L’Encyclopédie/1re édition/MOUVEMENT

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MOUVEMENT, s. m. (Méchan.) qu’on appelle aussi mouvement local ; c’est un changement continuel & successif de place de la part d’un corps, c’est-à-dire un état d’un corps par lequel il correspond successivement à différens lieux, ou par lequel il est successivement présent à différentes parties de l’espace. Voyez Lieu. La théorie & les lois du mouvement sont le principal sujet de la méchanique. Voyez Méchanique.

Les anciens philosophes ont considéré le mouvement dans un sens plus général & plus étendu, ils l’ont défini le passage d’un corps d’un état en un autre, & ils ont de cette sorte reconnu six especes de mouvement, la création, la génération, la corruption, l’augmentation, la diminution & le transport ou mouvement local.

Mais les philosophes modernes n’admettent que le mouvement local, & réduisent la plûpart des autres especes dont nous venons de faire mention, à celui-là seulement. Voyez Génération, Corruption, &c. De sorte que nous n’avons à parler ici que du transport ou mouvement local, dont toutes les autres especes de mouvement ne sont qu’autant de modification ou d’effets. Voyez Altération, &c.

On a contesté l’existence & même la possibilité du mouvement, mais par de purs sophismes. Il y a eu de tout tems des hommes qui se sont fait un honneur de contredire ce qu’il y a de plus évident, pour faire parade de leur prétendue force d’esprit, & il ne se trouve encore aujourd’hui que trop de gens de ce caractere. Voici un échantillon des difficultés que ces sortes de gens ont fait contre l’existence du mouvement. S’il y a du mouvement, il est dans la cause qui le produit, ou dans le corps mobile, ou dans l’une & dans l’autre. Il n’est pas dans la cause qui l’excite, car quand on jette une pierre, on ne peut pas dire que le mouvement résiste dans la cause qui le produit, mais il est dans la pierre que l’on a jettée. Cependant on ne sauroit guere établir non plus le mouvement dans le corps mobile, car le mouvement est l’effet de la cause qui agit, & le corps mobile est sans effet : donc il n’y a point de mouvement, puisqu’il ne se trouve ni dans la cause qui l’excite, ni dans le corps mobile. La réponse est que dans un certain tems le mouvement réside dans la cause qui le produit, & que dans un autre tems il se trouve dans le corps mobile. Ainsi lorsqu’on met une pierre dans une fronde, & qu’on vient à tourner la fronde, la main au-tour de laquelle est la corde, doit alors être regardée comme la cause qui produit le mouvement, & elle est même en mouvement ; de-là il passe dans la fronde qui tourne, & enfin dès que la fronde vient à se lâcher, la pierre est le siége du mouvement. Le défaut du sophisme est donc de ne pas faire attention aux différens tems dans lesquels tout ceci se passe. Diodore Cronus faisoit un autre raisonnement que voici. Le corps est mû dans la place où il est, ou dans celle où il n’est pas. L’un & l’autre est impossible, car s’il étoit mû dans la place où il est, il ne sortiroit jamais de cette place. Il n’est pas mû non plus dans la place où il n’est pas, & par conséquent il n’est jamais en mouvement. La définition du mouvement se tire de cette difficulté apparente ; un corps n’est pas mû dans la place où il est, mais de la place où il est dans celle qui suit immédiatement.

Le plus fameux de tous les sophismes contre le mouvement, est celui que Zénon avoit appellé l’Achille ; pour marquer sa force, qu’il croyoit invincible, il supposoit Achille courant après une tortue, & allant dix fois plus vite qu’elle. Il donnoit une lieue d’avance à la tortue, & raisonnoit ainsi : tandis qu’Achille parcourt la lieue que la tortue a d’avance sur lui, celle-ci parcourra un dixieme de lieue ; pendant qu’il parcourra le dixieme, la tortue parcourra la centieme partie d’une lieue ; ainsi de dixieme en dixieme, la tortue dévancera toujours Achille, qui ne l’atteindra jamais. Mais 1°. quand il seroit vrai qu’Achille n’attrapât jamais la tortue, il ne s’ensuivroit pas pour cela que le mouvement fût impossible, car Achille & la tortue se meuvent réellement, puisqu’Achille approche toujours de la tortue qui est supposée le dévancer toujours infiniment peu. 2°. On a répondu directement au sophisme de Zénon. Gregoire de Saint-Vincent fut le premier qui en démontra la fausseté, & qui assigna le point précis auquel Achille devoit atteindre la tortue, & ce point se trouve par le moyen des progressions géométriques infinies, au bout d’une lieue & d’un neuvieme de lieue ; car la somme de toute progression géométrique est finie, & cela parce qu’être fini, ou s’étendre à l’infini, sont deux choses très-différentes. Un tout fini quelconque, un pié par exemple, est composé de fini & d’infini. Le pié est fini en tant qu’il ne contient qu’un certain nombre d’êtres simples ; mais je puis le supposer divisé en une infinité, ou plûtôt en une quantité non finie de parties, en considérant ce pié comme une étendue abstraite ; ainsi si j’ai pris d’abord dans mon esprit la moitié de ce pié, & que je prenne ensuite la moitié de ce qui reste, ou un quart de pié, puis la moitié de ce quart, ou un huitieme de pié, je procéderai ainsi mentalement à l’infini, en prenant toujours de nouvelles moitiés des croissances, qui toutes ensemble ne feront jamais que ce pié : de même tous ces dixiemes de dixiemes à l’infini, ne font que 1/9 de lieue, & c’est au bout de cet espace qu’Achille doit attraper la tortue, & il l’attrape au bout d’un tems fini, parce que tous ces dixiemes de dixiemes sont parcourus durant des parties de tems des croissances, dont la somme fait un tems fini. M. Formey.

Les auteurs de Physique anciens & modernes, ont été fort embarrassés à définir la nature du mouvement local : les péripatéticiens disent qu’il est actus entis in potentia quatenus est in potentia. Aristote, 3. Phys. c. ij. Mais cette notion paroît trop obscure pour qu’on puisse s’en contenter aujourd’hui, & elle ne sauroit servir à expliquer les propriétés du mouvement.

Les Epicuriens définissoient le mouvement, le passage d’un corps ou d’une partie de corps d’un lieu en un autre, & quelques philosophes de nos jours suivent à peu près cette définition, & appellent le mouvement d’un corps, le passage de ce corps d’un espace à un autre espace, substituant ainsi le mot d’espace à celui de lieu.

Les Cartésiens définissent le mouvement, le passage ou l’éloignement d’une portion de matiere, du voisinage des parties qui lui étoient immédiatement contiguës dans le voisinage d’autres parties.

Cette définition est dans le fond conforme à celle des Epicuriens, & il n’y a entr’elles d’autre différence, sinon que ce que l’une l’appelle corps & lieu, l’autre l’appelle matiere & partie contiguë.

Borelli, & après lui d’autres auteurs modernes, définissent le mouvement, le passage successif d’un corps, d’un lieu en un autre, dans un certain tems déterminé, le corps étant successivement contigu à toutes les parties de l’espace intermédiaire.

On convient donc que le mouvement est le transport d’un corps d’un lieu en un autre ; mais les Philosophes sont très-peu d’accord lorsqu’il s’agit d’expliquer en quoi consiste ce transport ; ce qui fait que leurs divisions du mouvement sont très-différentes.

Aristote & les Péripatéticiens divisent le mouvement en naturel & violent.

Le naturel est celui dont le principe ou la force mouvante est renfermée dans le corps mû, tel est celui d’une pierre qui tombe vers le centre de la terre. Voyez Gravité.

Le mouvement violent est celui dont le principe est externe, & auquel le corps mû résiste ; tel est celui d’une pierre jettée en haut. Les modernes divisent généralement le mouvement en absolu & relatif.

Le mouvement absolu est le changement de lieu absolu d’un corps mû, dont la vitesse doit par conséquent se mesurer par la quantité de l’espace absolu que le mobile parcourt. Voyez Lieu.

Mouvement relatif, c’est le changement du lieu relatif ordinaire du corps mû, & sa vitesse s’estime par la quantité d’espace relatif qui est parcourue dans ce mouvement.

Pour faire sentir la différence de ces deux sortes de mouvemens, imaginons un corps qui se meuve dans un bateau ; si le bateau est en repos, le mouvement de ce corps sera, ou plûtôt sera censé mouvement absolu ; si au contraire le bateau est en mouvement, le mouvement de ce corps dans le bateau ne sera qu’un mouvement relatif, parce que ce corps outre son mouvement propre, participera encore au mouvement du bateau ; de sorte que si le bateau fait par exemple, deux piés de chemin pendant que le corps parcourt dans le bateau l’espace d’un pié dans le même sens, le mouvement absolu du corps sera de trois piés, & son mouvement relatif d’un pié.

Il est très-difficile de décider si le mouvement d’un corps est absolu ou relatif, parce qu’il seroit nécessaire d’avoir un corps que l’on sût certainement être en repos, & qui serviroit de point fixe pour connoître & juger de la quantité du mouvement des autres corps. M. Newton donne pourtant, ou plûtôt indique quelques moyens généraux pour cela dans le scholie qui est à la tête de ses principes mathématiques. Voici l’exemple qu’il nous donne pour expliquer ses idées sur ce sujet. Imaginons, dit ce grand philosophe, deux globes attachés à un fil, & qui tournent dans le vuide au tour de leur centre de gravité commun ; comme il n’y a point par la supposition, d’autres corps auquels on puisse les comparer, & que ces deux corps en tournant, conservent toujours la même situation l’un par rapport à l’autre, on ne peut juger ni s’ils sont en mouvement, ni de quel côté ils se meuvent, à moins qu’on n’examine la tension du fil qui les unit. Cette tension connue peut servir d’abord à connoître la force avec laquelle les globes tendent à s’éloigner de l’axe de leur mouvement, & par-là on peut connoître la quantité du mouvement de chacun des corps ; pour connoître présentement la direction de ce mouvement, qu’on donne des impulsions égales à chacun de ces corps en sens contraire, suivant les directions paralleles, la tension du fil doit augmenter ou diminuer, selon que les forces imprimées seront plus ou moins conspirantes avec le mouvement primitif, & cette tension sera la plus grande qu’il est possible lorsque les forces seront imprimées dans la direction même du mouvement primitif ; de sorte que si on imprime successivement à ces corps des mouvemens égaux & contraints dans différentes directions, on connoîtra, lorsque la tension du fil sera la plus augmentée, que les forces imprimées ont été dans la direction même du mouvement primitif, ce qui servira à faire connoître cette direction. Voilà de quelle maniere on peut trouver dans le vuide la quantité & la direction du mouvement de deux corps isolés. Présentement si autour de ces deux globes on place quelques autres corps qui soient en repos, on ne pourra savoir si le mouvement est dans les globes ou dans les corps adjacens, à moins qu’on n’examine de même qu’auparavant la tension du fil, & si cette tension se trouve être celle qui convient au mouvement apparent des deux globes ; on pourra conclure que le mouvement est dans les globes, & que les corps adjacens sont en repos.

D’autres divisent le mouvement en propre & impropre, ou externe.

Le mouvement propre est le transport d’un lieu propre en un autre qui par-là devient lui-même propre, parce qu’il est rempli par ce corps seul exclusivement à tout autre ; tel est le mouvement d’une roue d’horloge.

Le mouvement impropre, externe, étranger, ou commun, c’est le passage d’un corps hors d’un lieu commun dans un autre lieu commun ; tel est celui d’une montre qui se meut dans un vaisseau, &c.

La raison de toutes ces différentes divisions paroît venir des différens sens qu’on a attachés aux mots, en voulant tous les comprendre dans une même définition & division.

Il y en a par exemple, qui dans leur définition du mouvement, considerent le corps mû, non par rapport aux corps adjacens, mais par rapport à l’espace immuable & infini ; d’autres le considerent, non par rapport à l’espace infini, mais par rapport à d’autres corps fort éloignés, & d’autres enfin ne le considerent pas par rapport à des corps éloignés, mais seulement par rapport à la surface qui lui est contiguë. Mais ces différens sens une fois établis, la dispute s’éclaircit alors beaucoup ; car comme tout mobile peut être considéré de ces trois manieres, il s’ensuit de-là qu’il y a trois especes de mouvement, dont celle qui a rapport aux parties de l’espace infini & immuable, sans faire d’attention aux corps d’alentour, peut être nommée absolument & véritablement mouvement propre ; celle qui a rapport aux corps environnans & très-éloignés, lesquels peuvent eux-mêmes être en mouvement, s’appellera mouvement relativement commun ; & la derniere qui a rapport aux surfaces des corps contigus les plus proches, s’appellera mouvement relativement propre.

Le mouvement absolument & vraiment propre, est donc l’application d’un corps aux différentes parties de l’espace infini & immuable. Il n’y a que cette espece qui soit un mouvement propre & absolu, puisqu’elle est toujours engendrée & altérée par des forces imprimées au mobile lui-même, & qu’elle ne sauroit l’être que de la sorte, parce que c’est d’ailleurs à elle qu’on doit rapporter les forces réelles de tous les corps pour en mettre d’autres en mouvement par impulsion, & que ces mouvemens lui sont proportionnels.

Le mouvement relativement commun, c’est le changement de situation d’un corps par rapport à d’autres corps circonvoisins ; & c’est celui dont nous parlons lorsque nous disons que les hommes, les villes & la terre même se meuvent.

C’est celui qu’un corps éprouve, lorsqu’étant en repos par rapport aux corps qui l’entourent, il acquiert cependant avec eux des relations successives par rapport à d’autres corps, que l’on considere comme immobiles ; & c’est le cas dans lequel le lieu absolu des corps change, quand leur lieu relatif reste le même. C’est ce qui arrive à un pilote qui dort sur le tillac pendant que le vaisseau marche, ou à un poisson mort que le courant de l’eau entraine.

C’est aussi le mouvement dont nous entendons parler lorsque nous estimons la quantité de mouvement d’un corps, & la force qu’il a pour en pousser un autre ; par exemple, si on laisse tomber de la main une sphere de bois remplie de plomb pour la rendre plus pesante, on a coutume d’estimer alors la quantité du mouvement & la force qu’a la sphere pour pousser d’autres corps, par la vitesse de cette même sphere & le poids du plomb qu’elle renferme ; & on a raison en effet d’en user de la sorte pour juger de cette force en elle-même & de ses effets, en tant qu’ils peuvent tomber sous nos sens : mais que la sphere n’ait point d’autre mouvement que celui que nous lui voyons ; c’est, selon que nous l’avons déja observé, ce que nous ne sommes point en état de déterminer en employant la seule apparence de l’approche de la pierre vers la terre.

Le mouvement relativement propre, c’est l’application successive d’un corps aux différentes parties des corps contigus ; à quoi il faut ajouter que lorsqu’on parle de l’application successive d’un corps, on doit concevoir que toute sa surface prise ensemble, est appliquée aux differentes parties des corps contigus ; ainsi le mouvement relativement propre est celui qu’on éprouve lorsqu’étant transporté avec d’autres corps d’un mouvement relatif commun, on change cependant la relation, comme lorsque je marche dans un vaisseau qui fait voile ; car je change à tout moment ma relation avec les parties de ce vaisseau qui est transporté avec moi. Les parties de tout mobile sont dans un mouvement relatif commun ; mais si elles venoient à se séparer, & qu’elles continuassent à se mouvoir comme auparavant, elles acquerroient un mouvement relatif propre. Ajoutons que le mouvement vrai & le mouvement apparent different quelquefois beaucoup. Nous sommes trompés par nos sens quand nous croyons que le rivage que nous quittons s’enfuit, quoique ce soit le vaisseau qui nous porte qui s’en éloigne ; & cela vient de ce que nous jugeons les objets en repos, quand leurs images occupent toujours les mêmes points sur notre rétine.

De toutes ces définitions différentes du mouvement, il en résulte autant d’autres du lieu ; car quand nous parlons du mouvement & du repos véritablement & absolument propre, nous entendons alors par lieu, cette partie de l’espace infini & immuable que le corps remplit. Quand nous parlons de mouvement relativement commun, le lieu est alors une partie de quelqu’espace ou dimension mobile. Quand nous parlons enfin du mouvement relativement propre, qui réellement est très-impropre, le lieu est alors la surface des corps voisins adjacens, ou des espaces sensibles. Voyez Lieu.

La nature de cet ouvrage, où nous devons exposer les opinions des Philosophes, nous a obligés d’entrer dans le détail précédent sur la nature, l’existence & les divisions du mouvement ; mais nous ne devons pas oublier d’ajouter, comme nous l’avons déja fait à l’article Elémens des Sciences, que toutes ces discussions sort inutiles à la méchanique ; elle suppose l’existence du mouvement, & définit le mouvement, l’application successive d’un corps à différentes parties contiguës de l’espace indéfini que nous regardons comme le lieu des corps.

On convient assez de la définition du repos, mais les Philosophes disputent entr’eux pour savoir si le repos est une pure privation de mouvement, ou quelque chose de positif. Malebranche & d’autres soutiennent le premier sentiment ; Descartes & ses partisans le dernier. Ceux-ci prétendent qu’un corps en repos n’a point de force pour y rester, & ne sauroit résister aux corps qui feroient effort pour l’en tirer, & que le mouvement peut être aussi-bien appellé une cessation de repos, que le repos une cessation de mouvement. Voyez Repos.

Voici le plus fort argument des premiers ; supposons un globe en repos, & que Dieu cesse de vouloir son repos, que s’ensuivra-t-il de là ? il restera toujours en repos ; mais supposons le corps en mouvement, & que Dieu cesse de le vouloir en mouvement, que s’ensuivra-t-il maintenant ? que le corps cessera d’être en mouvement, c’est-à-dire qu’il sera en repos, & cela parce que la force par laquelle un corps qui est en mouvement, persévere dans cet état, est la volonté positive de Dieu ; au lieu que celle par laquelle un corps qui est en repos y persévere, n’est autre chose que la volonté générale par laquelle il veut qu’un corps existe. Mais ce n’est là qu’une pétition de principe ; car la force ou le conatus par lequel les corps soit en repos, soit en mouvement, perséverent dans leurs états, ne vient que de l’inertie de la matiere ; de sorte que s’il étoit possible pour un moment à Dieu de ne rien vouloir sur l’état du corps, quoiqu’il en voulût toujours l’existence, un corps qui auroit été auparavant en mouvement y continueroit toujours, comme un corps en repos resteroit toujours en cet état. C’est cette inactivité ou inertie de la matiere qui fait que tous les corps résistent suivant leur quantité de matiere, & que tout corps qui en choque un autre avec une vitesse donnée, le forcera de se mouvoir avec d’autant plus de vitesse, que la densité & quantité de matiere du corps choquant sera plus grande par rapport à la densité & quantité de matiere de l’autre. Voyez Force d’inertie.

On peut réduire les modifications de la force active & de la force passive des corps dans leur choc à trois lois principales, auxquelles les autres sont subordonnées. 1°. Un corps persévere dans l’état où il se trouve, soit de repos, soit de mouvement, à moins que quelque cause ne le tire de son mouvement ou de son repos. 2°. Le changement qui arrive dans le mouvement d’un corps est toujours proportionnel à la force motrice qui agit sur lui ; & il ne-peut arriver aucun changement dans la vitesse & la direction du corps en mouvement, que par une force extérieure ; car sans cela ce changement se feroit sans raison suffisante. 3°. La réaction est toujours égale à l’action ; car un corps ne pourroit agir sur un autre corps, si cet autre corps ne lui résistoit : ainsi l’action & la réaction sont toujours égales & opposées. Mais il y a encore bien des choses à considérer dans le mouvement, savoir :

1°. La force qui l’imprime au corps ; elle s’appelle force motrice : elle a pour premiere cause l’Être suprème, qui a imprimé le mouvement à ses ouvrages, après les avoir créés. L’idée de quelques philosophes qui prétendent que tout mouvement actuel que nous remarquons dans les corps, est produit immédiatement par le créateur, n’est pas philosophique. Quoique nous ne puissions concevoir comment le mouvement passe d’un corps dans un autre, le fait n’en est pas moins sensible & certain. Ainsi, après avoir posé l’impression générale du premier moteur, on peut faire attention aux diverses causes que les êtres sensibles nous présentent pour expliquer les mouvemens actuels ; tels sont la pesanteur, qui produit du mouvement tant dans les corps célestes que dans les corps terrestres ; la faculté de notre ame, par laquelle nous mettons en mouvement les membres de notre corps, & par leur moyen d’autres corps sur lesquels le nôtre agit ; les forces attractives, magnétiques & électriques répandues dans la nature, la force élastique, qui a une grande efficace ; & enfin les chocs continuels des corps qui se rencontrent. Quoi qu’il en soit, tout cela est compris sous le nom de force motrice, dont l’effet, quand elle n’est pas détruite par une résistance invincible, est de faire parcourir au corps un certain espace en un certain tems, dans un milieu qui ne résiste pas sensiblement ; & dans un milieu qui résiste, son effet est de lui faire surmonter une partie des obstacles qu’il rencontre. Cette cause communique au corps une force qu’il n’avoit pas lorsqu’il étoit en repos, puisqu’un corps ne change jamais d’état de lui-même. Un mouvement une fois commencé dans le vuide absolu, s’il étoit possible, continueroit pendant toute éternité dans ce vuide, & le corps mû y parcourroit à jamais des espaces égaux en tems égaux, puisque dans le vuide aucun obstacle ne consumeroit la force du corps.

2°. Le tems pendant lequel le corps se meut : si un corps parcourt un espace donné, il s’écoulera une portion quelconque de tems, tandis qu’il ira d’un point à l’autre, quelque court que soit l’espace en question ; car le moment où le corps sera au point A ne sera pas celui où il sera en B, un corps ne pouvant être en deux lieux à la fois. Ainsi tout espace parcouru l’est en un tems quelconque.

3°. L’espace que le corps parcourt, c’est la ligne droite décrite par ce corps pendant son mouvement. Si le corps qui se meut n’étoit qu’un point, l’espace parcouru ne seroit qu’une ligne mathématique ; mais comme il n’y a point de corps qui ne soit étendu, l’espace parcouru a toujours quelque largeur. Quand on mesure le chemin d’un corps, on ne fait attention qu’à la longueur.

4°. La vitesse du mouvement, c’est la propriété qu’a le mobile de parcourir un certain espace en un certain tems. La vitesse est d’autant plus grande que le mobile parcourt plus d’espace en moins de tems. Si le corps A parcourt en deux minutes un espace auquel le corps B emploie quatre minutes, la vitesse du corps A est double de celle du corps B. Il n’y a point de mouvement sans une vitesse quelconque, car tout espace parcouru est parcouru dans un certain tems ; mais ce tems peut être plus ou moins long à l’infini. Par exemple, un espace que je suppose être d’un pié, peut être parcouru par un corps en une heure ou dans une minute, qui est la 60e partie d’une heure, ou dans une seconde, qui en est la 3600e partie, &c. Le mouvement, c’est-à-dire la vitesse, peut être uniforme ou non uniforme, accélérée ou retardée, également ou inégalement accélérée & retardée. Voyez Vitesse.

5°. La masse des corps en vertu de laquelle ils résistent à la force qui tend à leur imprimer ou à leur ôter le mouvement. Les corps résistent également au mouvement & au repos. Cette résistance étant une suite nécessaire de leur force d’inertie, elle est proportionnelle à leur quantité de matiere propre, puisque la force d’inertie appartient à chaque particule de la matiere. Un corps résiste donc d’autant plus au mouvement qu’on veut lui imprimer, qu’il contient une plus grande quantité de matiere propre sous un même volume, c’est-à-dire d’autant plus qu’il a plus de masse, toutes choses d’ailleurs égales. Ainsi plus un corps a de masse, moins il acquiert de vitesse par la même pression, & vice versâ. Les vitesses des corps qui reçoivent des pressions égales sont donc en raison inverse de leur masse. Par la même raison le mouvement d’un corps est d’autant plus difficile à arrêter, que ce corps a plus de masse ; car il faut la même force pour arrêter le mouvement d’un corps qui se meut avec une vitesse quelconque, & pour communiquer à ce même corps le même degré de vitesse qu’on lui a fait perdre. Cette résistance-que tous les corps opposent lorsqu’on veut changer leur état présent, est le fondement de cette loi générale du mouvement, par laquelle la réaction est toujours égale à l’action. L’établissement de cette loi étoit nécessaire afin que les corps pussent agir les uns sur les autres, & que le mouvement étant une fois produit dans l’univers, il pût être communiqué d’un corps à un autre avec raison suffisante. Sans cette espece de lutte, il ne pourroit y avoir d’action ; car comment une force agiroit-elle sur ce qui ne lui oppose aucune résistance. Quand je tire un corps attaché à une corde, quelque aisément que je le tire, la corde est tendue également des deux côtés ; ce qui marque l’égalité de la réaction : & si cette corde n’étoit pas tendue, je ne pourrois tirer ce corps. Ceux qui demandent comment pouvez-vous faire avancer un corps, si vous êtes tiré par lui avec une force égale à celle que vous employez pour le tirer ; ceux, dis-je, qui font cette objection, ne remarquent pas que lorsque je tire ce corps, & que je le fais avancer, je n’emploie pas toute ma force à vaincre la résistance qu’il m’oppose ; mais lorsque je l’ai surmontée, il m’en reste encore une partie que j’emploie à avancer moi-même : & ce corps avance par la force que je lui ai communiquée, & que j’ai employée à surmonter sa résistance. Ainsi quoique les forces soient inégales, l’action & la réaction sont toujours égales. C’est cette égalité qui produit tous les mouvemens. Voyez Loi de la nature au mot Nature.

6°. La quantité de mouvement. La quantité dans un instant infiniment petit, est proportionnelle à la masse & à la vitesse du corps mû ; ensorte que le même corps a plus de mouvement quand il se meut plus vite, & que de deux corps dont la vitesse est égale, celui qui a le plus de masse a le plus de mouvement ; car le mouvement imprimé à un corps quelconque, peut être conçu divisé en autant de parties que ce corps contient de parties de matiere propre, & la force motrice appartient à chacune de ces parties, qui participent également au mouvement de ce corps en raison directe de leur grandeur. Ainsi le mouvement du tout est le résultat de toutes les parties, & par conséquent le mouvement est double dans un corps dont la masse est double de celle d’un autre, lorsque ces corps se meuvent avec la même vitesse.

7°. La direction du mouvement. Il n’y a point de mouvement sans une détermination particuliere ; ainsi tout mobile qui se meut tend vers quelque point. Lorsqu’un corps qui se meut n’obéit qu’à une seule force qui le dirige vers un seul point, ce corps se meut d’un mouvement simple. Le mouvement composé est celui dans lequel le mobile obéit à plusieurs forces : nous en parlerons plus bas. Dans le mouvement simple, la ligne droite tirée du mobile au point vers lequel il tend, représente la direction du mouvement de ce corps, & si ce corps se meut, il parcourra certainement cette ligne. Ainsi tout corps qui se meut d’un mouvement simple, décrit pendant qu’il se meut une ligne droite. M. Formey.

Le mouvement peut donc être regardé comme une espece de quantité, & sa quantité ou sa grandeur, qu’on appelle aussi quelquefois moment, s’estime 1°. par la longueur de la ligne que le mobile décrit ; ainsi un corps parcourant cent piés, la quantité de mouvement est plus grande que s’il n’en parcouroit que dix : 2°. par la quantité de matiere qui se meut ensemble ou en même tems, c’est-à-dire non par le volume ou l’étendue solide du corps, mais par sa masse ou son poids ; l’air & d’autres matieres subtiles, dont les pores du corps sont remplis, n’entrant point ici en ligne de compte : ainsi un corps de deux piés cubiques parcourant une ligne de cent piés, sa quantité de mouvement sera plus grande que celle d’un corps d’un pié cubique qui parcourra la même ligne ; car le mouvement que l’un des deux a en entier se trouve dans la moitié de l’autre, & le mouvement d’un corps total est la somme du mouvement de ses parties.

Il s’ensuit de-là qu’afin que deux corps aient des mouvemens ou des momens égaux, il faut que les lignes qu’ils parcourront soient en raison réciproque de leur masse, c’est-à-dire que si l’un de ces corps a trois fois plus de quantité de matiere que l’autre, la ligne qu’il parcourra doit être le tiers de la ligne qui sera parcourue par l’autre. C’est ainsi que deux corps attachés aux deux extrémités d’une balance ou d’un levier, & qui auront des masses en raison réciproque de leur distance du point d’appui, décriront s’ils viennent à se mouvoir, des lignes en raison réciproque de leur masse. Voyez Levier & Puissances méchaniques.

Par exemple si le corps A (Pl. de Méchan. fig. 30.) a trois fois plus de masse que B, & que chacun de ces corps soit attaché respectivement aux deux extrémités du levier AC, dont l’appui ou le point fixe est en C, de maniere que la distance BC soit triple de la distance CA, ce levier ne pourroit se mouvoir d’aucun côté sans que l’espace BE, que le plus petit corps parcourroit, fût triple de l’espace AD, que le plus grand parcourroit de son côté ; de sorte qu’ils ne pourroient se mouvoir qu’avec des forces égales. Or il ne sauroit y avoir de raison qui fît que le corps A tendant en bas par exemple, avec quatre degrés de mouvement, élevât le corps B ; plûtôt que le corps B tendant également en enbas avec ces quatre degrés de mouvement, n’éleveroit le corps A : on conclut donc avec raison qu’ils resteront en équilibre, & l’on peut déduire de ce principe toute la science de la méchanique.

On demande si la quantité de mouvement est toujours la même. Les Cartésiens soutiennent que le Créateur a imprimé d’abord aux corps une certaine quantité de mouvement, avec cette loi qu’il ne s’en perdroit aucune partie dans aucun corps particulier qui ne passât dans d’autres portions de matiere ; & ils concluent de-là que si un mobile en frappe un autre, le premier ne perdra de son mouvement que ce qu’il en communiquera au dernier. Voyez ce que nous avons dit sur ce sujet à l’article Percussion.

M. Newton renverse ce principe en ces termes. Les différentes compositions qu’on peut faire de deux mouvemens (voyez Composition), prouve invinciblement qu’il n’y a point toujours la même quantité de mouvement dans le monde ; car si nous supposons que deux boules jointes l’une à l’autre par un fil, tournent d’un mouvement uniforme autour de leur centre commun de gravité, & que ce centre soit emporté en même tems uniformément dans une droite tirée sur le plan de leur mouvement circulaire, la somme du mouvement des deux boules sera plus grande lorsque la ligne qui les joint sera perpendiculaire à la direction du centre, que lorsque cette ligne sera dans la direction même du centre, d’où il paroit que le mouvement peut & être produit & se perdre ; de plus, la tenacité des corps fluides & le frottement de leurs parties, ainsi que la foiblesse de leur force élastique, donne lieu de croire que la nature tend plûtôt à la destruction qu’à la production du mouvement ; aussi est-il vrai que la quantité de mouvement diminue toujours, car les corps qui sont ou si parfaitement durs, ou si mols, qu’ils n’ont point de force élastique, ne rejailliront pas après le choc, leur seule impénétrabilité les empêche de continuer à se mouvoir ; & si deux corps de cette espece égaux l’un à l’autre se rencontroient dans le vuide avec des vitesses égales, les lois du mouvement prouvent qu’ils devroient s’arrêter dans quelqu’endroit que ce fut, & qu’ils y perdroient leur mouvement ; ainsi des corps égaux, & qui ont des mouvemens opposés, ne peuvent recevoir un grand mouvement après le choc, que de la seule force élastique ; & s’ils en ont assez pour le faire rejaillir avec de la force avec laquelle ils se sont rencontrés, ils perdront en ces différens cas de leur mouvement. C’est aussi ce que les expériences confirment ; car si on laisse tomber deux pendules égaux d’égale hauteur & dans le même plan, de façon qu’ils se choquent, ces deux pendules, s’ils sont de plomb ou d’argille molle, perdront si-non tout, au moins une partie de leur mouvement ; & s’ils sont de quelque matiere élastique, ils ne retiendront de leur mouvement qu’autant qu’ils en reçoivent de leur force élastique. V. Elastique.

Si l’on demande comment il arrive que le mouvement qui se perd à tout moment se renouvelle continuellement, le même auteur ajoute qu’il est renouvellé par quelque principe actif, tel que la cause de la gravité par laquelle les planetes & les cometes conservent leur mouvement dans leur orbite, par laquelle aussi tous les corps acquierent dans la chute un degré de mouvement considérable, & par la cause de la fermentation qui fait conserver au cœur & au sang des animaux, une chaleur & un mouvement continuel, qui entretient continuellement dans la chaleur les parties intérieures de la terre, qui met en feu plusieurs corps, & le soleil lui-même ; comme aussi par l’élasticité au moyen de laquelle les corps se remettent dans leur premiere figure ; car nous ne trouvons guere d’autre mouvement dans le monde que celui qui dérive ou de ces principes actifs, ou du commandement de la volonté : Voyez Gravité, Fermentation, Elasticité, &c.

Quant à la continuation du mouvement, ou la cause qui fait qu’un corps une fois en mouvement persévere dans cet état, les Physiciens ont été fort partagés là-dessus, comme nous l’avons déja remarqué. C’est cependant un effet qui découle évidemment de l’une des grandes lois de la nature, savoir que tous les corps perséverent dans leur état de repos ou de mouvement, à moins qu’ils n’en soient empêchés par des forces étrangeres ; d’où il s’ensuit qu’un mouvement une fois commencé continueroit à l’infini, s’il n’étoit interrompu par différentes causes, comme la force de la gravité, la résistance du milieu, &c. de sorte que le principe d’Aristote, toute substance en mouvement affecte le repos, est sans fondement. Voyez Force d’inertie.

On n’a pas moins disputé sur la communication du mouvement, ou sur la maniere dont les corps mus viennent en affecter d’autres en repos, ou enfin sur la quantité de mouvement que les premiers communiquent aux autres ; on en peut voir les lois aux mots Percussion & Communication.

Nous avons observé que le mouvement est l’objet des méchaniques, & que les méchaniques sont la base de toute la philosophie naturelle, laquelle ne s’appelle méchanique que par cette raison. Voyez Méchanique.

En effet, tous les phénomenes de la nature, tous les changemens qui arrivent dans le système des corps, doivent s’attribuer au mouvement, & sont réglés par ses lois.

C’est ce qui a fait que les philosophes modernes se sont appliqués avec beaucoup de soin à cette science, & qu’ils ont cherché à découvrir les propriétés & les lois du mouvement, soit par l’expérience, soit en y employant la Géométrie. C’est à leur travail que nous sommes redevables des grands avantages que la Philosophie moderne a sur celle des anciens. Ceux-ci négligeoient fort le mouvement, quoiqu’ils parussent d’un autre côté en avoir si bien senti l’importance, qu’ils définissoient la nature, le premier principe du mouvement & du repos des substances. Voyez Nature.

Il n’y a rien sur le mouvement dans les livres des anciens, si l’on en excepte le peu que l’on trouve dans les livres d’Archimede, de æcquiponderantibus. On doit en grande partie la science du mouvement à Galilée ; c’est lui qui a découvert les regles générales du mouvement, & en particulier celle de la descente des graves qui tombent verticalement ou sur des plans inclinés ; celles du mouvement des projectiles, des vibrations des pendules, objets dont les anciens n’avoient que fort peu de connoissance. Voyez Descente, Pendule, Projectile, &c.

Torricelli son disciple, a perfectionné & augmenté les découvertes de son maître, & y a ajouté diverses expériences sur la force de percussion & l’équilibre des fluides. Voyez Percussion & Fluide. M. Huyghens a beaucoup perfectionné de son côté la science des pendules & la théorie de la percussion ; enfin Newton, Leibnitz, Varignon, Mariotte, &c. ont porté de plus en plus la science du mouvement à sa perfection. Voyez Méchanique, &c.

Le mouvement peut être regarde comme uniforme & comme varié, c’est-à-dire accéléré ou retardé ; de plus le mouvement uniforme peut être considéré comme simple ou comme composé, le composé comme rectiligne ou comme curviligne.

On peut encore considérer tous ces mouvemens ou en eux-mêmes, ou eu égard à leur production & à leur communication par le choc, &c.

Le mouvement uniforme est celui par lequel le corps se meut continuellement avec une même vitesse invariable. Voyez Uniforme.

Voici les lois du mouvement uniforme. Le lecteur doit observer d’abord que nous allons exprimer la masse ou la quantité de matiere par M, le moment ou la quantité de mouvement ou l’effort par E, le tems ou la durée du mouvement par T, la vitesse ou la rapidité du mouvement par V, & l’espace ou la ligne que le corps décrit, par S. Voyez Moment, Masse, Vitesse, &c.

De même l’espace étant = s & le tems = t, la vitesse sera exprimée par , & si la vitesse = u, & la masse = m, le moment sera pareillement = um.

Lois du mouvement uniforme. 1°. Les vitesse V & u de deux corps qui se meuvent uniformément sont en raison composée de la directe des espaces S & s & de l’inverse des tems T & t,

car , & ,

donc ,

donc .

C. Q. F. D.

Ce théoreme & les suivans peuvent être rendus sensibles en nombre de cette sorte : supposons qu’un corps A dont la masse est comme 7, c’est-à-dire de 7 livres, décrive dans 3″ de tems un espace de 12 piés, & qu’un autre corps B dont la masse est comme 5, décrive en 8″ un espace de 16 piés, nous aurons donc M = 7, T = 3, S = 12, m = 5, t = 8, s = 16, & par conséquent V = 4, u = 2 ; ce qui réduira notre formule

en cette forme
,


par conséquent si V = u on aura St = sT, & ainsi

,


c’est-à-dire que si deux corps se meuvent uniformément & avec la même vitesse, les espaces seront entr’eux comme les tems. On peut donner en nombre des exemples des corollaire, comme du théoreme, ainsi supposant S = 12, T = 6, s = 8, t = 4, on aura , &

par conséquent, puisque V = u,
,
.


Si V = u & t = T, on aura S = s, ainsi les corps qui se meuvent uniformément & avec la même vitesse, doivent décrire en tems égaux des espaces égaux.

2°. Les espaces S & s que les corps décrivent sont en raison composée des tems T & t & des vitesses V & u,

car V·u ∷ St·sT,
donc VsT = uSt,
& S·s ∷ VT·ut,


en nombres 12.8 ∷ 2×6·2×4,
par conséquent si S=s, on a VT=ut ; de façon que V·u ∷ t·T, c’est-à-dire si deux corps qui se meuvent uniformément, décrivent des espaces égaux, leurs vitesses seront en raison réciproque des tems. En nombres, si nous supposons S=12, & s=12, comme S=VT, & s=ut, si V=2, & u=3, on aura T=6, & t=4, de façon qu’il viendra aussi V·u=2·T ; de plus si t=T, 2·3 ∷ 4·6, on aura alors V=u, & par conséquent les corps qui se meuvent uniformément, & décrivent des espaces égaux dans des tems égaux, ont des vitesses égales.

3°. Les momens ou quantités de matiere E & e de deux corps qui se meuvent uniformément, sont en raison composée des vitesses V & u, & des masses ou quantités de matieres M & m, car si E=VM, e=um, on aura donc E·e ∷ VM·um ; c’est-à-dire que la raison de E à e est composée de celle de V à u, & de M à m.

Si E=e, on aura donc VM=um, & par conséquent V·u ∷ m·M, c’est-à dire que si les momens de deux corps qui se meuvent uniformément sont égaux, leurs vitesses seront en raison réciproque de leurs masses, & par conséquent si M est outre cela égale à m, V sera égal à u, c’est-à-dire que si les momens & les masses de deux corps sont égaux, leurs vitesses le seront aussi.

4°. Les vitesses V & u de deux corps qui se meuvent uniformément, sont en raison composée de là directe des momens E & e, & de la réciproque des masses M & m,

car puisque E·e ∷ VM·um,
donc Eum = eVM,
& V·u = Em·eM,


en nombres 4 : 2 ∷ 28×5 : 10×7 ∷ 4×1 : 2×1 ∷ 4·2, donc si V=u, on aura Em=eM, & par conséquent E·e ∷ M·m ; c’est-à-dire que si deux corps se meuvent uniformément & avec la même vitesse, leurs momens seront dans la même raison que leurs masses. Si de plus M=m, alors E=e, & par conséquent deux corps dont les masses sont égales, & qui se meuvent uniformément avec des vitesses égales, ont nécessairement des momens égaux.

5°. Dans un mouvement uniforme les masses M & m des corps sont en raison composée de la directe des momens E & e, & de la réciproque des vitesses V & u,

car puisque E. e ∷ VM·um,
donc Eum=eMV,
M·m = Eu·eV,


en nombres 7 : 5 ∷ 28×2 : 10×4 ∷ 7×1 : 5×1 ∷ 7 : 5. Si M=m, on aura alors Eu=eV, & par conséquent E·e ∷ V·u, c’est-à-dire que si deux corps qui se meuvent uniforme ment ont des masses égales, leurs momens seront entr’eux comme leurs vitesses, supposons en nombres E=12, e=8, M=4, m=4,

on aura V = , & u = ,
donc E·e ∷ V·u,
12·8 ∷ 3·2.

6°. Dans un mouvement uniforme les momens E & c, sont en raison composée des directes des masses M & m, & des espaces S & s, & de la réciproque des tems T & t,

car à cause que V·u ∷ St·sT,
& E·e ∷ VM·um,
donc VE·ue ∷ VMSt·umsT,
donc E·e ∷ MSt·msT,


par conséquent si E=e, on aura MSt=msT, & ainsi , , & , c’est-à-dire si deux corps qui se meuvent uniformément, ont outre cela des momens égaux, 1°. leurs masses seront en raison composée de la directe des tems & de la réciproque des espaces : 2°. les espaces seront en raison composée de la directe des tems & de la réciproque des masses : 3°. les tems seront en raison composée des masses & des espaces. Que si de plus M=m, on aura alors sT=St, & par conséquent S·s ∷ T·t, c’est-à-dire que si deux corps qui se meuvent uniformément ont des momens égaux & des masses égales, les espaces qu’ils parcourront seront proportionnels aux tems.

Si de plus T=t, on aura aussi S=s, & ainsi deux corps qui se meuvent avec des masses & des momens égaux, décrivent des espaces égaux en tems égaux.

Si E=e, & S=s, on aura Mt=mT, & par conséquent M·m ∷ T·t, c’est-à-dire que deux corps qui se meuvent uniformément avec des momens égaux, & qui décrivent des espaces égaux, doivent avoir des masses proportionnelles aux tems qu’ils emploient à décrire ces espaces.

Si outre cela T=t, on aura aussi M=m, & par conséquent des corps dont les momens sont égaux, & qui se mouvant uniformément, décrivent des espaces égaux dans des tems égaux, doivent aussi avoir des masses égales.

Si E=e, & T=t, on aura alors MS=ms, & par conséquent S : s ∷ m·M ; c’est-à-dire que les espaces parcourus dans un même tems, & d’un mouvement uniforme par deux corps dont les momens sont égaux, sont en raison réciproque des masses.

7°. Dans un mouvement uniforme les espaces S & s sont en raison composée des directes des momens E & e, & des tems T & t, & de la réciproque des masses m & M,

car puisque E·e ∷ MSt·msT,
EmsT = eMSt,
par conséquent S·s ∷ ETm·etM,


en nombres 12 : 16 ∷ 3×28×5 : 8×10×7 ∷ 3×4×1 : 8×2×1 ∷ 12 : 16, d’où il s’ensuit que si S=s, ETm sera égal à etM, & que par conséquent E·e ∷ tM·Tm, M·m ∷ ET·et·T·t ∷ eM·Em.

Ainsi en supposant que deux corps parcourent des espaces égaux d’un mouvement uniforme, 1°. leurs momens seront en raison composée de la directe des masses & de la réciproque des tems : 2°. leurs masses seront en raison composée des momens & des tems : 3°. les tems seront en raison composée de la directe des masses & de la réciproque des momens.

Si outre S=s, on suppose encore M=m, on aura aussi ET=et, & par conséquent E·e ∷ t·T. c’est-à-dire que des corps dont les masses sont égales, & qui parcourent des espaces égaux, ont des momens réciproquement proportionnels aux tems qu’ils emploient à parcourir ces espaces.

Si outre S=s, on suppose encore T=t, il s’ensuivra que eM=Em, & par conséquent deux corps qui se meuvent uniformément, en parcourant les mêmes espaces dans les mêmes tems, ont des momens proportionnels à leurs masses.

8°. Deux corps qui se meuvent uniformément ont des masses M & m en raison composée des directes des momens E & e, & des tems T & t, & de la réciproque des espaces s & S,

car puisque E·e ∷ MSt·msT, EmsT = eMSt,
donc M·m ∷ ETs·etS,


en nombres 7 : 5 ∷ 3×28×16 : 8×10×12 ∷ 3×7×2 : 1×10×3 ∷ 7 : 5,

de plus E·e ∷ MSt·msT, en nombres 28 : 10 ∷ 7×12×8 : 5×16×3 ∷ 7×4×1 : 5×2×1 ∷ 28 : 10, & par conséquent si M=m, on aura ETs=etS, & par conséquent E·e ∷ tS·Ts, S·s ∷ ET. et, & T·t ∷ eS·Es, c’est-à-dire que si deux mobiles ont des masses égales, 1°. les momens seront en raison composée de la directe des espaces & de la réciproque des tems : 2°. les espaces seront en raison composée des momens & des tems : 3°. les tems seront en raison composée de la directe des espaces & de la réciproque des momens.

Si outre M=m, on suppose encore T=t, on aura donc eS=Es, & par conséquent e·E ∷ s·S, c’est-à-dire que dans le mouvement uniforme, les momens de deux corps dom les masses sont égales, sont proportionnels aux espaces parcourus dans des tems égaux.

9°. Dans des mouvemens uniformes, les tems T & t sont en raison composée des directes des masses M & m, & des espaces S & s, & de la réciproque des momens E & e,

car puisque E·e ∷ MSt·msT, EmsT=eMSt,
donc T·t ∷e MS·Ems,


d’où il s’ensuit que si T=t, on aura eMS=Ems, & par conséquent E·e ∷ MS·ms, M·m ∷ Es·eS & S·s ∷ Em·eM, c’est-à dire que si deux corps se meuvent uniformément dans des tems égaux, 1°. leurs momens seront en raison composée des masses & des espaces : 2°. les masses seront en raison composée de la directe des momens & de la réciproque des espaces : 3°. les espaces seront en raison composée de la directe des momens & de la réciproque des masses.

Mouvement accéléré ; c’est celui qui reçoit continuellement de nouveaux accroissemens de vitesse ; il est dit uniformément accéléré quand ces accroissemens de vitesses sont égaux en tems égaux. Voyez Accélération.

Mouvement retardé ; c’est celui dont la vitesse diminue continuellement ; il est dit uniformément retardé, lorsque la vitesse décroît proportionnellement aux tems. Voyez Retardation.

En général on peut représenter les lois du mouvement uniforme, ou varié, suivant une loi quelcônque, par l’équation d’une courbe, dont les abscisses expriment les tems t, & les ordonnées correspondantes les espaces parcourus pendant ces tems. Si e=nt, n, étant un nombre constant, les espaces seront comme les tems, & le mouvement sera uniforme. S’il y a entre e & t quelqu’autre équation, le mouvement sera varié ; si on n’a point d’équation finie entre e & t, on pourra exprimer le rapport de e à t par une équation différentielle, de=Rdt, R étant une fonction de e & de t, laquelle représente la vitesse ; & il est à remarquer que puisque , le mouvement sera accéléré si la différence de R est positive, & retardé si elle est négative (voyez Vitesse & Force) ; car dans le premier cas, la vitesse R ira en croissant, & dans le second, en décroissant.

C’est un axiome de méchanique, comme on l’a déjà remarqué, qu’un corps qui est une fois en repos ne se mouvera jamais, à moins qu’il ne soit mis en mouvement par quelqu’autre corps, & que tout corps qui est une fois en mouvement, continuera toujours à se mouvoir avec la même vitesse & dans la même direction, à moins que quelqu’autre corps ne le force à changer d’état.

On doit conclure de là-qu’un corps mu par une seule impulsion doit continuer à se mouvoir en ligne droite, & que s’il est emporté dans une courbe, il doit être poussé au moins par deux forces, dont l’une, si elle étoit seule, le feroit continuer en ligne droite, & dont l’autre, ou les autres, l’en détournent continuellement.

Si l’action & la réaction de deux corps (non élastiques) est égale, il ne s’ensuivra aucun mouvement de leur choc ; mais les corps resteront après le choc en repos l’un contre l’autre.

Si un mobile est poussé dans la direction de son mouvement, il sera accéléré ; s’il est poussé par une force qui résiste à son mouvement, il sera alors retardé ; les graves descendent par un mouvement accéléré.

10°. Si un corps se meut avec une vitesse uniformément accélérée, les espaces qu’il parcourra seront en raison doublée des tems qu’il aura employés à les franchir ; car que la vitesse acquise dans les tems t soit=u, celle que le grave acquerra dans le tems 2t, sera 2u, dans le tems 3t, sera 3u, &c. & les espaces correspondans à ces tems t, 2t, 3t, seront proportionnels à tu, 4tu, 9tu, par conséquent ces espaces seront comme 1, 4, 9, &c. Les tems étant de leur côté comme 1, 2, 3, &c. il est donc vrai que les espaces seront en raison doublée des tems. Voyez Accélération.

D’où il s’ensuit que dans le mouvement uniformément accéléré, les tems sont en raison soudoublée des espaces.

11°. Les espaces parcourus par un corps qui se meut d’un mouvement uniformément accéléré, croissent dans des tems égaux comme les nombres impairs 1, 3, 5, 7, &c.

Car si les tems qu’un mobile uniformément accéléré emploie dans son mouvement, sont comme 1, 2, 3, 4, 5, &c. on a vû que les espaces qu’il parcourra seront dans le premter tems 1 comme 1, dans 2 comme 4, dans 3 comme 9, dans 4 comme 16, dans 5 comme 25 (10e loi), & ainsi soustrayant l’espace parcouru dans le premier tems, savoir 1, de l’espace parcouru en 2, savoir 4, il restera l’espace parcouru dans le second moment seulement, savoir 3. On trouvera semblablement que l’espace parcouru dans le troisieme tems seulement, sera 9−4=5, que l’espace parcouru dans le quatrieme, sera 16−9=7, & ainsi des autres. L’espace correspondant au premier tems, sera donc 1, celui du second 3, celui du troisieme 5, celui du quatrieme 7, celui du cinquieme 9, &c. & ainsi les espaces parcourus par un mobile qui se meut d’un mouvement uniformément accéléré, croissent dans des tems égaux comme les nombres impairs 1, 3, 5, 7, &c. C. Q. F. D.

12°. Les espaces parcourus par un corps qui se meut d’un mouvement uniformement accéléré, & en commençant par partir du repos, sont en raison doublée des vitesses.

Car nommons les vitesses V & u, les tems T & t, les espaces S & s ; puisque le corps part du repos, la quantité de vitesse à chaque instant ne dépend que du nombre d’accélération que le corps a reçu ; & comme il en reçoit par hypothese, d’égales en tems égaux, & par conséquent un nombre proportionnel au tems, il s’ensuit de là que les vitesses à chaque instant doivent être proportionnelles aux tems ; ainsi V est à u comme T est à t : donc puisqu’en vertu de la 10e loi  ; on aura . C. Q. F. D.

Donc dans les mouvemens uniformément accélérés, les vitesses sont en raison soudoublée des espaces.

13°. Dans les milieux non résistans, & dans des espaces peu grands, les graves descendent d’un mouvement uniformément accéléré, ou qui doit être censé tel ; car les graves ne descendent avec une vitesse accélérée, qu’autant que quelque force étrangere agit continuellement sur eux pour augmenter leur vitesse, & on n’en sauroit imaginer d’autre ici que celle de la gravité ; mais la force de la gravité doit être censée par tout la même près de la surface de la terre, parce qu’on y est toujours à des intervalles du centre fort grands, & peu différens les uns des autres ; & les expériences qu’on a pu faire à quelque distance que ç’ait été de la terre, n’y ont fait trouver en effet aucune différence sensible ; les corps graves doivent par conséquent être sollicités en embas d’une maniere semblable en tems égaux : donc si dans le premier moment de tems, cette forcè leur donne la vitesse V, elle leur donnera encore la même vitesse dans le moment suivant, ainsi du troisieme, du quatrieme, &c. De plus, comme nous supposons le milieu sans résistance, les graves conserveront la vitesse qu’ils auront acquise ; & ainsi comme ils acquerront à tout moment de nouvelles augmentations égales, il faudra qu’ils descendent d’un mouvement uniformément accéléré, C. Q. F. D. Voyez Gravité.

Les espaces dont les corps seront descendus, seront donc dans les mêmes suppositions, comme les quarrés des tems & des vitesses, & leurs différences croîtront comme la suite des nombres impairs, 1, 3, 5, 7, &c. & les tems ainsi que les vitesses seront en raison soudoublée des espaces.

Quand nous supposons que le grave descend dans un milieu non résistant, nous entendons exclure aussi toutes sortes d’empêchemens de quelque espece que ce soit, ou de quelque cause qu’ils procedent, & généralement nous faisons abstraction de toutes les causes qui pourroient altérer le mouvement produit par la seule gravité.

C’est Galilée qui a découvert le premier la loi de la descente des graves par le raisonnement, quoiqu’il ait ensuite confirmé sa découverte par des expériences ; il les répéta plusieurs fois, sur-tout sur des plans inclinés, & trouva toujours les espaces parcourus proportionnels aux quarrés des tems. Riccioli & Grimaldi ont fait aussi les mêmes expériences, mais d’une maniere différente. Voyez Descente.

14°. Si un grave tombe dans un milieu sans résistance, l’espace qu’il décrira sera soudouble de celui qu’il auroit décrit dans le même tems par un mouvement uniforme, & avec une vitesse égale à celle qu’il se trouve avoir acquise à la fin de la chûte. Car (voyez Pl. de Méchan. fig. 31.) que la ligne AB représente le tems total de la descente d’un grave, & qu’elle soit divisée en un nombre quelconque de parties égales ; tirez aux extrémités des abcisses AP, AQ, AS, AB ; des ordonnées droites PM, QI, SH, BC, qui puissent représenter les vitesses acquises par la descente à la fin de ces tems, puisque AP est à AQ comme PM est à QI, & AP est à AS, comme PM est à SH, &c. Si l’on conçoit donc que la hauteur du triangle soit divisée en parties égales & infiniment petites, le mouvement pouvant être censé uniforme dans un moment de tems infiniment petit, la petite aire PpMm égale à , sera proportionnelle à l’espace parcouru dans le tems Pp ; ainsi l’espace parcouru dans le tems Ap, sera comme la somme de toutes les petites aires, c’est-à-dire comme le triangle ABC. Mais l’espace qui auroit été décrit dans le même tems AB avec la vitesse uniforme BC auroit été proportionnelle au rectangle ABCD ; le premier de ces espaces est donc à l’autre comme 1 à 2 ; ainsi l’espace que le mobile pourroit parcourir uniformément avec la vitesse BC dans la moitié du tems AB, est égal à l’espace qu’il parcourt avec une accélération uniforme, après être tombé du repos & dans le tems total AB.

15°. Si un corps se meut d’un mouvement uniformément retardé, il ne parcourra en remontant que la moitié de l’espace qu’il auroit parcouru s’il s’étoit mu uniformément avec la même vitesse initiale, car supposons le tems donné divisé en un nombre quelconque de parties égales, & tirons les droites BC, SH, QI, PM qui représenteront les vitesses correspondantes aux parties de tems exprimées par O, BS, BQ, BP, BA ; de façon qu’abaissant les perpendiculaires HE, IF, MG, les droites CE, CF, CG, CB, soient comme les vitesses perdues dans les tems HE, FI, GM, AB, c’est-à-dire BS, BQ, BF, BA. Or puisque CE est à CF comme EH est à FI, & que CG est à CB comme GM est à BA, ABC sera donc par conséquent un triangle. Si donc BPp est un moment de tems infiniment petit, le mouvement sera uniforme, & par conséquent l’espace décrit par le mobile sera comme le petit espace BbcC, ou PpmM ; donc tout l’espace décrit par ce même mobile dans le tems AB, sera comme le triangle CBA ; or l’espace que le mobile auroit décrit uniformément avec la vitesse BC, est comme le rectangle ABCD : le premier est donc la moitié de l’autre.

16°. Les espaces décrits dans des tems égaux par un mouvement uniformément retardé, décroissent comme les nombres impairs : car que les parties égales BS, SQ, QP, PA, de l’axe du triangle soient comme les tems, & que les demi-ordonnées BC, SH, QI, PM, soient comme les vitesses au commencement de chaque tems, les trapeses BSHC, SQIH, QPMI, & le triangle PAM seront donc comme les espaces décrits en ces tems là ; soit maintenant , & que , SH sera donc=3, ,  ; BSHC sera  ; SqIH sera , , , & par conséquent les espaces décrits en tems égaux seront comme , , , , c’est-à-dire comme 7, 5, 3, 1.

Pour la cause de l’accélération du mouvement, voyez Gravité & Accélération.

Pour la cause de la retardation, voyez Résistance & Retardation.

Les lois de la communication du mouvement par le choc sont fort différentes, suivant que les corps sont ou élastiques ou non, & que la direction du choc est directe ou oblique, eu égard à la ligne qui joint le centre de gravité des deux corps.

Les corps qui reçoivent ou qui communiquent le mouvement, peuvent être ou entierement durs, c’est-à-dire incapables de compression, ou entierement mous, c’est-à-dire incapables de restitution après la compression de leurs parties ; ou enfin à ressort, c’est-à-dire capables de reprendre leur premiere forme après la compression. Ces derniers peuvent encore être à ressort parfait ; de sorte qu’après la compression, ils reprennent entierement leur figure ; ou à ressort imparfait, c’est-à-dire capables de la reprendre seulement en partie. Nous ne connoissons point de corps entierement durs ni entierement mous, ni à ressort parfait ; car comme dit M. de Fontenelle, la nature ne souffre point de précision.

Lorsqu’un corps en mouvement rencontre un obstacle, il fait effort pour déranger cet obstacle : si cet effort est détruit par une résistance invincible, la force de ce corps est une force morte, c’est-à-dire qu’elle ne produit aucun effet, mais qu’elle tend seulement à en produire un. Si la résistance n’est pas invincible, la force est alors une force vive, car elle produit un effet réel, & cet effet est ce qu’on appelle force vive dans les corps. Sa quantité se connoît par la grandeur & le nombre des obstacles que le corps en mouvement peut déranger en épuisant sa force. Voyez Force.

Voici à quoi peut se réduire tout ce qui a rapport au choc des corps non élastiques, lorsque le coup ou le choc est direct.

17°. Un mobile qui en frappe un en repos lui communiquera une portion de mouvement telle qu’après le choc ils aillent tous deux de compagnie, & dans la direction du premier, & que le moment ou la quantité de mouvement des deux corps après le choc, se trouve être la même que le premier d’entr’eux avoit seul avant le choc.

Car c’est l’action du premier de ces corps qui donne à l’autre tout le mouvement que celui-ci prend à l’occasion du choc, & c’est la réaction du dernier qui enleve au premier une partie de son mouvement ; or comme l’action & la réaction doivent être toujours égales, le moment acquis par l’un doit être précisément égal au moment perdu par l’autre ; de façon que le choc n’augmente ni ne diminue le moment des deux corps pris ensemble.

Il s’ensuit de-là que la vitesse après le choc, laquelle est comme on vient de le remarquer, la même dans les deux corps, se trouve en multipliant la masse du premier corps par la vitesse avant le choc, & divisant ensuite le produit par la somme des masses : on peut conclure encore de-là, que si un corps en mouvement en choque un autre qui se meuve dans la même direction, mais plus lentement, ils continueront tous deux après le choc à se mouvoir dans la même direction, mais avec une vitesse différente de celle qu’ils avoient, & qui sera la même pour les deux, & les momens ou les sommes des mouvemens resteront les mêmes après le choc qu’avant le choc.

Si deux corps égaux se meuvent l’un contre l’autre avec des vitesses égales, ils resteront tous deux en repos après le choc. Voyez les articles Communication & Percussion.

Mouvement simple est celui-qui est produit par une seule force ou puissance.

Mouvement composé est celui qui est produit par plusieurs forces ou puissances qui conspirent à un même effet. Voyez Composition.

Les forces ou puissances sont dites conspirer, lorsque la direction de l’une n’est pas absolument opposée à celle de l’autre ; comme lorsqu’on imagine que le rayon d’un cercle tourne autour de son centre, & que l’un des points du rayon est en même tems poussé le long de ce même rayon.

Tout mouvement curviligne est composé, comme réciproquement tout mouvement simple est rectiligne.

18°. Si un mobile A (fig. 26.) est poussé par une double puissance, l’une suivant la direction AB, l’autre suivant la direction AC, il décrira en vertu du mouvement composé de ces deux-là, la diagonale d’un parallélogramme AD, dont il auroit décrit les côtés AB ou AC, s’il n’avoit été animé que de l’une des deux forces, & dans le même tems qu’il auroit employé en ce cas à parcourir ces deux côtés.

Car si le corps A n’étoit poussé que par la force imprimée suivant AB, il se trouveroit dans le premier instant dans quelques points de la droite AB comme en H, & par conséquent dans la ligne HL parallele à AC ; & s’il n’étoit animé que de la seule force qui lui est imprimée selon AC, il se trouveroit au même instant dans quelque point de la ligne AC comme en I, lequel point I est tel que AI est à AH comme AB est à AC ; c’est ce qu’on peut déduire aisément des lois du mouvement uniforme exposées ci-dessus : & par conséquent le corps se trouveroit dans la ligne IL parallele à AE. Mais puisque les directions des puissances ne sont point opposées l’une à l’autre, nulle d’elles ne sauroit empêcher l’effet de l’autre, & par conséquent le corps arrivera dans le même instant de tems dans HL & dans IL. Il faudra donc qu’il se trouve à la fin de ce tems au point L, où ces deux droites se rencontrent. On verra de même que si on tire KM & MG paralleles à AB & AC, le corps se trouvera à la fin dans un autre instant en M, & enfin au bout du tems total en D. C. Q. F. D.

Donc puisqu’on peut construire un parallélogramme ABCD autour de toute droite AD, en faisant deux triangles égaux & opposés sur cette droite AD prise pour base commune, il s’ensuit de-là que tout mouvement rectiligne peut toujours s’il en est besoin, être considéré comme composé de deux autres.

Mais comme dans cette formation d’un parallélogramme autour de la droite AD, la proportion des côtés ACAD peut varier & être prise à volonté, de même aussi le mouvement selon AD peut être composé d’une infinité de manieres différentes, & ainsi un même mouvement rectiligne peut être composé d’une infinité de divers mouvemens simples, & par conséquent peut être décomposé suivant le besoin d’une infinité de manieres.

De-là il s’ensuit encore que si un mobile est tiré par trois puissances différentes, dont deux soient équivalentes à la troisieme, & cela suivant les directions BA, AC, AD (fig. 33.), ces puissances seront les unes aux autres en raison des droites BD, DA, DC, paralleles à leurs directions, c’est à dire en raison inverse des sinus des angles renfermés par les lignes de leur direction & la ligne de direction de la troisieme : car DB est à AD comme le sinus de l’angle BAD aux sinus de l’angle ABD.

19°. Dans le mouvement composé uniforme, la vitesse produite par les mouvemens qui conspirent est à la vitesse de chacun des deux pris séparément, comme la diagonale AD (fig. 26.), du parallélogramme ABCD, suivant les côtés desquels ils agissent, est à chacun de ces côtés AB ou AC.

Car en même tems que l’une des puissances emporteroit le mobile dans le côté AB du parallélograme, & l’autre dans le côté AC, elles l’emportent à elles deux lorsqu’elles le réunissent le long de la diagonale AD ; la diagonale AD est donc l’espace décrit par les forces conspirantes dans le même tems. Mais dans le mouvement uniforme, les vitesses sont comme les espaces parcourus dans un tems donné ; donc la vitesse provenant des forces conspirantes, est à la vitesse de chacune des forces en particulier comme AD à AB, ou à AC.

Ainsi les forces conspirantes étant données, c’est-à-dire la raison des vitesses étant donnée par les droites AB, AC données de grandeur, & la direction de ces forces étant donnée de position par ces lignes ou par l’angle qu’elles doivent faire, la vitesse & la direction du mouvement oblique sera aussi donnée, parce que la diagonale est alors donnée de grandeur & de position.

Néanmoins le mouvement oblique étant donné, les mouvemens simples ne le sont pas par-là réciproquement, parce qu’un même mouvement oblique peut être composé de plusieurs différens mouvemens simples.

20°. Dans les mouvemens composés produits par les mêmes forces, la vitesse est d’autant plus grande, que l’angle de direction est moindre, & elle est d’autant moindre qu’il est plus grand.

Car soit BAC le plus grand angle de direction (fig. 34.), & FAC le moindre, puisque les forces sont supposées les mêmes dans les deux cas, AC sera commun aux deux parallelogrames AFCE & BACD, & outre cela AB sera = AF : or il est évident que la diagonale AD appartient au cas du plus grand angle, & que la diagonale AE appartient au cas du plus petit, & qu’enfin ces diagonales sont décrites dans un même tems, parce que AB = AF : les vitesses sont donc entr’elles comme AD est à AE, c’est pourquoi AD étant moindre que AE, la vitesse dans le cas du plus grand angle est moindre que dans le cas du plus petit.

Ainsi la vitesse des forces conspirantes & l’angle de leur direction dans un cas particulier étant donnés, on peut dèslors déterminer la vitesse du mouvement composé, & par conséquent les rapports des vitesses produites par les mêmes forces sous différens angles de direction.

Donc 1°. si les forces composantes agissent dans la même direction, le mobile se meut plus vite ; mais la direction de son mouvement n’étant point changée, ce corps se meut d’un mouvement simple. 2°. Si ces deux forces sont égales & opposées l’une à l’autre, elles se détruisent mutuellement ; alors le corps ne sort point de sa place, & il n’y a aucun mouvement produit. 3°. Si les forces opposées sont inégales, elles ne se détruisent qu’en partie, & le mouvement qui en résulte est l’effet de la différence de ces deux forces, c’est-à-dire de l’excès de la plus grande sur la plus petite. 4°. Si ces deux forces font angle l’une avec l’autre, elles retarderont ou accéléreront le mouvement l’une de l’autre, selon que l’obliquité des lignes qui les représentent sera dirigée.

On voit aussi que l’on peut également considérer toutes les forces comme étant réunies dans une force qui les représente, ou cette force unique, comme étant divisée dans celles qui la composent. Cette méthode est d’un grand usage & d’une grande utilité dans les méchaniques, pour découvrir la quantité de l’action des corps qui agissent obliquement les uns sur les autres.

Par ce même principe on connoît le chemin d’un corps qui obéit a un nombre quelconque de forces qui agissent sur lui à la fois ; car lorsqu’on a déterminé le chemin que deux de ces forces font parcourir au mobile, ce chemin devient le côté d’un nouveau triangle, dont la ligne qui représente la troisieme force, devient le second côté, & le chemin du mobile la base. En procédant ainsi jusqu’à la derniere force, on connoîtra le chemin du mobile par l’action réunie de toutes les forces qui agissent sur lui.

Un corps peut éprouver plusieurs mouvemens à la fois, par exemple un corps que l’on jette horisontalement dans un bateau éprouve le mouvement de projectile qu’on lui communique, & celui que la pesanteur lui imprime à tout moment vers la terre ; il participe outre cela au mouvement du vaisseau dans lequel il est. La riviere sur laquelle est ce vaisseau s’écoule sans cesse, & ce corps participe à ce mouvement. La terre sur laquelle coule cette riviere tourne sur son axe en vingt-quatre heures : voilà encore un mouvement nouveau que le corps partage. Enfin la terre a encore son mouvement annuel autour du soleil, la révolution de ses poles, le balancement de son équateur, &c. & le corps que nous considérons participe à tous ces mouvemens ; néanmoins il n’y a que les deux premiers qui lui appartiennent, par rapport à ceux qui sont transportés avec le corps dans ce bateau ; car tous les corps qui ont un mouvement commun avec nous, sont comme en repos par rapport à nous.

La ligne courbe désigne toujours un mouvement composé. Décrire une ligne courbe, c’est changer à tout moment de direction. Si deux forces qui poussent un corps sont inégalement accélérées, ou bien si l’une est accélérée tandis que l’autre est uniforme, la ligne décrite par le corps en mouvement ne sera plus une ligne droite, mais une ligne courbe, dont la courbure est différente, selon la combinaison des inégalités des forces qui la font décrire ; car ce corps obéira à chacune des forces qui le poussent selon la quantité de leur action sur lui. Ainsi par exemple, s’il y a une des forces qui renouvelle son action à chaque instant, tandis que l’action de l’autre force reste la même, le chemin du mobile sera changé à tout moment ; & c’est de cette façon que tous les corps que l’on jette obliquement retombent vers la terre.

Le mouvement instantané d’un corps est toujours en ligne droite : la petitesse des droites que ce mobile parcourt à chaque instant nous empêche de les distinguer chacune en particulier, & tout cet assemblage de lignes droites infiniment petites, & inclinées les unes aux autres, nous paroît une seule ligne courbe. Mais chacune de ces petites droites représente la direction du mouvement à chaque instant infiniment petit, & elle est la diagonale d’un parallélogramme formé sur la direction des forces actuelles qui agissent sur ce corps. Ainsi le mouvement est toujours en ligne droite à chaque instant infiniment petit, de même qu’il est toujours uniforme.

Il y a un mouvement dans lequel les parties changent de place, quoique le tout n’en change point. C’est le mouvement relatif d’un corps qui tourne sur lui-même, comme la terre, par exemple, dans son mouvement journalier. Ce sont alors les parties de ce corps qui tendent à décrire les droites infiniment petites, dont nous venons de parler. Il y auroit encore bien des observations à faire sur ce vaste sujet, mais cet ouvrage n’est pas susceptible de détails plus amples. On peut lire les chapitres xj. & sij. des Institutions physiques de madame du Châtelet, dont nous avons extrait une partie de cet article ; la Physique de M. Muschembrock ; l’essai de M. de Crousaz sur le mouvement, qui fut couronné par l’académie des Sciences, & plusieurs autres ouvrages.

Sur les lois particulieres du mouvement qui est produit par la collision des corps élastiques ou non élastiques, soit que leurs directions soient perpendiculaires, soit qu’elles soient obliques. Voyez Percussion.

Sur les mouvemens circulaires & les lois des projectiles, voyez Force centrale & Projectile.

Sur les mouvemens des pendules & leur oscillation, voyez Pendule & Oscillation.

Le célebre problème du mouvement perpétuel consiste à imaginer une machine qui renferme en elle-même le principe de son mouvement. M. de la Hire en soutient l’impossibilité, & dit que ce problème revient à celui-ci, trouver un corps qui soit en même tems plus pesant & plus leger, ou bien un corps qui soit plus pesant que lui-même. Voyez Machine & Perpètuel.

Mouvement intestin marque une agitation intérieure des parties dont un corps est composé. Voyez Fermentation, Effervescence, &c.

Quelques philosophes pensent que toutes les particules des fluides sont dans un mouvement continuel, & cette propriété est contenue dans la définition même que plusieurs d’entr’eux donnent de la fluidité (voyez Fluidité) ; & quant aux solides, ils jugent que leurs parties sont aussi en mouvement par les émissions qui sortent continuellement de leurs pores. Voyez Emission.

Suivant cette idée le mouvement intestin ne seroit autre chose qu’un mouvement des plus petites parties intestines de la matiere, excitées continuellement par quelque agent extérieur & caché, qui de lui-même seroit insensible, mais qui se découvriroit néanmoins par ses effets, & que la nature auroit destiné à être le grand instrument des changemens des corps.

Mouvement en Astronomie se dit particulierement du cours régulier des corps célestes. Voyez Soleil, Planete, Comete, &c.

Le mouvement de la terre d’occident en orient est une chose dont les Astronomes conviennent aujourd’hui généralement. Voyez Terre & Copernic.

Les mouvemens des corps célestes sont de deux especes, le diurne ou commun, le secondaire ou propre.

Le mouvement diurne, ou principal, c’est celui par lequel tous les corps célestes paroissent tourner chaque jour au-tour de la terre d’orient en occident. Voyez Diurne & Étoile.

Les divers phénomenes qui résultent de ce mouvement font l’objet principal de l’Astronomie.

Mouvement secondaire ou propre est celui par lequel une planete avance chaque jour d’occident en orient d’une certaine quantité. Voyez Planete. Voyez aussi les différens mouvemens de chaque planete, avec leurs irrégularités, aux articles Terre, Lune, Étoile, &c.

Mouvement angulaire, voyez Angulaire. (O)

Mouvement de l’apogée, dans le système de Ptolomée, est un arc du zodiaque du premier mobile, compris entre la ligne de l’apogée & le commencement du bélier.

Dans la nouvelle Astronomie, le mouvement de l’apogée de la lune est la quantité ou l’arc de l’écliptique, dont l’apogée de la lune avance à chaque révolution. Ce mouvement est d’environ 3°. 3′. desorte que la révolution totale de l’apogée se fait à-peu-près en neuf ans. Voyez Lune & Apogée. (O)

Mouvement animal, c’est celui qui change la situation, la figure, la grandeur des parties des membres des animaux. Sous ces mouvemens sont comprises toutes les fonctions animales, comme la respiration, la circulation du sang, l’excrétion, l’action de marcher, &c. Voyez Fonction.

Les mouvemens animaux se divisent d’ordinaire en deux especes, en spontanés & naturels.

Les spontanés ou musculaires sont ceux qui s’exécutent par le moyen des muscles & au gré de la volonté, ce qui les fait appeller volontaires. Voyez Mouvement musculaire.

Le mouvement naturel ou involontaire est celui auquel la volonté n’a pas de part, & qui s’exécute par le pur-méchanisme des parties, tels sont le mouvement du cœur, des arteres, le mouvement péristaltique des intéstins. Voyez Cœur & Péristaltique, &c.

Mouvement, (Méd. Diete.) se dit de l’action du corps, ou de l’exercice qui est nécessaire pour la conservation de la santé, & dont le défaut comme l’excès lui sont extrèmement préjudiciables.

C’est, en ce sens, une des choses de la vie qu’on appelle non-naturelles, qui influe le plus sur l’économie animale par ses bons ou par ses mauvais effets. Voyez Exercice, Hygieine, Non-naturelles (choses), Régime .

Mouvement, se dit dans l’Art militaire des évolutions, des marches, & des différentes manœuvres des troupes, soit pour s’approcher ou s’éloigner de l’ennemi, soit pour faire ou pour changer quelques dispositions particulieres dans l’ordre de bataille.

La science du mouvement des troupes est une des principales parties de celle du général. Celui qui la possede supérieurement, peut souvent vaincre son ennemi sans combat. Aussi les mouvemens savans & judicieux qu’un général fait exécuter à son armée, sont-ils des marques plus certaines de son intelligence & de son génie, que le succès d’une bataille où le hasard a quelquefois plus de part que l’habileté du commandant.

C’est par des mouvemens de cette espece que César sut réduire, en Espagne, Afranius sans combat ; que M. de Turenne étoit au moment de triompher de Montecuculi lorsqu’il fut tué ; & que M. le maréchal de Crequi trouva le moyen, en 1677, d’empêcher le duc de Lorraine, qui avoit une armée supérieure, de rien entreprendre contre lui.

Dans les différens mouvemens que l’on fait exécuter aux troupes deux choses méritent beaucoup d’attention ; la simplicité & la vivacité de ces mouvemens. Il est dangereux d’en faire devant l’ennemi, qui dérangent l’ordre de bataille, lorsqu’il est à portée de tomber sur les troupes qui les exécutent ; mais le danger disparoît lorsqu’on est assuré qu’il est trop éloigné pour pouvoir en profiter : le tems, pour cet effet, doit être apprécié avec la plus grande justesse. C’est par des mouvemens bien exactement combinés qu’on peut surprendre l’ennemi, lui cacher ses desseins, & l’obliger souvent de quitter un poste avantageux où il seroit très-difficile de le combattre & de le vaincre. Mais pour qu’ils puissent répondre aux yûes du général, il faut que les troupes y soient parfaitement exercées, ensorte qu’elles soient en état de les exécuter sans confusion & avec beaucoup de vîtesse ou de célérité.

Un général habile compasse avec soin tous ses différens mouvemens. Il n’en fait aucun qui n’ait un objet d’utilité, soit pour arrêter les démarches de l’ennemi, ou pour cacher le véritable objet qu’il se propose. Les mouvemens en-avant, ou pour s’approcher de l’ennemi, ne doivent se faire qu’avec beaucoup de circonspection. On ne doit s’avancer qu’autant qu’on a fait toutes les dispositions nécessaires pour n’être point obligé à rétrograder ; démarche qui décourage toûjours le soldat, & qui donne de la confiance à l’ennemi. Il est un cas particulier où le mouvement rétrogradé, loin d’avoir aucun inconvénient, peut être très-avantageux. C’est lorsqu’on l’emploie pour attirer l’ennemi au combat au moyen d’une retraite simulée ; alors, s’il se met à la poursuite de l’armée & qu’il abandonne ses postes, on se met aussi en bataille en état de le recevoir ; on lui fait perdre ainsi l’avantage du lieu où il auroit été difficile de l’attaquer.

Mouvement, s. m. en Musique, est le degré de vîtesse ou de lenteur qu’on donne à la mesure selon le caractere de l’air. Le mouvement s’exprime ordinairement par les mots gai, vîte, grave, lent, &c. ou par les mots italiens allegro, presto, grave, adagio, &c. qui leur correspondent. Voyez tous ces mots.

Mouvement, est encore la marche ou le progrès des sons de chaque partie du grave à l’aigu, ou de l’aigu au grave. Ainsi quand on dit qu’il faut autant qu’on peut faire marcher la basse & le dessus par mouvement contraire, cela signifie que l’une de ces parties doit monter tandis que l’autre descend. Mouvement semblable, c’est quand les deux parties montent ou descendent à-la-fois. Quelques-uns ont encore appellé mouvement oblique, celui où l’une des parties reste en place, tandis que l’autre monte ou descend. (S)

Mouvement, (Hydr.) dans une machine, est ce qui la met en branle ; une manivelle fait monter les tringles des corps de pompe ; les aîles d’un moulin le font tourner ; le balancier fait aller une pompe à bras. (K)

Mouvement, terme de Manége. Cheval qui a un beau mouvement. Cette expression désigne particulierement la liberté du mouvement des jambes de devant, lorsqu’en maniant il les plie bien. On se sert du même terme pour désigner la liberté de l’action de la main en-avant, lorsque le cheval, trotant par le droit, se soutient le corps droit & la tête haute, & qu’il plie les jambes de devant.

Mouvement de registres des clavecins, sont de petites bascules de fer ou de cuivre, attachées par leur partie du milieu par le moyen d’une cheville. A l’une de leurs extrémités, est une pointe ou crochet qui prend dans le registre ; de l’autre côté, est une petite poignée, par le moyen de laquelle on fait mouvoir le registre, en poussant dans un sens opposé à celui selon lequel on veut faire mouvoir le registre. Voyez l’article Clavecin, & la figure de cet instrument, Pl. XIV. de Lutherie.

Mouvemens de l’Orgue, sont les pieces par le moyen desquelles on ouvre & on ferme les registres. Un mouvement est composé d’un rouleau vertical BQ, Planche d’Org. fig. premiere. Ces rouleaux sont faits de bois de chene & a huit pans d’un pouce & demi ou environ de diametre. On met à chaque bout du rouleau une pointe de gros fil de fer pour servir de pivots. Ces pivots entrent dans deux sablieres ou pieces de bois Pp, Qq, qui traversent le fust d’orgue, & qui entrent à queue d’aronde dans des tasseaux disposés pour cet effet aux faces intérieures du fust d’orgue, qui est la menuiserie ou carcasse de l’orgue. Chaque rouleau a deux pattes de fer R, T, qui sont applaties & percées de plusieurs trous. Ces pattes qui ont un demi-pié ou environ de long sont rivées, après avoir traversé le rouleau que l’on perce avant de faire entrer la patte qui feroit fendre le rouleau sans cette précaution. Le plat de la patte inférieure R est tourné horisontalement, & la longueur de cette patte est parallele à la face du fust d’orgue ; l’extrémité de cette patte R doit répondre vis-à-vis & au même niveau que le trou par où passe le bâton quarré SR d’un pouce d’équarrissage. Ce bâton quarré est fendu en fourchette pour recevoir la patte R qui est arrêtée dans cette fourchette par une pioche de fil de fer, qui traverse le bâton quarré & la patte qui peut se mouvoir horisontalement dans cette fourchette ; à l’autre extrémité du bâton quarré qui sort du fust d’orgue auprès du clavier, est un trou percé selon l’axe du bâton. Ce trou reçoit la pomelle S faite au tour, qui est de buis, ou d’ébene, ou d’ivoire. Vers le haut du rouleau, est une autre patte T rivée comme la premiere ; la longueur de cette patte est perpendiculaire à la face du fust d’orgue, ensorte que les directions de ces deux pattes R, T font un angle droit. Cette patte T entre par sa palette qui est horisontale dans la fourchette du bâton quarré TV, & y est arrêtée par une cheville ou une pioche. L’autre extrémité de ce bâton quarré qui est fendu en fourchette verticalement, reçoit l’extrémité inférieure de la bascule uV qui y est retenue par une cheville ; la bascule Vu traverse-une piece de bois vr le long de laquelle regne une gravure rv, dans laquelle entrent les chevilles de fer sur lesquelles les bascules se meuvent ; l’extrémité u des bascules entre dans les trous qui sont aux épaulemens des registres. Voyez Registre.

Il suit de cette construction que si l’organiste tire le bâton quarré SR par la pomelle S que la patte R fera tourner le rouleau, le rouleau fera tourner la patte T qui tirera le bâton TV, le bâton tirera l’extrémité V de la bascule de fer Vu, dont l’extrémité u, à cause que c’est une bascule, s’éloignera du sommier, en tirant avec elle le registre dont la marche sera limitée par l’épaulement opposé. Lorsque l’organiste repoussera le bâton quarré SR, il fera tourner le rouleau en sens contraire ; & par conséquent le bâton quarré TV repoussera l’extrémité V de la bascule Vu, dont l’extrémité supérieure u repoussera le registre, jusqu’à ce que l’épaulement de ce côté porte contre le sommier. Chaque jeu de l’orgue a ce mouvement particulier, qui est en tout semblable à celui que l’on vient de décrire ; ainsi il suffit d’en entendre un seul pour être au fait de tous les autres. Les mouvemens des jeux du positif, lorsque les bâtons quarrés des pomelles sortent du grand orgue, sont composé, de deux rouleaux verticaux ; celui qui communique au bâton quarré de la pomelle est dans le grand orgue, & descend dans le pié où il communique par une patte à un bâton quarré qui passe sous le clavier de pédale, le siege de l’organiste, & va joindre une patte du rouleau qui est dans le positif : ce rouleau tire le registre par son autre patte.

Mouvement du coup de pié, dans la Danse, c’est celui qui consiste dans l’élévation & l’abaissement de la pointe du pié. De tous les mouvemens c’est le plus nécessaire, parce qu’il soutient le corps entier dans son équilibre. Si vous sautez, le coup de pié par sa force vous releve avec vivacité, & vous fait retomber sur les pointes : si vous dansez, il perfectionne le pas en le faisant couler avec légéreté.

Mouvement du genou, (Danse.) Ce mouvement ne differe de celui du coup de pié, qu’en ce qu’il n’est parfait qu’autant que la jambe est étendue & la pointe basse. Il est inséparable du mouvement du coup de pié.

Mouvement de la hanche, (Danse) est un mouvement qui conduit celui du coup de pié & du genou. Il est impossible que les genoux & les piés se meuvent, si les hanches ne se tournent les premieres. Il y a des pas où la hanche seule agit, comme dans les entrechats, les battemens terre à terre, &c.

Mouvement, terme d’Horlogerie, se dit en général de l’assemblage des parties qui composent une horloge, a l’exclusion de la boîte, du cadran, &c. mais il signifie plus particulierement parmi les Horlogers, cette partie qui sert à mesurer le tems.

Les Horlogers appellent mouvement en blanc celui d’une montre ou d’une pendule lorsqu’il n’est qu’ébauche ; dans ces sortes de mouvemens la fusée n’est point taillée, les pieces de laiton ne sont ni polies ni dorées, les engrenages, l’échappement & les pivots ne sont point finis. Voyez Montre, Pendule, Horloge, Échappement, Engrenage, Pivots, &c.

Mouvement, ou Émotion, en Rhétorique. Voyez Passion.

Mouvement, propre, (Jurispr.) On distingue les arrets rendus par le roi en son conseil, émanes de son propre mouvement, de ceux qui sont rendus sur la requête d’une partie. Les premiers ne sont pas susceptibles d’opposition. Le pape emploie quelquefois dans des bulles & brevets la clause motu proprio. Cette clause qui annonce un pouvoir absolu, est regardé en France comme contraire à nos libertés. On s’éleva contre cette clause en 1623 & en 1646. Le pape avoit aussi employé ces mots dans le bref du 12 Mars 1699, portant condamnation de 23 propositions tirées du livre de l’archevêque de Cambrai ; mais le parlement, en enregistrant ce bref, par arrêt du 14 Août suivant, mit que c’étoit sans approbation de cette clause du propre mouvement de sa sainteté. (A)