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voyages du Levant, une espece de moutarde fort jolie, qu’il trouva dans l’île de Sikino : il la nomme sinapi græcum, maritimum, tenuissime laciniatum, flore purpurascente, Coroll. I.R.H. 17. (D. J.)

Moutarde, (Chimie, Diete & Matiere médicale.) La semence de moutarde est la seule partie de cette plante qui soit en usage.

La plante qui la produit est de la classe de celles qui contiennent un alkali volatil spontané, & une des especes de cette classe qui contienne ce principe plus développé, ou pour mieux dire plus concentré, plus abondant.

Tout le monde connoît l’usage diététique de la moutarde, que l’on mange avec presque toutes les viandes rôties ou bouillies, que l’on fait entrer dans diverses sausses, & qui est sur-tout un assaisonnement aussi salutaire qu’agréable, des différens mets tirés du cochon. Cet assaisonnement est actif & échauffant ; il sollicite puissamment les organes de la digestion ; c’est pourquoi il convient singulierement aux estomacs paresseux & aux tempéramens froids, humides, foibles ; au lieu qu’elle peut incommoder ceux qui ont les digestions fongeuses & le tempérament chaud, sec & mobile en général. Cependant elle devient à-peu-près indifférente, par le long usage, à tous les sujets.

On emploie fort rarement cette semence à titre de remede ; on peut cependant y avoir recours dans les cas où les anti-scorbutiques alkalis sont indiqués, comme aux autres substances végétales de cette classe.

Cette semence est un puissant sternutatoire & un masticatoire des plus énergiques. Elle est recommandée principalement sous cette derniere forme contre les menaces de paralysie & d’apoplexie, & pour décharger la tête des humeurs pituiteuses.

La semence de moutarde fournit le principal ingrédient des sinapismes. Voyez Sinapisme.

On tire de la semence de moutarde qui est émulsive, une huile par expression qui ne participe point du-tout de l’âcreté de la semence, & qui possede toutes les qualités communes des huiles par expression, qui est par conséquent très-adoucissante, très-relâchante, lorsqu’elle est récente & tirée sans feu. Ce phénomene parut fort surprenant à Boerhaave, qui rend compte dans ses élémens de chimie des motifs de son étonnement, & des considérations qui le firent cesser. Tout chimiste instruit s’appercevra facilement, que Boerhaave s’étoit embarrassé dans des difficultés qu’il s’étoit lui-même forgées : car il est évident, d’après les notions les plus communes, que les huiles par expression ne participent en rien des qualités des principes renfermées dans leurs enveloppes, & qu’ainsi elles sont également douces, fades, innocentes, soit que ces enveloppes contiennent un alkali volatil très-vif, comme la moutarde, ou une huile essentielle, comme la semence de fenouil ou un extrait narcotique, comme l’écorce de semence de pavot le contient vraissemblablement. (b)

Moutarde, est aussi une composition de graine de senevé, broyée avec du vinaigre ou du moût de vin, dont on se sert pour assaisonner les ragoûts, & qu’on sert sur la table pour en manger avec les différentes viandes. La moutarde de Dijon passe pour la meilleure, & on en fait un grand commerce en France.

La graine de moutarde sert aussi dans la préparation des peaux de chagrin ou d’autres peaux, que les ouvriers passent en chagrin. Voyez Chagrin.

MOUTARDIER, s. m. (Hist. nat. Ornitholog.) grand martinet, hirondoapus, oiseau qui est le plus grand de toutes les especes d’hirondelles ; il a la tête grosse & l’ouverture de la bouche fort grande ; le bec est court, noir, foible, comme dans le

crapaud volant, & applati sur sa largeur vers les narines, qui ont leurs ouvertures longues, obliques, obtuses du côté de la tête, & pointues à l’autre bout. La langue est large & un peu fourchue, les yeux sont grands, & l’iris a une couleur de noisette. Toutes les parties du corps, tant en-dessus qu’en-dessous, n’ont qu’une seule couleur qui est brune avec une teinte de verd obscur ; on voit seulement sous le menton une tache blanchâtre, mêlée de cendré. Il y a dans chaque aîle dix-huit grandes plumes qui se terminent toutes en une pointe, excepté les extérieures : la queue a environ une palme de longueur, elle est composée de dix plumes pointues : celles du milieu sont les plus longues, les autres diminuent successivement de longueur jusqu’aux extérieures. Les pattes sont très-courtes, & les piés très-petits, tous les doigts se dirigent en avant ; le plus petit, dont la direction est ordinairement en arriere dans les autres oiseaux, l’a en avant comme les autres doigts. Cet oiseau pese une once trois quarts, il a quatre pouces & demi de longueur depuis la pointe du bec jusqu’au bout des piés, & six pouces huit lignes jusqu’à l’extrémité de la queue ; son envergure est de quinze pouces & plus, il se nourrit de scarabés & d’autres insectes, il se pose difficilement à terre à cause de la longueur de ses aîles, mais il reste sur les faîtes des vieux édifices. Willughby, Ornit. Voyez Oiseau.

Moutardier, s. m. (Art méchaniq.) celui qui fait & qui vend de la moutarde. Les moutardiers sont de la communauté des maîtres Vinaigriers : il n’est permis qu’à ceux qui sont maîtres de faire & vendre, ou faire vendre dans les rues de la moutarde par leurs garçons. On ne doit employer que de bon senevé & du meilleur vinaigre pour faire de la moutarde, & les moulins dont on se sert pour la broyer doivent être propres & non chansis ; les jurés sont tenus d’y veiller. Voyez Vinaigrier.

Moutardier, s. m. (Econ. domest.) espece de petit vaisseau de bois couvert, que les garçons vinaigriers portent à leurs bras avec une sangle, ou qu’ils roulent sur une brouette, & dans lequel ils mettent la moutarde qu’ils vont crier dans les rues.

Moutardier se dit aussi d’un petit meuble de table, dans lequel on sert la moutarde pour la manger avec la viande : on fait de ces moutardiers d’or, d’argent, de porcelaine, de fayance & d’étain.

MOUTELLE, Voyez Loche franche.

MOUTIER GRAND VAL, (Géog.) en allemand, Monstershal, grande vallée de Suisse, enclavée dans le canton de Bâle. Les habitans de cette vallée, qui comprend plusieurs villages, sont alliés avec le canton de Berne, qui les protege de sa puissance & de ses regards, dans leurs libertés spirituelles & temporelles. (D. J.)

MOUTIERS EN PUISAYE, (Géog.) village de France au diocèse d’Auxerre, à 7 lieues O. d’Auxerre. Je parle de ce village, parce qu’il y a beaucoup d’apparence, qu’étant à-peu-près au centre de la Gaule, c’est dans ces quartiers-là, situés à l’extrémité du pays des Carmites, à quelques lieues de la Loire, que les Druides faisoient les assemblées annuelles, dont parle César. Les forêts couvroient alors ce pays ; les étangs y étoient fort communs, ce qui fit donner à ce territoire le nom celtique de Melered, par lequel on le désignoit dans le huitieme siecle. Un évêque d’Auxerre de ce tems-là bâtit dans ce lieu un hôpital pour y loger les Bretons qui entreprenoient le voyage de Rome, & en même tems il y fonda un monastere, qui depuis ayant été ruiné, fut uni à celui de S. Germain d’Auxerre. (D. J.)

MOUTON, s. m. vervex, animal qui ne differe du bélier, que par la castration, voyez Bélier. Cette