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davantage pour causer du trouble & pour frapper l’imagination. Ce furent-là, selon les apparences, les causes du prétendu pressentiment du maréchal de S. André, sans qu’il soit nécessaire de faire venir une intelligence qui lui ait parlé à l’oreille.

Ajoutons, en finissant ces réflexions, qu’il y a aussi des personnes ou naturellement craintives, ou dont l’imagination est aisément frappée. La moindre chose, la plus legere & la plus indifférente circonstance les émeut, les trouble ; & pour peu qu’il y ait dans les événemens quelque chose qui puisse se rapporter à ces sentimens, dont leur caractere même est le principe, il n’en faut pas davantage pour les honorer du titre de pressentiment. (Le Chevalier de Jaucourt.)

PRESSENTIR, v. act. c’est être sous cette espece de pénétration ou de pusillanimité qui nous fait espérer ou craindre un événement possible, mais éloigné. La pusillanimité & la pénétration combinent tout également ; mais la pusillanimité perdant de vue les probabilités qui sont pour elle, & ne s’attachant qu’aux probabilités qui sont contre elle, voit l’événement fâcheux comme présent. La pénétration aussi clairvoyante se rassure par le rapport des probabilités pour & contre. L’homme ferme empêche quelquefois la chose qu’il a pressentie par sa seule fermeté ; l’homme pusillanime la fait arriver par sa frayeur & ses allarmes.

PRESSER, v. act. (Gramm.) ce verbe a plusieurs acceptions différentes. Quelquefois il signifie rapprocher des choses entre elles sous un moindre volume, ou les tenir fortement appliquées à d’autres, soit par la force seule du corps, soit avec cette force aidée d’un instrument ; & l’on dit en ce sens presser une étoffe, presser du papier, presser des fruits. On étoit fort pressé au spectacle ; presser ses raisonnemens, presser son style, &c. D’autres fois il signifie accélérer, hâter ; vous êtes bien pressé ; vous ne vous pressez jamais d’obliger : ou dans un sens à-peu-près semblable, laisser peu de tems pour agir ; il est pressé par l’ennemi, par le besoin, par le mal, par la douleur.

Ajoutez que ce mot a autant d’acceptions différentes que celui de presser, dont il marque l’usage. Voyez l’article Presse.

Presser, en terme de Cornetier, se dit de l’action d’applatir les galins qui ont déja été étendus ; cela s’opere par le moyen d’une presse à vis, ou d’une presse à coins. Voyez Presse a vis, Presse a coins.

Presser a mort, (Jurisprud.) terme de droit usité en Angeterre, où il signifie faire souffrir à un criminel une sorte de torture qu’on appelle peine forte & dure. Voyez Peine.

Presser, en terme de Commerce de mer, signifie obliger ou contraindre les équipages des bâtimens marchands à servir sur les vaisseaux de guerre. Cette maniere de parler n’est guere usitée qu’en Hollande & en Angleterre. En France, on dit ordinairement fermer les ports ; quelques-uns disent mettre un embargo. Dict. du Comm.

Presser, (Marine.) c’est contraindre les mariniers à servir sur les navires de guerre. Les commissaires qui pressent, s’appellent pres-meesters ; cette façon de parler est angloise. On dit en France, fermer les ports, & quelques-uns disent mettre un embargo.

Presser, c’est arrimer des laines & autres telles marchandises avec des presses. Quelques hollandois les arriment avec de grosses pieces de bois qu’ils roulent dessus, ou qui sont attachées à un palan qui tient à une grosse boucle qui est sur le pont, & qui enleve la pierre ou le billot, & le laisse tomber de haut en bas, à-peu-près comme fait la sonnette sur le pilotis ; & cella s’appelle traaven ou denivel-jaagen, & les bois qu’on roule s’appellent sceer-hontenen anglois.

Presser, en terme de Batteur d’or, c’est l’action de

serrer sous une presse, voyez Presse, les outils pour les sécher entierement. On les enferme entre deux ais de bois parce que le feu feroit retirer le velin ou le boyau. Il faut presser les outils toutes les fois qu’on veut s’en servir.

Presser son cheval, en termes de Manege, c’est lui faire augmenter la vîtesse de son allure, ou l’empêcher de la diminuer lorsqu’il la ralentit. Voyez Allure. Presser la veine, mal que le maréchal fait à un cheval en le ferrant.

Presser, (terme de Tailleur.) ils disent presser les coutures, pour signifier passer le carreau sur les coutures.

PRESSEUR, s. m. (terme de Manufact :) ouvrier dont l’emploi est de presser sous une presse les étoffes, les toiles, les draps, &c. Ceux qui pressent les étoffes de laine sont ordinairement appellés catisseurs, & ceux qui pressent celle de soie & les toiles, sont vulgairement nommés calandreurs. (D. J.)

PRESSIER, s. m. (Imprimerie.) on se sert rarement de ce terme dans l’Imprimerie, quoiqu’il désigne parfaitement l’ouvrier qui travaille à la presse.

PRESSIGNI, (Géogr. mod.) petite ville de France dans la Touraine, sur la riviere de Claire. Il y a un château, un chapitre & une paroisse.

PRESSION, s. f. (Physiq.) est proprement l’action d’un corps qui fait effort pour en mouvoir un autre ; telle est l’action d’un corps pesant appuyé sur une table horisontale. La pression se rapporte également au corps qui presse & à celui qui est pressé. Ainsi si un corps A fait effort pour mouvoir un autre corps B, on dit la pression du corps A, en parlant de la force que le corps A exerce sur le corps B ; & la pression du corps B, pour désigner ce que le corps B souffre, pour ainsi dire, de cette action.

Pression, dans la philosophie cartésienne, signifie une sorte de mouvement impulsif, ou plutôt de tendance au mouvement imprimé à un milieu fluide & qui s’y propage. Voyez Mouvement, Fluide & Cartésianisme.

C’est dans une pareille pression que consiste, selon les Cartésiens, l’action de la lumiere, voyez Lumiere, & ces philosophes croient que la différence des couleurs vient des différentes modifications que reçoit cette pression par la surface des corps sur lesquels le milieu agit. Voyez Couleur.

Mais M. Newton soutient qu’en cela les Cartésiens se trompent : en effet, si la lumiere ne consistoit que dans une simple pression sans mouvement actuel, elle ne pourroit agiter & échauffer comme elle fait les corps qui la renvoient & la rompent. Et si elle consistoit en un mouvement instantané qui se répandît à quelque distance que ce fût dans un instant, comme il doit résulter d’une telle pression, il faudroit à chaque instant une force infinie dans chaque particule du corps lumineux pour produire un tel effet.

De plus, si la lumiere consistoit dans une pression ou mouvement propagé dans un fluide, soit en un instant, soit successivement, il s’ensuivroit que les rayons devroient se plier & se fléchir vers l’ombre. Car une pression propagée dans un fluide ne sauroit s’étendre en ligne droite derriere un obstacle qui l’arrête en partie ; mais elle doit se rompre, pour ainsi dire, & se répandre en tout sens devant & derriere le corps qui lui fait obstacle.

Ainsi, quoique la force de la gravité tende de haut en bas, la pression d’un fluide qui vient de cette force agit également en tout sens, & se propage avec autant de facilité en ligne courbe qu’en ligne droite.

Lorsque les vagues qui se forment sur la surface de l’eau viennent à rencontrer quelque obstacle, elles se brisent, se dilatent & se répandent dans l’eau stagnante & tranquille qui est derriere l’obstacle. Les vibrations &, pour ainsi dire, les vagues de l’air qui