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troublées ni altérées par la force qui les anime (Voyez Arc de levée), qui reçoit la force motrice, & Régulateur, qui la mesure. Si l’on se fait une idée nette de ces deux puissances en équilibre, savoir, d’un côté, la force motrice ou active, & de l’autre, la force réglante ou passive, l’on aura la meilleure idée de la bonté des montres & des pendules ; & ce n’est que dans ce cas & sous ce seul point de vue qu’on peut & qu’on doit s’attendre de les voir marcher constamment & sans aucune variation ; mais si l’équilibre vient à être rompu par la perte ou l’augmentation d’une de ces puissances, il faut alors que la montre ou pendule varie, & cette variation sera en raison composée de la directe de l’une, & de l’inverse de l’autre, & réciproquement où elle pourroit être d’autant moindre, qu’elle tendroit à se compenser l’une par l’autre.

Sans faire ici l’énumération de toutes les causes qui peuvent altérer cet équilibre, ce qui meneroit trop loin, je vais exposer les principales, & montrer de quel côté l’on peut rompre cet équilibre.

1°. La force motrice étant un ressort, perd beaucoup de son énergie, & d’autant plus qu’il est plus long-tems tendu, & que la lame est plus épaisse. Voyez Ressort.

2°. La force motrice ne peut être transmise sur le régulateur sans passer sur tous les mobiles intermédiaires ; elle éprouve donc de l’altération par le frottement des pivots de tous les mobiles, & de leurs engrenages ; mais comme l’on ne peut apprécier exactement l’altération du ressort moteur, & encore moins celle que le frottement retarde sur tous les mobiles (Voyez Pivots), il suit qu’il excite réellement une perte variable de force motrice sur le régulateur. Il faut donc que cette force soit excédante, pour ne se pas trouver en défaut. Voyez Arc de levée).

3°. Le régulateur ou le balancier & son spiral, tire son énergie du moment du balancier multiplié par l’arc des levées, & divisé par le ressort spiral, c’est-à-dire par la force élastique ; plus elle est grande, plus elle détruit les momens du balancier, & plus les vibrations sont promptes, & réciproquement, c’est-à-dire le produit de la masse par le rayon de gravité : le rayon part du centre, & se termine non à la circonférence, mais au centre de gravité du rayon total. Voyez Frottement, Horlogerie, & la figure qui s’y trouve. Voyez aussi Vibrations & Régulateur.

Si la chaleur vient à dilater le balancier, les momens seront augmentés ; cette même chaleur agissant sur le spiral, l’alongera, & par conséquent le rendra plus foible, deux objets qui feront retarder la montre ; mais comme les frottemens font un si grand rôle dans toutes les machines, & sur-tout dans les montres, par la chaleur & par le froid, voyez ce que j’ai dit au mot Montre, & vous verrez que le froid retarde tous les mouvemens. De tout cela, il suit qu’il y a réellement trois causes essentielles pour faire varier les montres, indépendantes de la meilleure exécution.

1°. La force motrice.

2°. Les frottemens des mobiles qui la reçoivent.

3°. L’altération du régulateur.

Convaincu de ces trois objets, il faut donc, pour régler la montre la mieux faite, la mettre en expérience pendant dix, vingt, trente jours, l’observer sur une bonne pendule à secondes, écrire tous les jours ce qu’elle aura fait dans les diverses positions, pendue à plat, & portée toujours dans la température du dix ou vingtieme degré du thermometre de M. de Réaumur ; ensuite prendre pour point fixe le terme moyen de ses erreurs, affectant de choisir l’excès en avance plûtôt que le retard, parce qu’en général elle tend plus à retarder qu’à avancer. C’est avec de

telles précautions que j’ai réglé des montres au point de ne pas faire un quart de minute d’erreur par jour ; j’en ai même réglé qui en faisoient moins encore ; mais j’en ai aussi trouvé qui faisoient deux à trois minutes d’erreur, sans pouvoir y découvrir aucune cause dans l’exécution de leurs parties, malgré les recherches les plus appliquées ; alors j’ai eu recours, pour parvenir à corriger ces variations, de changer le grand ressort & le spiral, sans néanmoins y avoir trouvé en les examinant scrupuleusement aucun défaut assignable ; ce qui prouve qu’il y a dans le métal des défauts qui se refusent à nos lumieres, mais qui se manifestent par leurs effets.

Si une montre étant réglée avec toutes les attentions possibles vient à se dérégler par le changement de température, il ne faudra pas toucher au spiral sans s’assurer auparavant, par une suite d’épreuves réitérées, que la montre retarde ou avance véritablement dans la température moyenne du dixieme ou vingtieme degré, comme je l’ai dit ci-dessus.

A l’égard des pendules, le terme moyen sera d’autant plus aisé à prendre, que les pendules seront plus longs, & conséquemment les variations seront d’autant plus grandes, que les pendules seront plus courts ; comme le pendule est par sa nature un puissant régulateur qui absorbe en quelque sorte toutes les inégalités de la force motrice & des frottemens qui la dirigent, je ne m’arrêterai pas sur les autres objets, mais seulement sur le régulateur.

Avant de procéder à régler une pendule, il faut faire le même examen de toutes les parties de son mouvement, comme je l’ai déja indiqué pour les montres : cela posé, il faut ensuite faire une suite d’expériences par une température moyenne du dixieme ou vingtieme degré pendant vingt ou trente jours, écrire ce qu’elle aura fait tous les jours, & prendre pour point fixe le terme moyen des variations qu’elle aura donné.

L’addition que l’on fait d’un thermometre au verge de pendules à secondes, pour rendre constantes leurs longueurs par des différentes températures, seroit une très-bonne chose s’il étoit vrai que ces thermometres de métal fussent eux mêmes infaillibles ; mais par les expériences que j’en ai faites, je n’ai point vu qu’elles suivissent exactement le rapport des dilatations ; ce que je vais essayer de justifier par des raisons.

1°. Supposons qu’on ait un rapport exact de leurs différens métaux, ce qui est déja assez problèmatique, il faudra faire des leviers de compensation dans le rapport des dilatations données ; la plus petite erreur ou imperfection dans cette méchanique sera plus que suffisante pour produire des erreurs sur les alongemens plus contraires que favorables.

2°. Le frottement de toutes ces parties, qui doivent glisser les unes sur les autres, est une cause variable, & pourra donc aussi faire varier les dilatations dans des rapports plus grands ou plus petits des dilatations naturelles.

3°. Les dilatations suivent-elles exactement les effets du chaud & du froid ? Une barre de fer, d’acier ou de cuivre ayant éprouvé de l’alongement par la chaleur, revient-elle à la même longueur lorsque la température revient au terme dont elle étoit partie ? Pour moi, qui ai fait un grand nombre d’expériences pour vérifier cet effet, je n’oserois l’assurer, car j’ai toujours trouvé que le pendule restoit plus long après une grande dilatation, ensorte qu’elle ne suivoit point du tout la proportion des degrés de la température, & qu’en général toutes les erreurs tendoient à tenir les verges plus longues.

4°. Enfin une verge de pendule composée de plusieurs branches, peut remédier aux effets du chaud & du froid, est une machine composée qui par sa figure