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conduite, soit dans ses dispositions & dans la forme des actes que l’on passe.

Il y a plusieurs sortes de regles, ainsi qu’on va l’expliquer dans les articles suivans. (A)

Regles de chancellerie, ou de la chancellerie romaine, sont les réglemens, style & ordre que les papes ont établis pour être observés en la disposition des bénéfices ecclésiastiques, & l’expédition des provisions, & au jugement des procès en matiere bénéficiale.

Jean XXII. est à ce que l’on prétend, le premier qui ait fait de ces réglemens.

Ses successeurs en ont ajouté de nouveaux.

Chaque pape après son couronnement, renouvelle celles de ces regles qu’il juge à propos de conserver, ou les étend & restraint suivant les circonstances & les inconvéniens que l’on a reconnus dans celles de ses prédécesseurs.

En général elles ne durent que pendant le pontificat du pape qui en est l’auteur, à l’exception de celles qui sont reçues dans le royaume, lesquelles subsistent toujours, étant devenues par leur vérification, une loi perpétuelle du royaume.

Comme ces regles sont établies pour l’ordre d’une chancellerie, dont la France ne reconnoît point l’autorité, si ce n’est pour y obtenir certaines provisions bénéficiales, dispenses, & dans quelques autres matieres semblables, lesquelles sont ensuite traitées devant les juges du royaume ; elles n’y ont point lieu, à moins qu’elles n’aient été vérifiées au parlement, lequel ne les reçoit qu’autant qu’elles se trouvent conformes aux libertés de l’église gallicane, & comme dit Dumolin, elles ne sont reçues en France que comme un remede politique contre les fraudes, de sorte qu’il n’y en a qu’un très-petit nombre qui y soient reçues.

Il n’y en a que trois qui soient expressément reçues : savoir, la regle de infirmis resignantibus, ou de viginti diebus ; celle de publicandis resignationibus, & celle de verisimili notitiâ.

Il y a encore plusieurs autres de ces regles qui sont suivies dans le royaume, non pas comme regles de chancellerie, mais comme des regles d’équité établies par nos ordonnances, ou par la jurisprudence des arrêts, telles sont les regles, de non tollendo alteri jus quoesitum, de annali possessore, de non impetrando beneficia viventium, de idiomate.

Il y a encore les regles de mensibus & alternativâ, celle de triennali possessore, ou de pacificis possessoribus, & celle de vero valore exprimendo, qui sont observées à certains égards en France.

On expliquera ci-après ce qui concerne chacune de ces regles en leur rang.

Voyez la pratique bénéficiaire de Rebuffe, qui a fait un traité de toutes ces regles ; Dumolin, Louet & Vaillant, qui ont fait de savantes notes sur ces regles ; le traité de l’usage & pratique de cour de Rome de Castel. (A)

Regle catoniere, est une regle de droit ainsi appellée du nom de Marc Caton, fils aîné de Caton le censeur, que l’on tient être l’auteur de cette regle. Elle porte que ce qui est nul dans son principe, ne peut pas devenir valable par le laps du tems. Cette décision a été adoptée dans la regle 29, au digeste de regulis juris. Les jurisconsultes se sont beaucoup exercés sur cette regle ; Celsus en fait la critique au digeste de regulâ catonianâ ; on tient communément qu’elle ne reçoit d’application que dans les dispositions pures & simples, & non dans les dispositions conditionnelles. Voyez Forster, hist. jur. les regles de droit de d’Antoine, & la jurisprud. rom. de M. Terrasson.

Regle de commissionibus, est une regle de chancellerie romaine, qui veut que les commissions pour le jugement des procès soient données sous certaines formes. Elle n’est point suivie en France. Voyez

l’usage & pratique de cour de Rome, de Castel.

Regle de droit, est une maxime qui explique en peu de mots la jurisprudence qu’il faut suivre dans quelqu’affaire, ce n’est pas de la regle que vient le droit, mais au contraire du droit que vient la regle.

Il y a un très-grand nombre de regles de droit, dont les principales, au nombre de 221, ont été recueillies dans le L. liv. du digeste, tit. 17. de regulis juris.

Il y a aussi un titre des regles du droit canon dans les décrétales & dans le sexte.

Un grand nombre de jurisconsultes & de canonistes ont fait des commentaires sur les regles de droit. (A)

Regle ecclésiastique ou monastique, est une maniere de vivre prescrite par un supérieur ecclésiastique à ceux qui l’ont embrassée, telles que la regle de saint Benoît, celle de saint François, & autres. Voyez Chanoines réguliers, Noviciat, Chanoinesses, Moines, Profession, Religieux, Religieuses.

Regle de idiomate, est une regle de chancellerie romaine, qui déclare nulle toutes provisions données pour une église paroissiale, à moins que le pourvu n’entende la langue du lieu où est située l’église.

Regle de infirmis resignantibus, ou de viginti diebus, en françois la regle des 20 jours, est une des regles observées en la chancellerie romaine, qui porte si un ecclésiastique résigne son bénéfice étant malade, il faut pour que la résignation soit valable, que le résignant survive 20 jours après qu’elle aura été admise en cour de Rome ; autrement, & s’il meurt dans les 20 jours, la résignation est nulle, & le bénéfice dont il s’est démis, est censé vaquer par mort, & non par résignation.

Anciennement l’on n’observoit d’autre regle que celle des 20 jours, laquelle ne distinguoit point si le résignant étoit malade ou non, il falloit indistinctement que le résignant survéquît 20 jours : ce fut Boniface VIII. lequel en 1298 fit la regle de infirmis resignantibus, &c.

Cette regle a succédé à celle des vingt jours ; on l’appelle aussi indifféremment regle des vingt jours, quoique ces deux regles ne fussent pas entierement semblables.

Ces deux regles ont été établies successivement pour empêcher l’abus qui se pratiquoit dans les résignations. Ceux qui vouloient assurer leur bénéfice à un parent ou à un ami, sans néanmoins s’en dépouiller dès-lors, résignoient secretement en sa faveur, & gardoient les provisions, afin que, si le résignataire mouroit avant le résignant, celui-ci n’étant pas encore dépouillé de son bénéfice, le pût donner à un autre parent ; & que si le résignant mouroit le premier, le résignataire fût assuré du bénéfice, & en pût prendre possession aussitôt après le décès du résignant.

Trois conditions sont requises pour que la regle de infirmis resignantibus ait lieu, 1°. que le résignant soit malade, 2°. qu’il décede de cette maladie, 3°. qu’il décede dans les vingt jours.

Elle n’a pas lieu lorsque les médecins & chirurgiens attestent que la maladie dont le résignant étoit atteint lors de la résignation, n’étoit pas mortelle, & qu’il est mort de quelque accident provenu d’ailleurs que de cette maladie : au reste, quand le titulaire résigne étant malade, & qu’il décede dans les vingt jours, on présume qu’il est mort de cette maladie ; c’est au résignataire à prouver le contraire s’il y a lieu.

Les 20 jours se comptent du jour du consens, qui est une petite note que l’on fait à la chancellerie romaine, portant qu’un tel procureur constitué par la procuration à l’effet de résigner, a consenti à la résignation & à l’expédition de la signature de cour de