est arrivé que cette grande riviere, qui charrie sans cesse avec elle quantité de limon, a nécessairement bouché son lit en plusieurs endroits, & fait ailleurs des attérissemens considérables. Si à ces causes l’on joint les débordemens ordinaires du Rhin, & dont la Meuse reçoit sa part par le Wahal, on n’aura pas de peine à comprendre que d’un côté elle a pu changer de cours, & que de l’autre elle a dû porter à son embouchure de nouvelles terres dans des lieux que la mer couvroit auparavant. C’est ce que M. Van-Loon a savamment exposé dans son livre des antiquités des Bataves ; j’y renvoie le lecteur. (D. J.)

Mosa, s. m. (Cuisine.) sorte d’aliment très-commun parmi les paysans d’Allemagne : il est fait avec de la farine de froment ou d’épeautre & du lait, & pareil à ce que nous appellons lait épaissi ou bouillie ; mais sa trop grande quantité nuit aux enfans surtout, à qui elle engorge les vaisseaux du mésentere.

MOSAIQUE et chrétienne philosophie, (Hist. de la Philosophie.) Le scepticisme & la crédulité sont deux vices également indignes d’un homme qui pense. Parce qu’il y a des choses fausses, toutes ne le sont pas ; parce qu’il y a des choses vraies, toutes ne le sont pas. Le philosophe ne nie ni n’admet rien sans examen ; il a dans sa raison une juste

confiance ; il fait par expérience que la recherche de la vérité est pénible, mais il ne la croit point impossible, il ose descendre au fond de son puits, tandis que l’homme méfiant ou pusillanime se tient courbé sur les bords, & juge de là, se trompant, soit qu’il prononce qu’il l’apperçoit malgré la distance & l’obscurité, soit qu’il prononce qu’il n’y a personne. De-là cette multitude incroyable d’opinions diverses ; de-là le doute ; de là le mépris de la raison & de la Philosophie ; de-là la nécessité prétendue de recourir à la révélation, comme au seul flambeau qui puisse nous éclairer dans les sciences naturelles & morales ; de là le mélange monstrueux de la Théologie & des systèmes ; mélange qui a achevé de dégrader la Religion & la Philosophie : la Religion, en l’assujettissant à la discussion ; la Philosophie, en l’assujettissant à la foi. On raisonna quand il falloit croire, on crut quand il falloit raisonner ; & l’on vit éclore en un moment une foule de mauvais chrétiens & de mauvais philosophes. La nature est le seul livre du philosophe : les saintes écritures sont le seul livre du théologien. Ils ont chacun leur argumentation particuliere. L’autorité de l’Eglise, de la tradition, des peres, de la révélation, fixe l’un ; l’autre ne reconnoît que l’expérience & l’observation pour guides : tous les deux usent de leur raison, mais d’une maniere particuliere & diverse qu’on ne confond point sans inconvénient pour les progrès de l’esprit humain, sans péril pour la foi : c’est ce que ne comprirent point ceux qui, dégoûtés de la philosophie sectaire & du pirrhonisme, chercherent à s’instruire des sciences naturelles dans les sources où la science du salut étoit & avoit été jusqu’alors la seule à puiser. Les uns s’en tinrent scrupuleusement à la lettre des écritures ; les autres comparant le técit de Moïse avec les phénomenes, & n’y remarquant pas toute la conformité qu’ils desiroient, s’embarrasserent dans des explications allégoriques : d’où il arriva qu’il n’y a point d’absurdités que les premiers ne soutinsent ; point de découvertes que les autres n’apperçussent dans le même ouvrage.

Cette espece de philosophie n’étoit pas nouvelle : voyez ce que nous avons dit de celle des Juifs & des premiers chrétiens, de la cabale, du Platonisme des tems moyens de l’école d’Alexandrie, du Pithagorico platonico-cabalisme, &c.

Une observation assez générale, c’est que les systèmes philosophiques ont eu de tout tems une influence fâcheuse sur la Médecine & sur la Théologie. La méthode des Théologiens est d’abord d’anathématiser les opinions nouvelles, ensuite de les concilier avec leurs dogmes ; celle des Médecins, de les appliquer tout de suite à la théorie & même à la pratique de leur art. Les Théologiens retiennent long-tems les opinions philosophiques qu’ils ont une fois adoptées. Les Médecins moins opiniâtres, les abandonnent sans peine : ceux ci circulent paisiblement au gré des systèmatiques, dont les idées passent & se renouvellent ; ceux-là font grand bruit, condamnant comme hérétique dans un moment ce qu’ils ont approuvé comme catholique dans un autre, & montrant toujours plus d’indulgence ou d’aversion pour un sentiment, selon qu’il est plus arbitraire ou plus obscur, c’est-à-dire qu’il fournit un plus grand nombre de points de contact, par lesquels il peut s’attacher aux dogmes dont il ne leur est pas permis de s’écarter.

Parmi ceux qui embrasserent l’espece de philosophie dort il s’agit ici, il y en eut qui ne confondant pas tout à fait les limites de la raison & de la foi, se contenterent d’éclairer quelques points de l’Ecriture, en y appliquant les découvertes des Philosophes. Ils ne s’appercevoient pas que le peu de service qu’ils