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mais, ni dans les tems de sécheresse, ni dans les tems de pluie. On avoit tant de vénération pour les nymphes qu’on croyoit y résider, qu’on bâtit à leur honneur un beau temple de pierre blanche, comme l’observe Philostrate.

Les dames romaines tiroient de cette ville une espece de vermillon où il entroit de la pourpre, & dont elles se fardoient, Puteolanum purpurissum è cretâ argentariâ. Enfin Auguste & Néron, pour soutenir l’éclat de Puteoli, y envoyerent de nouvelles colonies. Le lecteur peut consulter l’ouvrage de Scipione Mazella, intitulé Antichita di Pozzuolo, Neapoli 1606, auquel ouvrage on a joint le traité de Jean Elisius, médecin, de balneis Puteolanïs. Voici la suite de l’histoire de Puteoli.

Elle fut réduite en cendres par Alaric l’an 410 de l’ere chrétienne, & par Genseric l’an 455 ; environ 90 ans après, elle fut prise par Totila, qui la saccagea & la fit démanteler au point qu’elle demeura sans habitans pendant seize années. Les Grecs l’ayant rebâtie, elle se rétablit peu-à-peu, de sorte qu’elle étoit une bonne place lorsque Romuald II. du nom, duc de Benevent, s’en saisit l’an 715, & la désola par le fer & par le feu. Elle fut pillée par les Hongrois au x. siecle. Après plusieurs changemens de maîtres, elle tomba au pouvoir d’Alphonse d’Arragon, roi de Naples, dans le xv. siecle. Les tremblemens de terre ont fait aussi d’étranges ravages dans cette ville en divers tems, & sur-tout l’an 1538, au rapport de Gassendi. Enfin Poussol, dont il importe de lire l’article conjointement avec celui-ci, n’est plus qu’une ville misérable. Quoiqu’elle soit dans la plus agréable situation du monde & qu’elle ait le titre d’évêché, elle n’attire sur son passage que quelques voyageurs curieux de considérer les restes qui s’y trouvent de son ancien état.

Decimus Laberius, qui mourut à Puteoli en 711, étoit un poëte célebre dans ces especes de comédies boufonnes & licencieuses qu’on nommoit mimes, & qui se bornoient au pur amusement. Il prima longtems en ce genre de composition, & plut tellement à Jules César qu’il en obtint le rang de chevalier romain, & le droit de porter des anneaux d’or ; mais il eut dans Publius Cyrus un rival dangereux, qui lui enleva enfin les applaudissemens de la scène. (D. J.)

PUTICULI ou PUTICULAE FOSSES, (Antiq. rom.) c’étoient des fosses faites en forme de puits entre le mont Esquilin, les murailles de la ville, & la rue qui alloit à la porte Querquetulane, où l’on enterroit les pauvres gens ; ce qui infectoit tous les quartiers d’alentour. Pour se délivrer de cette infection, Auguste, avec l’agrément du sénat & du peuple romain, donna ce terrein à Mécénas, qui y bâtit une maison magnifique, & y planta des jardins d’une grande étendue, comme nous l’apprenons d’Horace, sat. VIII. l. I.

Huc priùs angustis ejecta cadavera cellis
Conservus vili portanda locabat in arcâ.
Hoc miseræ plebi stabat commune sepulchrum,
Nunc licet Esquiliis habitare salubribus, atque
Aggere in aprico spatiari quo modo tristes
Albis informem spectabant ossibus agrum.

Les Esquilies sont devenues une demeure saine & agréable ; & au lieu où auparavant des monceaux d’ossemens desséchés n’offroient aux yeux qu’un spectacle affligeant, s’éleve aujourd’hui une terrasse découverte de toutes parts qui présente une promenade délicieuse. (D. J.)

PUTOIS, s. m. putorius, animal quadrupede de même grosseur que la fouine & la marthe ; sa queue est moins longue que celle de ces animaux, mais il leur ressemble par la forme du corps ; il en differe

au contraire beaucoup par les couleurs du poil. Le tour de la bouche, les côtés du nez, le front, les temples, la partie qui est entre l’oreille & le coin de la bouche, & le bord de la face intérieure de l’oreille, sont blancs ; tout le reste du corps est noir ou fauve. Cet animal a une très-mauvaise odeur qui lui a fait donner le nom de putois, putorius, dérivé du mot latin putor, puanteur : on l’appelle aussi puant & punaisot. Il ressemble à la fouine par le tempérament, par le naturel & par les habitudes ou les mœurs. Il s’approche des habitations ; il monte sur les toîts, se cache dans les granges & les greniers à foin ; il n’en sort que la nuit pour chercher sa proie dans les basse-cours ; il écrase la tête à toutes les volailles, & les emporte une à une. Mais lorsqu’il est entré par un trou qui n’est pas assez grand pour que les volailles puissent y passer, il leur mange la cervelle & emporte les têtes. Il est aussi fort avide de miel, & le cherche dans les ruches. Les putois s’accouplent au printems ; les mâles se battent sur les toîts pour se disputer la femelle ; ensuite ils la quittent & vont passer l’été à la campagne ou dans les bois. La femelle reste dans les habitations jusqu’à ce qu’elle ait mis bas, & n’emmene ses petits que vers le milieu ou vers la fin de l’été : elle en fait trois ou quatre. Les putois passent l’été dans des terriers de lapins, des fentes de rochers ou des troncs d’arbres creux ; ils n’en sortent que la nuit pour chercher les nids des perdrix, des alouettes & des cailles ; ils grimpent sur les arbres pour prendre ceux des autres oiseaux ; ils épient les rats, les taupes, les mulots ; ils entrent dans les trous des lapins : ces animaux ne peuvent pas leur échapper ; une famille de putois suffit pour détruire une garenne. Le cri du putois est plus obscur que celui de la fouine, qui est aigu & assez éclatant ; ils ont tous deux, aussi-bien que la marte & l’écureuil, un grognement d’un ton grave & colere, qu’ils répetent souvent lorsqu’on les irrite. Les chiens ne veulent point manger la chair du putois, à cause de sa mauvaise odeur. Sa peau, quoique bonne, est à vil prix, parce qu’elle ne perd jamais entierement son odeur naturelle. Le putois paroît être un animal des pays tempérés : on n’en trouve guere qu’en Europe, depuis l’Italie jusqu’en Pologne. Hist. nat. génér. & particul. tome VII. Voyez Quadrupede.

PUT-PUT, voyez Hupe.

PUTNEY, (Géog. mod.) bourg à marché d’Angleterre, province de Middlesex.

C’est dans ce bourg que naquit sous le regne de Henri VIII. Thomas Cromwel, fils d’un forgeron du lieu. La fortune prit plaisir de l’élever au faîte des grandeurs pour l’en précipiter tout-d’un-coup, & le faire périr d’une mort tragique. Il commença par servir chez les étrangers, & étoit soldat dans l’armée du duc de Bourbon en Italie, quand Rome fut saccagée. A son retour en Angleterre, il entra chez le cardinal Wolsey ; & après la chute de ce favori, le roi voulut bien le prendre à son service, à cause de la fidélité qu’il avoit marquée à son ancien maître. Il fut revêtu successivement des dignités de maître des rôles, de baron, de garde du sceau privé, de vice-gérent du roi dans les affaires spirituelles, de chevalier de la Jarretiere, de comte d’Essex, de grand chambellan d’Angleterre. Il exécuta de grandes choses avec une extrème habileté, l’établissement de la suprématie du roi, & l’extirpation des moines ; mais enfin un malheureux mariage qu’il mit dans la tête de Henri VIII. n’étant plus agréable à ce prince, fut la cause de sa perte : comme Anne de Cleves devenoit plus complaisante pour le roi à mesure qu’il s’en dégoutoit davantage, il soupçonna que Cromwel engageoit cette princesse à avoir des manieres plus douces pour empêcher le divorce ; sur cela Cromwel tomba dans la disgrace du roi, fut accusé par Tho-