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avec la scie, fig. 28. Pl. des outils, ou la coignée, fig. 33. Pl.

Pour y parvenir, ainsi que pour toutes les opérations quelconques que l’on a à y faire, il faut commencer d’abord par les mettre en chantier[1], c’est-à-dire, placer, par exemple, la piece de bois A, fig. 4. que l’on veut travailler sur deux calles[2] B, ou autres pieces de bois quarrées ou méplates que l’on appelle chantier de bois, ce qui la faisant mieux porter[3] la rend beaucoup plus solide : la raison est premierement, qu’il est peu de terrein parfaitement uni ; secondement, qu’il est aussi très-peu de pieces de bois parfaitement droites, raisons pour lesquelles il ne peut ainsi porter solidement ; car si on la posoit simplement à terre, elle pirouetteroit & tourneroit çà & là au gré des outils ou autres instrumens avec lesquels on opéreroit ; de plus, étant un peu élevée, on est plus à son aise pour les différentes opérations que l’on veut y faire.

Cette piece de bois A, fig. 4. étant en chantier, on en ôte d’abord l’écorce ; ensuite les deux extrémités C & D étant sciées bien quarrément[4], on y trace par chaque bout un quarré de la grosseur que la piece de bois peut porter, en observant qu’ils se regardent & soient tous deux placés bien juste sur le même plan. La Géométrie-pratique enseigne plusieurs manieres à cet effet, mais la plus courte & la plus sûre est d’abord de tracer par un bout C un quarré ; ensuite, pour faire que celui qui doit être placé à l’autre extrémité D soit sur le même plan du précédent, il suffit d’en avoir un côté E sur le même plan d’un des côtés de celui de l’extrémité C de la piece, une regle F parallele à un des côtés du quarré C déja tracé, & placer ensuite par l’autre bout une seconde regle G parallele à la premiere, & d’après cette derniere tirer une ligne E parallele pour former le côté E que nous cherchons ; ce côté ainsi trouvé, il est bien facile maintenant d’achever le quarré ; les deux quarrés ainsi tracés, il faut tirer d’un bout à l’autre de la piece de bois, fig. 5. des lignes qui correspondent à leurs côtés A & B : cette opération se fait de deux manieres.

La premiere, beaucoup plus prompte, plus facile & plus juste que toutes les autres, & celle aussi que l’on emploie le plus souvent, sur-tout lorsque les pieces de bois sont longues & mal-faites, se fait ainsi : on frotte d’abord de noir[5], ou de blanc de craie[6], un cordeau[7] A & B, même figure, que l’on pose le long de la piece, ajustant les deux bouts A & B sur l’extrémité des lignes qui forment les quarrés ; ensuite, prenant le cordeau par son milieu C, on le tend en l’élevant de bas en haut, & on le lâche aussi-tôt ; ce cordeau retombant avec rapidité sur la piece de bois sur laquelle il pose, se dépouille d’une partie du noir ou de blanc dont il étoit revêtu, pour le communiquer à l’endroit où il est retombé, ce qui forme une ligne parfaitement droite ; ce que l’on réitere sur les quatre faces.

La seconde, dont on ne se sert presque jamais, à moins que les pieces de bois ne soient fort courtes, est de placer au lieu de cordeau une regle un peu plus longue que la piece de bois, dont les deux bouts sont aussi posés sur l’extrémité des lignes des quarrés, en-

suite avec une pierre de craie, ou mieux une pierre

noire, qui parce qu’elle s’efface moins facilement que les autres est celle dont on se sert le plus souvent dans la charpenterie, on tire une ligne d’un bout à l’autre de la piece ; ce que l’on réitere aussi sur les quatre faces.

Ces quatre lignes tirées, on refend la piece, de laquelle on retire les deux dosses D & E opposées l’une à l’autre.

Ceci fait, fig. 6, on tire avec le cordeau sur les deux côtés sciés, de nouvelles lignes AB & CD qui aboutissent aux deux autres côtés de chacun des quarrés, & on refend la piece comme auparavant, de laquelle on retire aussi les deux autres dosses E & F, ce qui rend la piece de bois quarrée, de ronde qu’elle étoit.

De la maniere de débiter les bois. La maniere de débiter les bois telle qu’on le voit en a dans la vignette de la premiere Planche, est fort simple ; elle ne consiste qu’à arrêter bien solidement la piece de bois que l’on veut refendre, sur deux forts treteaux de bois d’assemblage, fig. 31, Pl. (des outils), & à la scier ensuite avec la scie à refendre, fig. 28, Planches (des outils). Nous allons donner la description d’une ingénieuse machine à l’eau pour débiter les bois.

Description d’un moulin à débiter les bois. La Planche XXXIV. représente le plan & l’élévation intérieure prise sur la longueur ; la Planche XXXV. le plan souterrein & l’élévation intérieure prise sur la largeur d’un moulin exécuté en Hollande, propre à débiter des pieces de bois. Cette machine pratiquée dans un bâtiment couvert, partie dans la terre, & partie hors de terre, est composée d’une roue A mûe par un ruisseau, au milieu de laquelle est un grand arbre B porté sur deux tourillons appuyés d’un côté sur un mur C, & de l’autre, sur un support D soutenu de sommiers & de liens portant un rouet denté E engrenant dans deux lanternes F & G, dont la premiere porte avec soi un treuil H porté sur deux tourillons appuyés sur des supports I & K soutenus de sommiers & de liens ayant un cordage L servant à amener les pieces de bois M sur des rouleaux ou traîneaux N. Lorsque ces pieces M sont amenées assez près de la machine ; on leve l’arcboutant O, & le support K à charniere par en bas n’étant plus retenu, s’éloigne aussi-tôt de sa place, & entraîne avec soi la lanterne F, qui n’engrenant plus dans le rouer E, cesse de faire tourner son treuil H, & d’amener la piece M. L’autre lanterne G porte une manivelle coudée P, qui ayant ses tourillons appuyés sur des supports Q, sert en tournant à manœuvrer par un tirant R attaché à la traverse inférieure d’un chassis S mouvant de haut en bas dans deux coulisses T arrêtées à demeure sur une piece de U attachée au plancher & à une autre supérieure V, plusieurs scies X attachées haut & bas aux deux traverses du chassis, & s’étendant plus ou moins par le secours des vis Y ; la piece de bois a que l’on veut scier, arrêtée par ses deux extrémités avec des liens b sur des traverses c posées à demeure sur un chassis composé d’entretoises d & de longrines e glissant d’un bout à l’autre sur un chassis à coulisse f ; les dents pratiquées au-dessous des longrines e, s’engrenant dans deux lanternes g montées sur un arbre h, à l’extrémité duquel est une petite roue dentée i, qu’un échappement k fait tourner d’une dent à chaque vibration montante des scies X, font avancer à mesure la piece de bois a, & le chassis de, sur lequel elle est portée.

Des assemblages. On appelle assemblage de charpente l’union de plusieurs pieces de bois ensemble ; il en est de deux sortes : les uns, que l’on appelle assemblages à tenons & mortaises, les autres assemblages à queue d’a-

  1. On appelle mettre une piece de bois en chantier, l’élever sur deux calles.
  2. Calle est une piece qui en soutient une autre pendant une opération.
  3. On dit qu’une piece de bois porte, quand étant callée, elle ne peut chanceler.
  4. Quarrément, c’est-à-dire à angles droits.
  5. Ce noir peut être de paille brulée, ou autre noir qui peut se réduire en poussiere fine.
  6. Craie, espece de pierre blanche que l’on tire des carrieres de Champagne.
  7. Un cordeau ou ficelle ; il faut que ce soit de celle qu’on appelle fouet.