Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 14.djvu/137

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qui répond ou s’engage pour un autre. Voyez Caution & Garant.

Le répondant est tenu du dommage causé par celui pour lequel il a répondu. Il y a quatre ordonnances de nos rois qui défendent expressément aux bourgeois de prendre des domestiques qui n’ayent des répondans par écrit. Répondant, dans cette derniere phrase, se prend pour l’acte même, par lequel quelqu’un s’est engagé à répondre de la fidélité d’un domestique. Mais cet usage d’exiger des valets des répondans, est tout-à-fait négligé.

RÉPONDRE, v. act. (Gram.) c’est satisfaire à une question ou à une demande. Il n’y a point d’ignorans qui ne puissent faire plus de questions qu’un habile homme n’en peut répondre.

Répondre, (Critiq. sacrée.) ce mot signifie dans l’Ecriture 1°. répliquer à un discours, à une question ; 2°. justifier, rendre témoignage : mon innocence me rendra témoignage, respondebit, Gen. xxx. 33. Enfin contredire, contester ; qui êtes-vous pour contester avec Dieu ? Qui respondeas Deo. Job. ix. 14. (D. J.)

Répondre, dans le Commerce, signifie cautionner quelqu’un, le rendre garant pour lui. Les cautions & leurs certificateurs répondent solidairement des dettes, faits & promesses de ceux pour qui ils s’engagent, & doivent à leur défaut les acquitter, delà le proverbe, qui répond, paie : ce qui n’arrive que trop fréquemment dans le négoce. Dictionn. de Commerce.

Répondre aux éperons, (Maréchal.) se dit d’un cheval qui y est sensible & y obéit. Répondre à l’éperon est tout le contraire ; car ce terme signifie un cheval mol, qui au lieu d’obéir au coup d’éperon, ne fait qu’une espece de plainte, & n’en est pas plus ému. Répondre à la main. Voyez Main.

RÉPONS, s. m. terme de breviaire, c’est une espece de motet composé de paroles de l’Ecriture, & relatives à la solemnité qu’on célebre, qui est chanté par deux choristes, à la fin de chaque leçon de matines ; on en chante aussi un à la procession & aux vêpres. Il est appellé répons, parce que tout le chœur y répond en en répétant une partie, que l’on nomme reclame ou réclamation. Voyez Reclame.

Il y en a aussi à la fin des petites heures qu’on appelle répons-brefs, parce qu’ils sont plus courts que les répons des matines. Ils sont chantés par les enfans de chœur, & tout le peuple y répond en en reprenant une partie ; les répons-brefs sont toujours suivis d’un verset & d’une oraison.

RÉPONSE, REPARTIE, (Synon.) la réponse en général s’applique à une interrogation faite. La repartie se dit indifféremment de toute replique. Quoiqu’une repartie vive & prompte fasse honneur à l’esprit, il est encore plus convenable de se retrancher à une repartie judicieuse ; & dans les questions qu’on a droit de nous faire, il faut s’attacher à y répondre nettement.

Il y a des occasions où il vaut mieux garder le silence que de faire une repartie offensante, & l’on n’est pas obligé de répondre à toutes sortes de questions.

Une repartie se fait toujours de vive voix, une réponse se fait quelquefois par écrit.

Les réponses & les reparties doivent être justes, promptes, judicieuses, convenables aux personnes, aux tems, aux lieux & aux conjectures. Il y a des réponses & des reparties de toutes especes qui laissent plus ou moins à penser à l’esprit. Il y en a de sentencieuses, de jolies, de satyriques, de galantes, de flatteuses, de nobles, de belles, de bonnes, d’heureuses, d’héroïques, &c. Donnons quelques exemples des unes des autres.

On demandoit à Aristarque pourquoi il n’écrivoit point. « Je ne puis pas écrire ce que je voudrois,

répondit-il, & je ne veux pas écrire ce que je pourrois ». Tacite a encore mieux dit : Rara temporum felicitas, ubi sentire quæ velis, & quæ sentias scribere licet.

La repartie de la reine Christine à ceux qui se plaignoient de ce qu’elle avoit nommé Salvius sénateur de Suede, quoiqu’il ne fût pas d’une maison assez noble, devroit être connue de tous les rois. « Quand il est question d’avis & de sages conseils, répondit-elle, on ne demande point seize quartiers, mais ce qu’il faut faire. Les nobles avec de la capacité ne seront jamais exclus du sénat, & n’excluront jamais les autres ». Mélang. de litt. par M. Dalembert, t. ij.

On peut mettre dans l’ordre des jolies reparties toutes les saillies quand elles ont du sel. Telle est, par exemple, la réponse d’un mauvais peintre devenu médecin, qui dit vivement à ceux qui lui demandoient la raison de son changement d’état, « qu’il avoit voulu choisir un art dont la terre couvrît les fautes qu’il y feroit ».

Telle est encore la réponse plaisante d’Henri IV. à Catherine de Médicis, lors de la conférence de Ste Bris près de Coignac en 1586. Cette princesse qui employoit ses filles d’honneur à amuser les grands & à découvrir leurs secrets, se tournant vers Henri IV. lui demanda qu’est-ce qu’il vouloit : « Madame, lui répondit-il en regardant les filles qu’elle avoit amenées, il n’y a rien-là que je veuille ». Il ne lui avoit pas toujours fait une aussi bonne réponse.

Un satyrique spirituel interrogé de ce qu’il pensoit d’un tableau du cardinal de Richelieu, dans lequel ce ministre s’étoit fait peindre tenant un globe à la main, avec ces mots latins, hic stante cuncta moventur, en subsistant il donne le mouvement au monde, répondit vivement, ergo cadente, omnia quiescent, lorsqu’il ne subsistera plus, le monde sera donc en repos.

Entre les reparties où regne l’esprit d’une noble galant rie, on peut citer celle de M. de Bussy : « Vous me regardez aussi », lui dit une belle femme : « Madame, lui repartit-il, on sait si bien qu’il faut vous regarder, que qui ne le fait pas dans une compagnie, y entend sûrement finesse ».

J’ai parlé des reparties flatteuses. Une femme vint le matin se plaindre à Soliman II. que la nuit pendant qu’elle dormoit, ses janissaires avoient tout emporté de chez elle. Soliman sourit & répondit qu’elle avoit donc dormi d’un sommeil bien profond, si elle n’avoit rien entendu du bruit qu’on avoit dû faire en pillant sa maison. « Il est vrai, seigneur, repliqua cette femme, que je dormois profondément, parce que je croyois que ta hautesse veilloit pour moi ». sultan admira la repartie & la récompensa.

On a fait souvent de nobles réponses, celle-ci mérite d’être citée. Dans le procès de François de Montmorency, comte de Luze & de Boutteville, M. du Châtelet fit pour sa défense un mémoire également éloquent & hardi. Le cardinal de Richelieu lui reprocha fortement d’avoir mis au jour ce mémoire pour condamner la justice du prince. « Pardonnez-moi, lui répondit-il, c’est pour justifier sa clémence, s’il a la bonté d’en user envers un des plus honnêtes & des plus vaillans hommes de son royaume ».

Je place au rang des belles réponses de l’antiquité celle de Marius à l’officier de Sextilius qui, après lui avoir défendu de la part de son maître de mettre le pié en Afrique, lui demanda sa réponse : « Mon ami, repliqua-t-il, dis à ton maître que tu a vu Marius fugitif, assis sur les ruines de Carthage ». Quelle noblesse, quelle grandeur, & quelle force de sens dans ce peu de paroles ! Il n’y avoit point d’image plus capable de faire impression sur l’esprit de Sextilius que celle-ci, qui lui remettoit devant les yeux la