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Flamsteed prit tant de goût pour son nouvel instrument, qu’il abandonna presqu’entierement l’usage du sextant. Telle fut l’occupation de cet astronome durant 30 ans ; pendant tout ce tems il ne fit rien paroître qui répondît à tant de dépenses & d’apprêts ; de sorte que ses observations paroissent avoir été plutôt faites pour lui & pour quelques amis, que pour le public : cependant il étoit certain que les observations qu’il avoit faites étoient en très-grand nombre, & qu’il avoit laissé une prodigieuse quantité de papiers.

C’est ce qui engagea le prince George de Danemark, époux de la reine Anne, à nommer en 1704, un certain nombre de membres de la société royale, savoir MM. Wran, Newton, Gregory, Arbuthnot, pour examiner les papiers de Flamsteed, & en extraire tout ce qu’ils jugeroient digne d’être imprimé, se proposant de le faire paroître à ses dépens ; mais le protecteur de cet ouvrage étant mort avant que l’impression fût à moitié, elle fut interrompue pendant quelque tems, jusqu’à ce qu’enfin elle fut reprise par l’ordre de la reine Anne, qui chargea le docteur Arbuthnot de veiller à l’impression, & le docteur Halley de corriger & de fournir la copie.

Ainsi parut enfin l’histoire céleste, dont la principale partie contient un catalogue des fixes, autrement appellé le catalogue de Greenwich. Voyez Etoile & Astronomie.

La latitude de l’observatoire de Greenwich a été déterminée par des observations très-exactes, de 51d. 28′. 30″. nord.

Après la mort de Flamsteed, sa place fut donnée au célebre M. Halley : elle fut demandée pour lui au feu roi George par les comtes de Maclesfield, chancelier d’Angleterre, & de Sunderland, secrétaire d’état, qui l’obtinrent sur le champ. C’est là que M. Halley a observé le ciel jusqu’en 1740 ; & qu’il a rassemblé entr’autres une très-grande suite d’observations sur les lieux de la Lune, pour les comparer avec ses calculs, & pour réduire enfin à quelque loi le cours bizarre de cet astre. Voyez Lune.

M. Halley étant mort en 1742, on lui a donné pour successeur le celebre M. Bradley son ami, si connu par sa belle découverte de l’aberration des fixes, & par celle de la nutation de l’axe de la Terre. Voyez Aberration & Nutation. L’astronome de Greenwich, qui a le titre d’astronome de sa majesté britannique, est presque le seul savant en Angleterre qui soit pensionné par le gouvernement ; cependant cette nation n’en cultive pas moins les sciences : ce qui prouve, à l’honneur des lettres, que ce ne sont pas toujours les récompenses qui en hâtent le succès.

2°. Le deuxieme observatoire célebre, & qui a même la primauté d’existence sur celui de Greenwich, est celui de Paris, bâti par ordre de Louis XIV. au bout du fauxbourg S. Jacques. Il fut commencé en 1664, & achevé en 1672. C’est un fort beau bâtiment, mais d’une architecture singuliere : les desseins en ont été donnés par Cl. Perrault ; mais les mémoires de Ch. Perrault son frere, imprimés en 1759, nous apprennent que ces desseins n’ont pas été suivis en tout, & on n’en a pas mieux fait. L’observatoire de Paris a 80 piés de haut, & une terrasse au-dessus. C’est là qu’ont travaillé M. de la Hire, M. Cassini, &c. Sa différence en longitude d’avec l’observatoire de Greenwich est de 20. 2′. vers l’ouest.

Dans l’observatoire de Paris il y a une cave à 170 piés de profondeur, destinée aux expériences qui doivent être faites loin du Soleil, & principalement à celles qui ont rapport aux congélations, réfrigérations, &c.

Il y a dans cette même cave un ancien thermome-

tre de M. de la Hire, qui se soutient toujours dans la

même hauteur ; ce qui prouve que la temperature y est toujours la même. Elle est taillée dans le roc, & l’on y voit les pierres couvertes d’une eau qui à la longue se pétrifie : sur quoi voyez Stalactite & Labyrinthe de Candie. Depuis le haut de la plate-forme jusqu’en bas de la cave, il y a une espece de puits dont on s’est servi autrefois pour les expériences de la chûte des corps. Ce puits est une espece de long tuyau de lunette, par lequel on voit les étoiles en plein midi. L’observatoire est garni d’une prodigieuse quantité d’instrumens pour servir aux observations astronomiques. On y a tracé aussi avec beaucoup de soin une méridienne, sur laquelle sont tracés les signes du zodiaque avec leurs divisions. Par malheur ce bâtiment tombe en ruine dans le tems où nous écrivons, & la plûpart de nos astronomes ne l’habitent plus. Il seroit à souhaiter néanmoins qu’on ne laissât pas dépérir un pareil monument.

3°. Le troisieme observatoire célebre, est celui de Tycho-brahé, qui étoit dans la petite île de Ween, ou l’île Scarlet, entre les côtes de Schonen & de Zelande, dans la mer Baltique. Cet astronome avoit fait élever ce bâtiment, & l’avoit fourni d’instrumens à ses dépens, il lui donna le nom d’Uranibourg, & il y passa 20 ans à observer : ses observations produisirent son catalogue & plusieurs autres découvertes utiles à l’Astronomie. Voyez Etoile.

M. Gordon remarque dans les Transactions philosophiques, que l’endroit où étoit l’observatoire de Tycho, n’étoit pas des plus commodes pour certaines observations, principalement pour celles des levers & des couchers, attendu qu’il étoit trop bas, & n’avoit de vue que par trois côtés, & que l’horison n’en étoit pas uni. On trouvera à l’article Uranibourg un plus grand détail sur cet observatoire.

Enfin le quatrieme observatoire est celui de Pekin. Le pere le Comte nous fait la description d’un grand & magnifique édifice qu’un des derniers empereurs de la Chine a fait élever dans cette capitale, à la priere de quelques jésuites astronomes, principalement du pere Verbiest, que l’empereur fit le premier astronome de cet observatoire.

Les instrumens en sont prodigieusement grands, mais ils sont moins exacts par leurs divisions, & moins commodes que ceux des Européens. Les principaux sont une sphere zodiacale armillaire, c’est à-dire, dont les poles sont ceux du zodiaque, de 6 piés de diametre ; une sphere équinoxiale, c’est-à-dire, dont les poles sont ceux de l’équateur, de 6 piés de diametre ; un horison azimutal, de 6 piés de diametre ; un grand quart-de-cercle, de 6 piés de rayon ; un sextant, de 8 piés de rayon, & un globe céleste, de 6 piés de diametre. Chambers. (O)

Observatoire de Greenwich, (Hist. Astr. mod.) c’est une rodomontade d’un étranger établi à Londres, qui a occasionné la belle fondation de l’observatoire de Greenwich. En voici l’histoire qui est fort plaisante.

Le sieur de Saint-Pierre, françois de nation, qui avoit quelque légere connoissance de l’Astronomie, & qui s’étoit acquis la faveur de la duchesse de Portsmouth, ne proposa pas moins que la découverte des longitudes. Il obtint du roi Charles II. une espece de commission à milord Brouneker, aux docteurs Setward, évêque de Salisbury, Christophle Wren, aux chevaliers Charles Scarborough, Jonas Moore, au colonel Titus, au docteur Pell, au chevalier Robert Murray, à M. Hooke, & à quelques autres savans de la ville & de la cour, d’écouter ses propositions ; avec le pouvoir de recevoir parmi eux les autres habiles gens qu’ils jugeroient à propos, & ordre de donner leur avis là-dessus au roi.