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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 13.djvu/797

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dans cette lecture, &c. trouvant ne sauroit se rapporter correctement à personnes, parce que personnes est au génitif, & trouvant au nominatif.

Le rapport vicieux est un défaut où on tombe souvent sans y penser ; & l’auteur est moins capable de s’en appercevoir que le censeur éclairé auquel il communique son ouvrage, & qui le lit froidement.

Rapport, en Géométrie & en Arithmétique, c’est le résultat de la comparaison de deux quantités l’une avec l’autre, relativement à leur grandeur. On se sert aussi du mot raison, & même plus communément, surtout lorsque ce mot est joint à un adjectif, comme raison directe, raison inverse, raison doublée, &c. Voyez Raison.

L’égalité de deux rapports forme ce qu’on appelle une proportion. Voyez Proportion. (E)

Rapport ou Affinité, (Chimie.) les Chimistes entendent par ces mots l’aptitude de certaines substances à s’unir chimiquement à certaines autres substances. Par exemple, ils disent de l’acide & de l’alkali, qui sont capables de contracter l’union chimique, qu’ils ont entr’eux du rapport ou de l’affinité. Mais ils emploient pourtant très-rarement cette expression au positif, c’est-à-dire, pour désigner une propriété absolue : cette aptitude à s’unir considérée absolument, est ordinairement exprimée par les mots de solubilité ou de miscibilité ; & ces expressions d’affinité & de rapport sont consacrés à exprimer les differens degrés d’énergie de cette aptitude, de cette pente à s’unir. On dit, par exemple, que l’acide & l’alkali sont solubles l’un par l’autre, ou qu’ils sont miscibles (voyez Miscibilité), & que l’alkali fixe a plus de rapport ou d’affinité avec l’acide que l’alkali volatil.

Les divers degrés de rapport s’estiment entre deux substances par la faculté qu’a l’une de ces substances de précipiter l’autre. Voyez Précipitation. Ainsi, dans l’exemple allégué, l’alkali fixe est dit avoir plus de rapport avec l’acide que l’alkali volatil, parce que si on applique l’alkali fixe à un corps formé par l’union de l’acide & de l’alkali volatil, l’alkali fixe dégage l’alkali volatil, & s’unit à l’acide en sa place. Il est essentiel de se ressouvenir de cette signification propre de ces expressions : plus grand rapport, plus de rapport, &c. car sans cela, on pourroit facilement être trompé par la considération de la facilité avec laquelle certaine substance s’unit à telle substance, & de la difficulté avec laquelle elle s’unit à telle autre ; en pensant que le plus grand rapport se trouve avec la plus grande facilité, & réciproquement. Car cette circonstance ne fait rien du tout au degré d’affinité, puisque tel corps qui s’unit à un autre avec la plus grande facilité, est ensuite précipité par un troisieme, qui n’avoit pas même la faculté de s’unir immédiatement avec celui de la société duquel il le dégage ou précipite. Par exemple, l’acide marin ne s’unit point immédiatement au mercure ni à l’argent, du-moins dans les procédés ordinaires, & l’acide nitreux s’unit, avec la plus grande facilité, à l’une & à l’autre de ces substances métalliques : cependant l’acide marin appliqué au composé formé par l’union de l’acide nitreux & de l’argent, ou du même acide & du mercure, en précipite l’acide nitreux ; c’est pourquoi on dit de l’acide marin qu’il a plus de rapport avec le mercure, & avec l’argent, que l’acide nitreux.

La table des rapports ou affinités, dressée par Geoffroy l’aîné, qui est gravée dans les planches de Chimie (voyez ces Planches), est une suite de systèmes ou séries de divers sujets chimiques disposés entre eux, selon les degrés de leur affinité. Chaque colomne de cette table, prise verticalement, contient un de ces systèmes. Le caractere qui occupe la case supérieure de chaque colomne représente la substance

chimique avec laquelle toutes les substances représentées dans les cases inférieures ont divers degrés de rapport. La substance de la case inférieure est celle qui a le moindre rapport, celle qui la suit immédiatement en a davantage, & ainsi de suite, jusqu’à celle de la case que suit immédiatement la case supérieure. D’où il s’ensuit que, si on unit ensemble la substance de la case supérieure, & celle de la case inférieure, toutes les substances intermédiaires sont capables de précipiter la substance de la case inférieure ; & que si l’on procede par ordre elles se précipiteront toutes successivement jusqu’à ce qu’on soit parvenu à celle qui a le plus grand rapport connu. Prenons pour exemple la premiere colomne de la table de Geoffroy : l’acide uni à une substance métallique est précipité par la terre absorbante, par l’alkali vosatil, & par l’alkali fixe ; la terre absorbante unie à l’acide est précipitée par l’alkali volatil, & par l’alkali fixe, & enfin l’alkali volatil uni à l’acide est précipité par l’alkali fixe.

La table des affinités de Geoffroy fut exposée dès sa publication à plusieurs objections, la plûpart très légitimes, & auxquelles l’auteur ne donne que des solutions insuffisantes. Plusieurs chimistes ont fait depuis plusieurs corrections & des augmentations considérables à cette table. Mais ces corrections & ces augmentations n’ont pas été rédigées encore : cette table immense d’affinités, qu’on a imprimée avec la pharmacopée de Quincy, est un monstre chimique. M. Jean-Philippe de Limbourg, médecin de Liége, en a présenté une à l’académie de Rouen, qui a remporté le prix proposé par cette compagnie, pour l’année 1758 cette table est beaucoup plus étendue que celle de Geoffroy ; mais l’auteur n’a pas publié encore les expériences d’après lesquelles il l’a dressée. Ensorte que la table de Geoffroy, toute imparfaite qu’elle est, mérite seule jusqu’à présent d’être adoptée, au-moins comme modele, comme germe ou noyau d’une meilleure, dont vraissemblablement l’art ne sera pas longtems privé. Au reste, on trouvera dans les articles particuliers destinés aux différens sujets chimiques, plusieurs observations particulieres sur leurs différens rapports, & ces observations quelquefois discutées contradictoirement avec les prétentions de Geoffroy. Voyez, par exemple, à l’article Chaux Chimie.

Les Chimistes sagement circonspects, se gardent bien de théoriser sur le formel, le mécanisme, les causes de l’affinité chimique. Ils soupçonnent bien que la similitude ou l’identité de certains principes de certaine surface, de certain côté dans les corps affinés, peut être le principe de cette singuliere propriété : mais cette conjecture est exposée à des difficultés presqu’insurmontables. Car lorsqu’on en vient à la combinaison des principes primitifs, des élémens, la similitude ou l’identité d’une certaine surface, d’un certain côté manque absolument. De plus, il ne se fait point d’union chimique, comme nous l’avons exposé à l’art. (voyez cet article), sans que les particules de chacun des corps que l’on méle sous forme d’aggrégé ou de masse, n’aient moins de rapport entr’elles qu’avec celles de l’autre corps. Or certes on ne sauroit concevoir que difficilement (ou résoudroit pourtant cette difficulté plutôt que la premiere), qu’il puisse y avoir dans les particules de chacun de ces deux aggrégés que je suppose des corps composés, des surfaces ou côtés plus semblables, plus identiques à l’un des côtés des particules de l’autre aggrégé, que les particules de chaque aggrégé ne sont semblables, ne sont identiques entre elles. Il paroît donc qu’il vaut mieux se contenter de l’expression vague & indéfinie (ces expressions sont si précieuses dans les sciences de fait) d’affinité ; & que M. Port, qui, en employant le mot d’égalité ou d’identité, reproche aux François leur attachement pour