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que les mets épicés, aromatisés, la boisson du bon vin, ou d’autres liqueurs fermentées bien spiritueuses : l’exercice est très-nécessaire, pour dissiper les humidités surabondantes, & favoriser à cet effet la transpiration, & les autres excrétions séreuses. On doit éviter soigneusement toute affection de l’ame, qui jette dans l’abattement, & rechercher au contraire ce qui peut exciter, fortifier le corps & l’esprit, & procurer de l’agilité à l’un & à l’autre, même en se livrant quelquefois à des passions vives, propres à causer de l’émotion, de l’agitation, & des impressions fortes.

2°. La différence de l’âge rendant les corps différemment constitués, & faisant passer le même individu comme par différens tempéramens, à-proportion qu’il eprouve les changemens que les progrès de la vie occasionnent, exige par conséquent aussi une maniere de vivre conforme à ces dispositions, si différentes dans le cours de la vie.

L’âge d’impuberté, qui renferme l’enfance, laquelle se termine à sept ans environ, & l’âge puérile, qui s’étend jusqu’à quatorze ans, peut être comparé au tempérament sanguin, attendu que le chaud & l’humide dominent dans cet âge. Comme dans ce tempérament ils demandent par conséquent le même régime, à-proportion des forces, qui doit être le même aussi dans tous les tems de la vie, pour la saison du printems, qui est distinguée des autres par les mêmes qualités qui sont dominantes dans l’enfance & le tempérament sanguin ; ce qu’on peut dire encore des climats tempérés tirant vers les climats chauds.

L’âge de puberté, qui renferme l’adolescence, laquelle s’étend jusqu’à vingt-cinq ans, & la jeunesse qui finit à trente-cinq, est distingué par le chaud & le sec, qui, tout étant égal, sont dominans dans l’économie animale ; il a par conséquent beaucoup de rapport au tempérament bilieux, & à la saison de l’été, ainsi qu’aux climats chauds, dans lesquels les mêmes qualités dominent. Ainsi le régime que l’on a dit convenir à ce tempérament, convient aussi aux personnes de cet âge, avec les modifications proportionnées à la constitution propre de chaque individu.

L’âge de virilité renferme l’âge de force, qui comprend le sixieme septenaire & celui de consistence, qui est terminé avec le septieme septenaire, a pour qualités dominantes le froid & l’humide, comme le tempérament phlegmatique, la saison de l’automne, & les climats tempérés tirant vers les climats froids. Ainsi ce qui convient à ce tempérament convient aussi à cet âge, à cette saison, & à ces climats, avec les exceptions ou les changemens qui peuvent indiquer la nature particuliere de chaque sujet.

L’âge de vieillesse, qui comprend l’âge de déclin, lequel s’étend jusqu’à la fin du dixieme septenaire & l’âge de décrépitude, qui se termine avec la vie, poussée aussi loin qu’il est possible, a pour qualités dominantes le froid & le sec, comme le tempérament mélancolique, la saison de l’hiver, & les climats froids. Ainsi le régime qui a été proposé pour ce tempérament, est aussi convenable à cet âge, à cette saison, & à ces climats, toujours sous la réserve des indications particulieres à la nature des sujets.

Mais le régime qui convient à chaque âge, peut être plus particulierement connu d’après ce qui suit.

En général, il faut donner beaucoup à manger aux enfans, selon le conseil d’Hippocrate, aphor. 13. 14, parce qu’ils sont naturellement voraces, qu’ils supportent difficilement la privation des alimens, le jeûne ; qu’ils ont beaucoup de chaleur innée, & qu’ils consomment beaucoup de nourriture par l’accroissement & la dissipation. Moins les enfans sont éloignés de la naissance, plus il faut leur permettre de se livrer au sommeil ; & à-proportion qu’ils avancent en âge, il faut en retrancher. Il est essentiel pour

la santé des enfans que l’on leur tienne le ventre libre, s’il ne l’ont pas tel naturellement, parce que quand il reste resserré pendant un certain tems, c’est une marque qu’ils ont de la disposition à être malades. Mais pour un plus grand détail sur ce qui regarde le régime qui convient aux enfans, voyez Enfance, & Enfans, maladies des.

Pour ce qui est des jeunes gens, de ceux qui sont dans la vigueur de l’âge ; selon le conseil de Celse, ils sont moins dans le cas d’avoir besoin de vivre de régime, que dans tout autre tems de la vie, parce que les fautes qu’ils peuvent commettre en fait de régime sont de moindre conséquence par leurs effets, & que leurs forces naturelles les mettent en état de supporter, sans des altérations considérables pour la santé, les excès qui peuvent leur être contraires ; il suffit presque pour se conserver qu’ils évitent de s’exposer à l’air froid, d’user de boissons froides quand le corps est bien échauffé par les différens exercices, par les travaux auxquels on se livre à cet âge. Ils doivent encore éviter tout ce qui peut échauffer, trop agiter le sang & épuiser les forces, comme l’usage des boissons fortes, les passions violentes, & l’excès des plaisirs de l’amour.

Dans l’âge plus avancé, & dans la vieillesse, on doit avoir d’autant plus de soin de sa santé, que l’on devient dans ces derniers tems de la vie susceptible de plus en plus d’être affecté désavantageusement par l’abus des choses non-naturelles : il faut alors chercher à vivre dans un air assez chaud & un peu humide ; favoriser la transpiration, éviter soigneusement pour cet effet les impressions de l’air froid ; être très-tempérant dans l’usage des alimens, manger peu de viande, beaucoup de fruits cuits, d’herbages bouillis ; boire de bon vin, mais bien trempé (car quoi qu’on en dise, le prétendu lait des vieillards employé sans correctif est trop stimulant, & ne peut qu’être nuisible, ainsi que toutes les liqueurs spiritueuses, coagulantes, & tout ce qui peut exciter de fortes contractions dans les solides, & hâter les effets de la disposition du corps au dessechement) ; & enfin chercher le repos & la tranquillité de l’ame le plus qu’il est possible.

3°. Le régime qui convient aux différens sexes peut être déterminé en général par la maniere de vivre convenable aux différentes constitutions.

Les personnes robustes & saines qui se trouvent principalement parmi les hommes, doivent, selon le conseil de Celse, ne pas mettre trop d’uniformité dans leur nourriture & dans leur conduite, relativement aux soins de leur santé ; ceux qui sont naturellement vigoureux, ne doivent pas affecter une résidence choisie ; ils font bien de varier à cet égard, d’être tantôt en ville, tantôt en campagne, de manger & de boire tantôt plus, tantôt moins, pourvu que ce soit toujours sans excès ; de manger indifféremment de tout ce qui n’est pas malsain de sa nature ; de se donner quelquefois beaucoup d’exercice, d’autres fois de n’en prendre que peu : en un mot, ils doivent s’accoutumer à tout, afin d’être moins susceptibles des altérations dans l’économie animale, auxquelles on peut être exposé dans les différens changemens de vie, que souvent on ne peut éviter, & dans les différentes situations où l’on est forcé de se trouver, comme les gens de guerre. Mais quoique les personnes robustes ne doivent pas beaucoup s’écouter pour ce qui intéresse la santé, ils ne doivent jamais abuser de leurs forces ; jamais dans les plaisirs & la joie ils ne doivent se permettre les emportemens de la débauche : leur vigueur est un trésor qu’ils doivent ne pas épuiser, pour être en état de résister aux infirmités inséparables de la vie humaine.

Les gens foibles & délicats ; & dans cette classe on peut ranger les femmes en général, ainsi que la plû-