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ment que de l’ardeur du climat & de l’action long-tems continuée de la chaleur, elle s’effaceroit peu-à-peu par la température d’un climat froid, & que par conséquent si l’on transportoit des negres dans une province du nord, leurs descendans à la huitieme, dixieme ou douzieme génération, seroient beaucoup moins noirs que leurs ancêtres, & peut-être aussi blancs que les peuples originaires du climat froid où ils habiteroient. Histoire natur. de l’homme, tome III. (D. J.)

Peau des insectes, (Hist. nat. des Insect.) vêtement extérieur que la nature a donné à tous les insectes ; ce vêtement couvre tout leur corps, en lie les parties, les contient dans la place qui leur est assignée.

La peau n’est pas de la même qualité chez tous les insectes, il s’en faut de beaucoup. Ceux dont le genre de vie ne les expose ni à des compressions, ni à des frottemens violens, comme sont les chenilles & plusieurs sortes de vers, ont la peau fort délicate & fort tendre. Quelques-uns en ont plusieurs l’une sur l’autre, à-peu-près comme les différentes peaux d’un oignon. La peau de la plupart des insectes a des pores si petits pour l’usage de leur transpiration, qu’on a de la peine à les appercevoir. D’autres cependant ont les pores de la peau très-larges. Il y a certaines chenilles à cornes dont les pores sont si ouverts, que non-seulement ils donnent passage aux œufs que des petits ichneumons pondent dans leur corps, mais de plus les vers nés de ces œufs peuvent sortir par ces mêmes pores, sans que la peau en paroisse blessée.

Les insectes qui rampent dans les trous, dans les fentes où ils sont exposés à un frottement assez rude, ont la peau plus dure que les autres ; celle de quelques-uns est écailleuse.

La peau sert aux insectes d’un manteau pour les couvrir contre les injures de l’air : elle est pour eux de la même utilité que les écailles sont pour les poissons, les coquilles pour les insectes des coquillages, les plumes pour les oiseaux, & le poil pour la plupart des quadrupede.

Comme les insectes sont d’ordinaire très-petits, l’ardeur du soleil auroit bien-tôt desséché l’humidité intérieure de leurs corps, & épuisé leurs esprits animaux, s’ils n’avoient pas été revêtus d’une peau dure qui les mît à couvert de cet inconvénient.

Elle est l’organe du mouvement de ceux qui n’ont ni piés ni aîles : en l’étendant & la resserrant successivement, par le moyen des muscles ou des anneaux, ils se transportent d’un lieu à un autre.

On sait qu’il y a des animaux qui chaque année changent de peau ; ainsi plusieurs insectes muent, & même un grand nombre de fois.

Puisque la peau des insectes, de même que celle des autres animaux, varie extrèmement, & qu’on en trouve parmi les uns & les autres qui l’ont tendre, dure, robuste, lisse, chagrinée, coriace, épaisse, mince, velue, rase, épineuse, &c. il résulte que ce n’est pas dans la qualité de la peau qu’il faut chercher des caracteres propres à distinguer les insectes des autres animaux ; mais ce seroit plutôt dans la mutation de cette peau qu’on pourroit chercher ces caracteres ; c’est du-moins une chose remarquable, que les quadrupedes, les oiseaux & les poissons ne quittent jamais leur peau, & que la plûpart des insectes, de même que des reptiles, en changent plusieurs fois. (D. J.)

Peau, maladies de la, (Médec.) les maladies de la peau sont toutes caractérisées par quelque éruption plus ou moins sensible, plus ou moins élevée qui en change la couleur, détruit la souplesse, dérange le poli & l’uniformité ; ces éruptions sont quelquefois des boutons ou petites tumeurs élevées au-dessus de la surface de la peau ; d’autresfois ce sont de simples taches qui n’offrent aux yeux qu’une altération dans

la couleur, sans élevation sensible ; dans quelque cas ce sont des écailles qui recouvrent la peau, &c. Voyez Eruption, Exanthème, Ecaille, Tache, Pustule, &c. Les maladies de la peau peuvent se distinguer en chroniques & en aiguës : cette distinction est très-bien fondée & très-importante. Dans la premiere classe on doit ranger la lepre, la gale, les dartres, la teigne, l’éléphantiase, &c. Parmi les maladies aiguës on compte principalement la petite-vérole, la rougeole, les fievres scarlatines, miliaires, pourprées, érésipellateuses, &c. Voyez tous ces différens articles. Outre ces maladies dont le principal symptome se trouve à la peau, il y en a beaucoup d’autres qui sont accompagnées d’une affection de la peau, d’éruption, de taches, &c. mais cette affection n’est que symptomatique ; elle ne constitue pas des maladies particulieres, & n’accompagne pas même toujours & essentiellement celles auxquelles elle se joint : telles sont parmi les maladies aiguës ces fievres dans le cours desquelles il survient des petits boutons, des taches quelquefois critiques : tel est aussi dans la classe des chroniques le scorbut, qu’accompagne souvent & que caractérise très-bien l’éruption de taches noirâtres ou livides en différentes parties du corps ; voyez Scorbut : telle est, ou mieux telle étoit la vérole dans les commencemens de son invasion. Pendant le siege de Naples, elle se manifestoit principalement par de larges pustules qui couvroient & défiguroient la peau ; voyez Vérole ; enfin on peut ajouter à ces maladies un grand nombre d’éruptions cutanées, extrèmement variées, qui n’ont point de caractere spécifique ni de nom particulier, & qu’on ne peut pas exactement rapporter à aucune des maladies nommées. Il y a tout lieu de penser que toutes ces variétés sont accidentelles & dépendantes d’un concours fortuit de circonstances, de la différence de tempérament, de régime, de climat, de pays, de l’idiosyncrasie, &c.

L’ætiologie des maladies de la peau a fourni un champ vaste aux explications de théoriciens boerrhaavistes ; c’est-là qu’ils ont fait jouer an grand rôle aux acrimonies imaginaires du fameux Boerrhaave ; & l’on ne sauroit disconvenir que cette doctrine ne soit en ce point fondée sur quelques apparences : car enfin, disoient-ils, l’acrimonie de l’humeur qui forme par son séjour & sa stagnation les différentes éruptions est manifestée par les douleurs, les démangeaisons qu’elle excite sur la peau. N’est-il pas visible que les parties globuleuses de la lymphe sont transformées en petits corps pointus, en aiguilles extrèmement fines, qui agacent, irritent & piquotent les filets nerveux qui s’insinuent dans leurs tissus, qui tendent à en désunir les molécules, & produisent par cette action la démangeaison & la douleur qui accompagnent assez fréquemment les maladies éruptives : or, poursuivent-ils avec la même sagacité, l’acrimonie manifeste de cette humeur décele infailliblement l’acrimonie du sang, & sur-tout de la lymphe dont elles dérivent ; car principiatum redolet naturam principii ; il est très-probable qu’un peu d’épaississement de la lymphe se joint à son âcreté ; ce second vice sert admirablement bien pour la faire arrêter, croupir, s’accumuler dans les petits vaisseaux : pour les distendre, les dilater, les élever en tumeur, produire les exanthèmes ou les taches. Telle est la théorie générale des maladies de la peau, ou éruptives. Le lecteur éclairé nous dispensera facilement de lui montrer le faux, le vague, l’arbitraire & le ridicule de ces principes : il lui est facile d’appercevoir que quelle que soit la nature des humeurs qui forment ces exanthemes, le tissu de la peau n’a qu’à être plus tendre, il sera plus sensible, plus irritable, & plus ou moins désagréablement affecté par des causes ordinaires. Il sent fort bien que toutes ces acrimonies