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ble. 2°. Que souvent ces faits sont inexplicables, parce qu’on se sert des principes faux & peu féconds.

Il ne seroit pas difficile de prouver la possibilité & la vraissemblance des faits énoncés ; on n’a qu’à bien comprendre le peu de mots qu’on a dit sur les causes du pouls ; il faut pour cela, dépouillant tous les préjugés scholastiques, cesser de regarder avec les méchaniciens & les boërrhaavistes, le corps humain de même que celui des animaux, comme une machine brute, où toutes les actions & les parties sont indépendantes les unes des autres, où tous les mouvemens isolés s’exécutent mollement par des puissances inanimées ; tout doit changer de face ; le corps ne doit paroître que comme un assemblage infini de petits corps semblables, également vivans, également animés, qui ont chacun une vie, une action, une sensibilité, un jeu & des mouvemens propres & particuliers, & en même tems, une vie, une sensibilité, &c. communes & générales. Toutes les parties concourant chacune à leur façon, à la vie de tout le corps, influent réciproquement les unes sur les autres, & se correspondent toutes ; chaque partie fait ressentir aux autres sa santé ou ses dérangemens ; tel est l’homme sur lequel on doit examiner l’influence, la sympathie mutuelle, les rapports réciproques des différentes parties, les départemens, &c. alors rien de plus naturel que l’action de toutes les parties sur le système vasculeux, organe si étendu & si important ; dans l’état de santé, chaque partie agissant également, il en résulte une action combinée, uniforme, & qui ne tient d’aucun viscere en particulier ; mais si un organe vient à se déranger, dès-lors il y a maladie ; son action sur le pouls est différente de ce qu’elle étoit auparavant, moindre ou plus forte, le pouls change, & cette variation est le tableau & la mesure du dérangement qui l’a excitée.

C’est une opinion & une erreur communes, à mon avis, que la dilatation de l’artere est dûe au sang poussé par le cœur qui en écarte les parois jusqu’à un certain point, les distend, & les excite à la contraction ; il me paroît plus naturel de croire que la contraction des arteres est leur premier mouvement, & que la dilatation n’est que la fin ou la cessation de ce mouvement, & l’état de relâchement de l’artere ; pour s’en convaincre, on n’a qu’à comparer les arteres aux autres muscles, & particulierement au cœur ; on n’a qu’à faire attention que, quoique les arteres soient vuides, si elles sont irritées, surtout intérieurement, par quelque agent physique ou méchanique, elles se contractent aussi-tôt, & se relâchent ensuite, ou se dilatent, & continuent ainsi pendant quelque tems cette alternative de contraction & de dilatation. Le même phénomène s’observe sur un cœur détaché, d’où il faut conclure que les arteres ne sont que des especes de cœur alongé, que le sang poussé dans leur cavité ne produit d’autre effet que celui d’irriter leurs parois, d’en exciter la contraction, qui venant à cesser, est suivie du relâchement & de la dilatation ; qu’ainsi, comme Galien l’a pensé, les arteres reçoivent le sang, parce qu’elles se dilatent, & ne se dilatent pas parce qu’elles le reçoivent ; que les contractions des arteres sont comme celles du cœur, les vraies causes du mouvement du sang, de quelque façon qu’il se fasse ; si l’on veut se former une idée de la maniere dont les visceres concourent au mouvement & aux contractions des arteres, & comment ils le font varier, qu’on imagine des cordes qui partant de chaque viscere, de chaque partie considérable, viennent aboutir à un artere ; de la tension uniforme de toutes ces cordes résultera un effort combiné auquel l’artere obéissant exécutera ses mouvemens avec uniformité. Si l’on suppose à présent qu’une de ces cordes tire avec plus ou moins de force, l’équilibre sera détruit, il arrivera nécessairement un

changement dans l’effort des autres cordes ; elles tireront plus ou moins ; comme chaque viscere a son méchanisme particulier qui lui est propre, le plus ou moins de tension qu’il imprimera à sa corde, sera marqué différemment sur l’artere qu’un autre dérangement, & ce même viscere fera sur le pouls un effet différent, suivant l’espece d’altération qu’il éprouvera ; telles sont les variétés du pouls qu’un observateur habile essaye de saisir, & dont il vient à bout par un travail assidu, de reconnoître l’origine ; ces cordes que nous avons supposées, ne sont point étrangeres ; transformez-les en nerfs, & vous aurez une idée de la plupart des dérangemens de l’économie animale, qui sont tels que la tension d’une partie est produite par le relâchement d’une autre : vérité lumineuse qu’il est bien important de ne pas perdre de vue dans la pratique.

Nous ne poussons pas plus loin ces explications : ce que nous avons dit peut suffire à ceux qui veulent entrevoir la raison des faits avant de les croire. Nous avouerons qu’on ne peut pas expliquer d’une maniere aussi satisfaisante, pourquoi une diarrhée est précédée du pouls intermittent plutôt que du dicrote, pourquoi il est dicrote dans l’hémorragie du nez plutôt que l’hépatique, &c. Ceux qui voudront s’exercer à suivre ces détails curieux, trouveront des principes très-lumineux & féconds dans le nouveau plan d’économie animale publié depuis quelques années par un médecin célebre ; ils sont exposés dans deux ouvrages excellens, dont l’un a pour titre : Specimen novi medecinæ conspectûs ; & l’autre. Idée de l’homme physique & moral. On peut aussi consulter sur cette matiere dans ce Dictionnaire les articles Économie animale & Spasme. Nous nous hâtons de terminer un article déjà fort étendu ; nous prions le lecteur, qui ne manquera pas de trouver qu’il a passé de justes bornes, de considérer que la matiere que nous avions à traiter, étoit négligée, peu connue, presque neuve : qu’elle est le sujet d’une découverte importante, très-avantageuse à l’humanité, l’objet des clameurs & des contradictions : que c’est d’ailleurs un des plus vastes sujets de la Médecine, auquel tous les autres points se rapportent : qu’on y a en conséquence renvoyé un grand nombre d’articles de ce Dictionnaire, & qu’enfin nous n’avons pas eu le tems d’être plus courts. (m)

POUMON, (Anatomie) c’est une partie du corps humain, qui est composée de vaisseaux & de vésicules membraneuses, & qui sert pour la respiration. Voyez Respiration.

Les poumons sont divisés en deux gros lobes par le médiastin, & chacun de ces lobes, en d’autres moindres. Le gros lobe droit est quelquefois divisé en trois ou quatre, par le moyen de certaines scissures qui vont du bord antérieur au bord postérieur. Le gros lobe gauche est divisé en deux pour l’ordinaire ; mais en examinant de près ces grands lobes, on voit qu’ils se partagent en lobules fort petits, irréguliers et très-distinctement séparés, lesquels sont environnés d’une substance cellulaire qui en fait la séparation, & qui peut se gonfler.

Lorsque ces gros lobes sont gonflés, le poumon de l’homme ressemble assez à celui des différens animaux qui sont exposés dans les boucheries. Voyez nos Pl. anatom. & leur explic. Voyez aussi Lobe & Lobule.

La substance des poumons est membraneuse, étant composée d’une infinité de cellules ou vésicules, qui semblent n’être autre chose que des expansions des membranes des bronches, auxquelles elles sont suspendues comme des grapes de raisin, tellement qu’en soufflant dans l’un des rameaux des bronches, les cellules ou vésicules qui lui appartiennent, se gonflent ; tandis que les autres qui ne lui appartien-